AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que pour procéder à la désignation des membres du CHSCT de la direction régionale de Bourg-Achard de la Société Lidl, en vue du remplacement de deux membres démissionnaires, l'employeur, faisant application d'un accord sur les modalités de désignation des membres du CHSCT en date du 15 mai 2002, a réuni, à la même date, les élus de l'unique comité d'entreprise au siège de celui-ci à Strasbourg, et les délégués du personnel de la direction régionale concernée au siège de celle-ci ; que l'accord prévoyait notamment un vote à bulletin secret, le dépouillement ayant lieu à la direction régionale et au siège ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il est fait grief au jugement attaqué d'avoir débouté la société Lidl de sa demande d'irrecevabilité de la contestation formée par MM. X... et Y..., alors, selon le moyen :
1 / que l'article R. 236-5-1, alinéa 1er, du Code du travail ne prévoyant pas que le tribunal d'instance puisse être saisi d'une contestation relative à la désignation des représentants du personnel au CHSCT autrement que par voie de simple déclaration au secrétariat-greffe de la juridiction, le tribunal d'instance a violé ce texte en considérant qu'il avait été valablement saisi de la contestation formée par MM. X... et Y... par les lettres recommandées que ceux-ci lui avait adressées ;
2 / que lorsque les conditions de forme d'un recour prévues par la loi ne sont pas respectées, il en résulte une perte du droit d'exercer ce recours entraînant une fin de non-recevoir qui échappe à la règle "pas de nullité sans grief" ; que, dès lors, en retenant que la société Lidl n'alléguait aucun grief causé par le non-respect par les demandeurs des dispositions de l'article R. 236-5-1, alinéa 1er, du Code du travail, pour écarter la fin de non-recevoir en résultant, le tribunal d'instance a violé ce texte, ensemble les articles 122 et 124 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que la contestation prévue par l'article R. 236-5-1 du Code du travail formée par lettre est recevable si elle est parvenue au secrétariat-greffe dans les délais légaux ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il est encore fait grief au jugement attaqué d'avoir annulé l'élection de M. Z... en date du 28 mai 2001 (lire 2002) et celle de M. A... en date du 25 juin 2001 (lire 2002) en tant que membres du CHSCT de la direction régionale de Bourg-Achard de la société Lidl, alors, selon le moyen :
1 / qu'il ne résulte d'aucun texte, et notamment pas de l'article L. 236-5 du Code du travail, que tous les membres du collège désignatif doivent se réunir en un même lieu pour l'élection de la délégation du personnel au CHSCT ; qu'il s'ensuit qu'est parfaitement régulière l'élection pour laquelle les membres du comité d'entreprise, d'une part, et les délégués du personnel de la direction régionale concernée, d'autre part, ont été réunis, les premiers au siège de l'entreprise, et les seconds au siège de la direction régionale, pourvu que ce soit au même moment et en disposant de moyens techniques leur permettant de communiquer entre eux ; que, dès lors, en jugeant qu'en procédant de la sorte la société Lidl n'avait pas respecté ledit article L. 236-5 dont, selon le jugement, les dispositions stipuleraient que les membres du collège désignatif doivent se réunir en un même lieu, c'est le tribunal d'instance qui, en y a ajoutant, a violé ce texte ;
2 / que, en toute hypothèse, les conditions de désignation des membres des CHSCT relèvent du domaine des aménagements conventionnels qui, prévus par l'article L. 236-13 du Code du travail, constituent, non pas des protocoles préélectoraux au sens des articles L. 423-18 et L. 433-13 du même Code, mais des accords collectifs dont la validité n'est pas soumise à la signature de l'ensemble des organisations syndicales représentatives dans l'entreprise ; que, dès lors, en déniant à la société Lidl la possibilité de se prévaloir de l'accord d'entreprise signé le 15 mai 2002 prévoyant la possibilité de réunir en deux lieux différents les électeurs de la délégation du personnel au CHSCT, au motif erroné qu'il n'est possible de déroger aux règles du droit commun en matière d'organisation des élections professionnelles que par un accord unanime et qu'en l'espèce deux syndicats n'avaient pas signé ledit accord, le tribunal d'instance a violé l'article L. 236-13 du Code du travail ;
Mais attendu qu'après avoir exactement énoncé que les membres du collège désignatif prévu par l'article L. 236-5 du Code du travail doivent se réunir en un même lieu et à la même date pour procéder par voie d'élections à la désignation des membres du CHSCT, le tribunal d'instance, qui a relevé que l'accord collectif du 15 mai 2002 dérogeant à cette règle de nature électorale, qui n'entre pas dans les aménagements conventionnels visés à l'article L. 236-13 du Code du travail, n'était pas unanime, a ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 628 du nouveau Code de procédure civile ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Lidl à payer à M. X... la somme de 1 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier deux mille quatre.