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19/11/2003 | FRANCE | N°02-87516

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 novembre 2003, 02-87516


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf novembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller THIN, les observations de Me HAAS et de la société civile professionnelle ROGER et SEVAUX, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Jorge,

- Y... Eric,

- Z... Roland,

contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 9ème chambre, en

date du 17 octobre 2002, qui, pour escroquerie, les a condamnés, chacun, à 15 000 euros d'amende, et a p...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf novembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller THIN, les observations de Me HAAS et de la société civile professionnelle ROGER et SEVAUX, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Jorge,

- Y... Eric,

- Z... Roland,

contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 9ème chambre, en date du 17 octobre 2002, qui, pour escroquerie, les a condamnés, chacun, à 15 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 313-1 du Code pénal, 388, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré les prévenus coupables d'escroquerie ;

"aux motifs que, sur les éléments matériels du délit, associés au sein de la société SLC les prévenus se sont, par l'intermédiaire de cette société derrière laquelle ils se sont dissimulés, portés acquéreurs du bien pour 520 000 francs le 2 juillet 1993, puis l'ont revendu, pour partie le même jour, pour partie le 30 novembre 1994, à un prix total de 890 000 francs, à l'insu du mandant, en lui dissimulant les véritables acquéreurs, la division anticipée du bien, le prix réel, percevant ainsi un supplément de prix qui aurait dû revenir à la partie civile ;

"alors, d'une part, que, s'il appartient aux juges de retenir tous les faits qui, bien que non visés dans le titre de la poursuite, ne constituent que des circonstances du fait principal, ils ne peuvent statuer sur des faits autres que ceux qui leur sont déférés et distincts de celui visé dans la prévention ; que les prévenus ont été renvoyés devant la juridiction de jugement du chef d'escroquerie pour avoir abusé de leur qualité d'agent immobilier pour acquérir à titre personnel le bien que leur mandant les avait chargés de vendre à un prix déterminé, alors qu'ils bénéficiaient déjà d'une promesse d'achat d'une partie du bien pour un prix largement supérieur à celui qu'ils devaient payer pour l'entier immeuble ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt que, au jour de la vente, les prévenus ne bénéficiaient pas d'une promesse d'achat d'une partie d'un bien pour un prix largement supérieur à celui qu'il devait payer pour l'entier immeuble dès lors que ladite promesse d'achat stipulait un montant de 500 000 francs, légèrement inférieur au prix de 520 000 francs auquel la société SLC a acquis l'entier immeuble ;

que, par suite, la cour d'appel ne pouvait pas, sans méconnaître l'étendue de sa saisine, retenir les prévenus dans les liens de la prévention sur la base de faits distincts de ceux pour lesquels ils avaient été poursuivis ;

"alors, d'autre part, que ne se rend pas coupable d'escroquerie l'agent immobilier qui se porte acquéreur du bien que son mandant lui a demandé de vendre dans l'urgence et qui, après avoir divisé l'immeuble en deux lots au su du vendeur, réalise une plus value dix huit mois plus tard à l'occasion de la revente du second lot" ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3 et 313-1 du Code pénal, 2046, 2048 et 2049 du Code civil, 388, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré les prévenus coupables d'escroquerie ;

"aux motifs que, sur l'élément moral de l'infraction, les prévenus ont admis avoir fait une proposition transactionnelle, que la partie civile a refusée dès lors qu'elle ne couvrait pas les droits mis à sa charge ; qu'une telle proposition, dans son seul principe, atteste de la conscience qu'avaient les prévenus de l'irrégularité de leurs actes à I'égard de M. A... ; que l'apparition de la photocopie de la fausse dénonciation du mandat de vente du "10 décembre 1992" atteste de la volonté des prévenus de s'affranchir de l'interdiction de se porter acquéreur du bien qu'ils avaient mandat de vendre ou de se constituer une preuve après naissance du contentieux et met en cause directement les trois prévenus ; que l'accomplissement de l'ensemble de ces actes matériels caractérise l'intention frauduleuse ;

"alors, d'une part, que l'élément moral d'une infraction s'apprécie à la date où elle est commise ; que la cour d'appel ne pouvait pas déduire l'intention frauduleuse des prévenus d'événements survenus au cours de l'information judiciaire ;

"alors, d'autre part, que la transaction sur l'intérêt civil résultant d'un délit est sans effet sur l'action publique ; que, dès lors, la cour d'appel ne pouvait pas déduire l'intention frauduleuse des prévenus de la proposition de transaction qu'ils avaient adressée en cours de procédure, à la partie civile ;

"alors, enfin, que s'il appartient aux ,juges de retenir tous les faits qui, bien que non visés dans le titre de la poursuite, ne constituent que des circonstances du fait principal ils ne peuvent statuer sur des faits autres que ceux qui leur sont déférés et distincts de celui visé dans la prévention ; que, bénéficiant sur ce point d'un non-lieu, les prévenus n'ont pas été poursuivis des chefs de faux et d'usage de faux pour avoir établi une fausse dénonciation du mandat de vente : que, par suite, la cour d'appel ne pouvait pas se fonder sur ce fait distinct de ceux qui lui étaient déférés, pour caractériser l'élément moral du délit d'escroquerie" ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 313-1 du Code pénal, 1382 du Code civil, 2, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, a condamné solidairement les prévenus à payer à la partie civile la somme de 56 500 euros en réparation de son préjudice matériel ;

"aux motifs que les services fiscaux ont procédé à un redressement portant uniquement sur les droits que la partie civile était censée avoir voulu éluder et, ce faisant ont réintégré dans l'actif de la succession la somme de 470 000 francs laquelle a été taxée à concurrence de 55 % plus les intérêts de retard ; que les manoeuvres opérées par les prévenus, tous trois bénéficiaires à travers la société SLC d'une somme d'au moins 350 000 francs, en ce non compris la minoration de la valeur de l'immeuble qu'ils avalent réussi à faire accepter à la partie civile sont directement et exclusivement à l'origine du redressement fiscal ; que ce redressement n'a porté que sur les sommes de 126 500 francs en principal et 102 465 francs d'intérêts, au lieu, respectivement, de 258 500 francs et de 58 162 francs, dans la mesure où les services fïscaux ont accordé des dégrèvements ; que si la partie civile avait pu déclarer le prix réel de 890 000 francs, elle aurait payé les mêmes droits de 55 % sur cette masse ; qu'elle n'aurait pas subi, en revanche, les intérêts de retard ; qu'il apparaît que l'administration a procédé à une réévaluation du bien à 990 000 francs, compte tenu de l'extrême faiblesse du prix déclaré par comparaison avec des ventes similaires, faisant ainsi supporter à la partie civile une responsabilité de 100 000 francs dont la responsabilité ne lui incombe pas ;

qu'outre ce préjudice matériel, la partie civile a subi une décote du bien vendu de 350 000 francs par rapport au prix global des ventes en deux lots ; qu'aucune amélioration du terrain vendu seul n'a été apportée du chef de la société SLC qui justifierait que cette décote puisse en partie lui profiter ; que la société SLC n'a pas davantage démontré que la division du terrain a par elle-même, apporté une plus value ;

"alors, d'une part, que si la réparation dont est tenu l'auteur d'un fait dommageable doit être égale à la totalité du préjudice subi, elle ne saurait cependant la dépasser ; qu'en fixant le préjudice matériel de la partie civile à la somme de 56 500 euros sans s'expliquer sur la méthode qu'elle avait appliquée pour parvenir à ce résultat auquel les différents éléments qu'elle relevait ne conduisait pas, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle ;

"alors, d'autre part, que, disposant, le cas échéant, de la faculté d'appliquer des pénalités pour mauvaise foi, les services fiscaux ne sauraient, pour sanctionner la minoration du prix déclaré d'un bien assujetti à des droits de succession, procéder à une surévaluation de la valeur de ce bien et, partant, calculer sur une base volontairement erronée les droits dus par le successible ; que, dès lors, en faisant supporter aux prévenus les conséquences d'une surévaluation du prix de l'immeuble par les services fiscaux, la cour d'appel a mis à leur charge la réparation d'un préjudice dépourvu de lien avec les faits d'escroquerie poursuivis" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré les prévenus coupables, et a ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;

D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

CONDAMNE Jorge X..., Eric Y..., et Roland Z... à payer, chacun, à Frédéric A... la somme de 800 euros au titre de l'article 618-1 du Code de procédure pénale ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Thin conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-87516
Date de la décision : 19/11/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 9ème chambre, 17 octobre 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 19 nov. 2003, pourvoi n°02-87516


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.87516
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