AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à Mme Astrid X..., veuve Y..., et seul successeur de son mari, de sa reprise d'instance au nom de celui-ci ;
Sur les trois moyens réunis, tels qu'énoncés au mémoire en demande et reproduits en annexe :
Attendu que, pendant l'été 1997 et dans le contexte d'une série en quatre éléments "Ces grandes affaires criminelles ont bouleversé la France. Elles ont été jugées ou classées mais le mystère demeure sur les assassins", l'hebdomadaire Paris Match a publié, le 7 août, un article intitulé "L'énigme du pull-over rouge", consacré au meurtre de la fillette Marie Dolorès Z... et à Christian A..., condamné à mort pour ce crime et exécuté en juillet 1976 ; que, reprochant à l'hebdomadaire d'avoir reproduit une photographie réalisée en 1974 au cours d'une reconstitution non interdite aux médias par le magistrat instructeur et montrant le père de la victime, un mouchoir contre le visage, soutenu par un ami et assortie de la légende "Pierre Z..., incapable d'en supporter plus, doit être évacué", ainsi qu'un portrait en médaillon de la petite victime et plusieurs pièces à conviction, et d'avoir donné une tonalité générale dubitative de la culpabilité du meurtrier, les consorts Z... père, mère, frère de l'enfant, ont assigné la Compagnie générale d'édition et de presse (Cogedi presse), M. Roger Y..., directeur de la publication et la société Hachette Filipacchi pour atteintes à leur droit à l'image, vie privée et affection ;
Attendu que pour les débouter, l'arrêt confirmatif attaqué (Aix-en-Provence, 21 mars 2000) relève, d'une part, que la photographie de M. Z... ne reproduit que sa douleur digne et légitime, révélée à l'époque de l'événement lui-même et indissociable de celui-ci, que celle de la fillette la représente le visage souriant, sans aucune mise en scène attentatoire au respect de sa mémoire ni au deuil de ses parents, et que l'une et l'autre avaient déjà fait l'objet de nombreuses publications ;
d'autre part, que la question de la culpabilité de Christian A..., objet de débats dans l'opinion publique, avait été présentée sans contrevérité ni intention de nuire à la victime ou à ses proches dans leur honneur, pudeur ou affection, et que le dossier judiciaire considéré, appartenant désormais à l'histoire des grandes affaires criminelles, n'était plus seulement réductible à la vie privée des consorts Z... ; qu'il a ainsi fait ressortir que l'article contesté relevait de la liberté de communiquer des informations, laquelle autorise la publication d'images de personnes impliquées dans un événement, sous la seule réserve du respect de leur dignité ; que la décision, en ce qu'elle écarte l'atteinte à l'image ou à la vie privée, est ainsi légalement justifiée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes des sociétés Hachette Filipacchi et Cogedi presse, de Mme Astrid X..., veuve Y..., et des consorts Z... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize novembre deux mille trois.