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05/11/2003 | FRANCE | N°01-17530

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 05 novembre 2003, 01-17530


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 septembre 2001), que la société Binks international France, aux droits de laquelle vient la société ITW Belgium, preneur à bail de locaux à usage commercial appartenant à la société Euro manager's, a donné congé à celle-ci par lettre recommandée avec avis de réception du 26 mars 1997 pour le 31 décembre 1997, conformément aux stipulations du bail ; que ce congé a été renouvelé par lettre

recommandée avec avis de réception du 10 avril 1997 ; que la société Euro manager's a as...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 septembre 2001), que la société Binks international France, aux droits de laquelle vient la société ITW Belgium, preneur à bail de locaux à usage commercial appartenant à la société Euro manager's, a donné congé à celle-ci par lettre recommandée avec avis de réception du 26 mars 1997 pour le 31 décembre 1997, conformément aux stipulations du bail ; que ce congé a été renouvelé par lettre recommandée avec avis de réception du 10 avril 1997 ; que la société Euro manager's a assigné la locataire en nullité du congé et en paiement de loyers ; que celle-ci a reconventionnellement demandé des dommages-intérêts équivalents au montant des loyers qui lui étaient réclamés ;

Attendu que la société Euro manager's fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande reconventionnelle de la société ITW Belgium, alors, selon le moyen :

1 / que, dès lors que le preneur s'était abstenu de donner congé par acte extrajudiciaire, le bailleur était en droit de se prévaloir de la nullité d'ordre public du congé, et de contraindre le locataire à exécuter son obligation si bien qu'en jugeant que la société Euro manager's avait commis une faute en s'abstenant en avril 1997 d'attirer l'attention de la locataire sur l'irrégularité du congé par lettre recommandée, alors que celle-ci, si ce fait lui avait été signalé, disposait encore de deux mois pour faire délivrer un congé par acte extrajudiciaire, la cour d'appel n'a pas légalement caractérisé l'abus de droit et a violé l'article 1382 du Code civil ;

2 / qu'en se bornant à déduire la connaissance par la bailleresse, qui n'avait pas participé à la rédaction du bail, de l'irrégularité au jour de la réception du congé de sa seule prétendue qualité de professionnel de l'immobilier, la cour d'appel a présumé la faute, en fait, en violation de la loi, peser sur les bailleurs professionnels une obligation de conseil à l'égard de leurs locataires, violant l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que la société Euro manager's était une professionnelle de l'immobilier et que, même si elle n'était pas la rédactrice de l'acte, elle ne pouvait sérieusement prétendre ne s'être avisée de l'irrégularité du congé que six mois après sa réception alors que, par son activité, elle avait nécessairement connaissance de la législation en la matière, et ayant retenu qu'en s'abstenant, en avril 1997, d'attirer l'attention de la locataire sur l'irrégularité du congé donné par lettre recommandée alors que, si ce fait lui avait été signalé, la locataire disposait encore d'un délai de deux mois pour faire délivrer un congé par acte extrajudiciaire, la cour d'appel a pu en déduire que la société Euro manager's avait commis une faute ayant causé à la société locataire un préjudice qu'elle a souverainement évalué au montant des loyers dont cette société s'était trouvée redevable du fait de la continuation du bail ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que la société Euro manager's fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société ITW Belgium une somme équivalente au montant des loyers dont cette société s'est trouvée redevable du fait de la continuation du bail à compter du 31 décembre 2000, alors, selon le moyen :

1 / qu'en ne recherchant pas à tout le moins, en réfutation des conclusions de la société Euro manager's, si la locataire, saisie de l'irrégularité du congé délivré le 10 avril 1997, ne devait pas, pour mettre fin au bail, délivrer régulièrement congé pour la fin de la période triennale, ce dont il résultait que la locataire était en tout état de cause tenue du paiement des loyers à compter de cette date, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs, violant l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

2 / qu'en énonçant qu'il n'aurait pas été contesté que le bail avait pris fin le 31 décembre 2000, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la société Euro manager's, violant l'article 1134 du Code civil ;

3 / qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel ayant condamné la société locataire au paiement des loyers dus jusqu'à la fin de la période expirant le 31 décembre 2000, le moyen manque en fait ;

Mais sur le troisième moyen :

Vu l'article 1134 du Code civil ;

Attendu que, pour condamner la société Euro manager's à payer à la société ITW Belgium la somme de 81 427 francs à titre de restitution du dépôt de garantie, l'arrêt retient que les locaux ont été libérés le 30 décembre 1997 et que les clefs ont été mises à la disposition du bailleur, lequel n'a fait aucune remarque sur l'état des lieux ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, au besoin d'office, si les clefs avaient été remises en "mains propres" au bailleur ou au représentant de celui-ci, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Euro manager's à payer à la société ITW Belgium la somme de 81 427 francs, l'arrêt rendu le 21 septembre 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;

Condamne la société ITW Belgium aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société ITW Belgium ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq novembre deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 01-17530
Date de la décision : 05/11/2003
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° BAIL COMMERCIAL - Bailleur - Responsabilité - Bailleur professionnel de l'immobilier - Bailleur non rédacteur du bail - Faute - Applications diverses - Irrégularité du congé délivré par le preneur non signalée.

1° BAIL COMMERCIAL - Bailleur - Responsabilité - Bailleur professionnel de l'immobilier - Préjudice du preneur - Evaluation - Appréciation souveraine.

1° Une cour d'appel qui relève qu'un bailleur professionnel de l'immobilier, s'est abstenu d'attirer l'attention de son locataire sur l'irrégularité du congé que ce dernier lui avait délivré par lettre recommandée alors que, si ce fait lui avait été signalé, le locataire disposait encore d'un délai de deux mois pour adresser un congé par acte extrajudiciaire, peut en déduire que le bailleur, même s'il n'est pas le rédacteur du contrat de location autorisant les congés par lettre recommandée, a commis une faute qui a causé au preneur un préjudice souverainement évalué au montant des loyers dont il s'était trouvé redevable du fait de la continuation du bail.

2° BAIL (règles générales) - Preneur - Obligations - Restitution de la chose louée en fin de bail - Remise des clefs par le preneur ou refus du bailleur de les recevoir - Nécessité.

2° BAIL (règles générales) - Preneur - Obligations - Restitution de la chose louée en fin de bail - Preuve - Charge.

2° Les juges du fond, avant de conclure que des lieux loués ont été valablement libérés, doivent rechercher, au besoin d'office, si les clefs ont été remises " en mains propres " au bailleur ou au représentant de celui-ci.


Références :

Code civil 1134

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 21 septembre 2001

A RAPPROCHER : (2°). Chambre civile 3, 1999-10-13, Bulletin 1999, III, n° 202, p. 141 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 05 nov. 2003, pourvoi n°01-17530, Bull. civ. 2003 III N° 189 p. 168
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2003 III N° 189 p. 168

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Weber.
Avocat général : Avocat général : M. Guérin.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Assié.
Avocat(s) : Avocats : Me Choucroy, la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:01.17530
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