AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Vu l'article 3, 1 du protocole de Luxembourg du 3 juin 1971 sur l'interprétation par la Cour de justice de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 ;
Attendu qu'à la suite d'un sinistre survenu en 1990 dans le parc de stationnement de la Société française pyrénéenne de transit (Soptrans), ayant endommagé 705 véhicules Opel appartenant à la société espagnole Général Motors Espagne ( GME ), une transaction est intervenue entre elles pour évaluer le préjudice de cette société ; que la société Soptrans ayant fait assigner en garantie devant le tribunal de grande instance de Perpignan ses assureurs, les sociétés françaises GIE Réunion Européenne, Axa, Winterthur, Le Continent et les Assurances Mutuelles de France, celles-ci ont alors attrait devant ce tribunal la société espagnole Zurich Seguros, assureur de la GME, pour obtenir sa garantie sur le fondement de l'article L. 121-4 du Code des assurances;
que la société Zurich Seguros ayant revendiqué la compétence du tribunal de Barcelone (Espagne), lieu de son siège social, l'arrêt attaqué (Montpellier, 5 février 2001) a déclaré les juridictions françaises incompétentes pour connaître de ce dernier appel en garantie ;
Attendu que les assureurs de la société Soptrans font grief à la cour d'appel d'avoir ainsi statué en écartant l'application de l'article 6, 2 , de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 et en s'étant fondée sur l'article 11 de cette convention, alors, selon le moyen :
1 / que l'action en garantie fondée sur le cumul d'assurance, qui oppose plusieurs assureurs, n'entre pas dans le champ d'application de l'article 11 de la convention ;
2 / que la connexité de la demande principale et de la demande en garantie ne figure pas au nombre des conditions d'application de l'article 6-2 et qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées ;
Attendu que le litige présente des questions d'interprétation de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 qui nécessitent, pour la Cour de Cassation, de saisir la Cour de justice des Communautés européennes ;
PAR CES MOTIFS :
Renvoie à la Cour de justice des Communautés européennes, siégeant à Luxembourg, pour quelle se statue sur les questions suivantes :
1 / Un appel en garantie ou en intervention entre assureurs, fondé non sur un traité de réassurance mais sur l'allégation d'un cumul d'assurance ou d'une situation de co-assurance, ressortissant de la matière des assurances, est-il soumis aux dispositions de la section 3 du Titre II de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 modifiée par la convention d'adhésion de 1978 ;
2 / Pour déterminer la juridiction compétente en cas d'appel en garantie ou en intervention formée entre assureurs, l'article 6, 2 , est-il applicable, et dans l'affirmative, cette application est-elle subordonnée à l'exigence d'un lien de connexité entre les différentes demandes au sens de l'article 22 de la convention, ou, à tout le moins, à la preuve de l'existence d'un lien suffisant entre ces demandes caractérisant l'absence de détournement de for ? ;
Sursoit à statuer jusqu'à sa décision ;
Réserve les dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille quatre.