AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que la Caisse d'allocations familiales a refusé à M. X..., ressortissant marocain, le bénéfice de l'allocation de rentrée scolaire pour son fils mineur au motif que celui-ci ne disposant pas du certificat de contrôle médical délivré par l'Office national d'immigration, ne justifiait pas de la régularité de son entrée et de son séjour en France ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses deux branches :
Attendu que la Caisse d'allocations familiales fait grief au jugement attaqué d'avoir fait droit au recours de l'intéressé alors, selon le moyen :
1 / que l'article 41 1 de l'accord de coopération CEE-Maroc qui consacre, dans le domaine de la sécurité sociale, l'interdiction de discriminer, en raison de la nationalité, les travailleurs de nationalité marocaine et les membres de leur famille résidant avec eux par rapport aux ressortissants des Etats membres, n'a pas d'effet direct pour les questions relatives à l'octroi des prestations familiales ; qu'en jugeant que M. X... pouvait se prévaloir de l'article 41 1 de cet accord pour obtenir l'octroi de l'allocation de rentrée scolaire en faveur de son fils malgré le défaut de production de l'un des titres de séjour ou documents exigés par la législation française, le tribunal a violé les articles L.512-1, R.512-1, R.512-2, D.511-1 et D.511-2 du Code de la sécurité sociale ;
2 / que le principe de non-discrimination des travailleurs marocains et membres de leur famille par rapport aux ressortissants des Etats membres dans le domaine de la sécurité sociale ne fait pas obstacle à ce que la législation nationale exige que les ressortissants étrangers justifient de la régularité de leur entrée et de leur séjour sur le territoire national pour pouvoir bénéficier des prestations sociales dans les mêmes conditions que les ressortissants nationaux ; qu'en jugeant que la Caisse d'allocations familiales ne pouvait exiger la production du certificat médical délivré par l'Office national d'immigration permettant d'attester la régularité de l'entrée et du séjour de l'enfant car cette exigence était contraire à l'article 41 1 de l'accord de coopération CEE-Maroc, le tribunal a violé les articles L.512-1, R.512-1, R.512-2, D.511-1 et D.511-2 du Code de la sécurité sociale ;
Mais attendu qu'il résulte de la combinaison des articles D.511-1 et D.511-2 du Code de la sécurité sociale que la régularité du séjour d'un mineur étranger que le bénéficiaire de prestations familiales a à charge et au titre duquel il demande l'octroi desdites prestations, est justifiée par la production d'un livret ou carnet de circulation ; qu'en relevant, abstraction faite de la référence à l'article 41 1 de l'accord de coopération CEE-Maroc, que l'enfant Ilyass X... était titulaire d'un document de circulation pour mineur étranger délivré par la Préfecture du Val-de-Marne, le tribunal en a déduit, à bon droit, que la régularité de son séjour en France était établie et justifiait en conséquence l'attribution à M. X... de l'allocation litigieuse ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident :
Vu l'article L.553-1 du Code de la sécurité sociale, selon lequel l'action de l'allocataire pour le paiement des prestations familiales se prescrit par deux ans ;
Attendu que, pour limiter la demande de M. X... à l'allocation de rentrée scolaire afférente aux années 2000 et 2001, le jugement attaqué se référe à la jurisprudence de la CJCE ;
Qu'en statuant ainsi, alors que M. X... tenait son droit des articles D.511-1 et D.511-2 du Code de la sécurité sociale, sans rechercher dans les limites de la prescription applicable depuis quelle date l'enfant Ilyass X... était titulaire d'un titre de circulation, le tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit la demande de M. X... bien fondée pour les années 2000 et 2001, le jugement rendu le 20 décembre 2001, entre les parties, par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Créteil ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris ;
Condamne la Caisse d'allocations familiales du Val de Marne aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la Caisse d'allocations familiales du Val de Marne ;
Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf décembre deux mille trois.