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04/11/2003 | FRANCE | N°03-81119

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 04 novembre 2003, 03-81119


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre novembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire AGOSTINI, les observations de Me LE PRADO et de Me ODENT, et de la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Gérard, partie civile,

- la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS,

partie intervenante,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PAU, chambre correctionnelle, en date du...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre novembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire AGOSTINI, les observations de Me LE PRADO et de Me ODENT, et de la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Gérard, partie civile,

- la CAISSE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS,

partie intervenante,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PAU, chambre correctionnelle, en date du 20 janvier 2003, qui, dans la procédure suivie contre Marie-Gracieuse Y..., épouse Z..., des chefs de blessures involontaires et défaut de maîtrise, a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation proposé pour la Caisse des dépôts et consignations, pris de la violation des articles 1 et 7 de l'ordonnance du 7 janvier 1959, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Mme Z... et la MAIF à payer à Gérard X... la somme de 60 580,03 euros ;

"aux motifs que "en application des articles 1 et 7 de l'ordonnance du 7 janvier 1959 modifiée, la créance de la Caisse des dépôts et consignations doit être fixé à un capital représentatif au 1er octobre 2001 de 60 580,03 euros" (page 15, alinéa 4) ; " (...) après imputation de la créance des tiers-payeurs, la victime peut donc prétendre à une indemnité complémentaire de 28 410,23 euros" (page 17, alinéa 8) ;

"alors que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à une absence totale de motifs ; que la cour d'appel, qui, dans les motifs de sa décision, considère qu'en application des articles 1 et 7 de l'ordonnance du 7 janvier modifiée la créance de la Caisse des dépôts et consignations devait être fixée à 60 580,03 euros, se devait, dans le dispositif, de condamner le responsable de l'accident et son assureur à payer cette somme à la Caisse des dépôts et consignations et non à la victime elle-même" ;

Attendu que, dès lors qu'il se fonde sur une erreur matérielle contenue dans l'arrêt attaqué, susceptible d'être rectifiée suivant la procédure prévue aux articles 710 et 711 du Code de procédure pénale, le moyen est irrecevable ;

Sur le moyen unique de cassation proposé pour Gérard X..., pris de la violation des articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, 1382 du Code civil, 485 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, contradiction et défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a fixé à la somme de 141.187,03 euros le préjudice corporel de Gérard X..., et a fixé le préjudice complémentaire de Gérard X... à la somme de 28 410,23 euros ;

"aux motifs que le préjudice soumis à recours s'établit de la façon suivante :

1 - ITT

- indemnités journalières : 8 381,37 euros

- pertes de revenus : 2 821,46 euros

- perte de la pleine capacité physique : 5 775 euros

2 - IPP avec retentissement professionnel : 46 500 euros

3 - prestations en nature servies par l'organisme social : 11 931,97 euros

4 - frais futurs pris en charge par l'organisme social : 15 806,15 euros

5 - frais médicaux, pharmaceutiques restés à la charge de la victime : 118,38 euros

6 - frais d'aménagement du véhicule : 4 188,43 euros

7 - frais de tierce personne : 45 664,27 euros ;

TOTAL: 141 187,03 euros

que le recours des tiers payeurs s'exerce sur la somme revenant à la victime ; que devront donc être imputées sur la somme de 141 187,03 euros les sommes suivantes :

- créance de la Caisse primaire d'assurance maladie : 14 341,60 euros

- créance de la commune d'Oloron-Sainte-Marie : 17 229,01 euros

- créance de la FNMF : 20 626,16 euros

- créance de la Caisse des dépôts et consignations : 60 580,03 euros

TOTAL : 112 776,80 euros qu'après imputation de la créance des tiers payeurs, la victime peut donc prétendre à une indemnité complémentaire de 28 410,23 euros ;

"alors que, d'une part, le préjudice résultant de l'atteinte à l'intégrité physique de la victime d'un accident, qui sert de limite au remboursement des prestations versées par les tiers payeurs, doit être apprécié en tous ses éléments même s'il est en tout ou partie réparé par le service desdites prestations ; qu'ayant constaté que durant la période d'ITT, Gérard X... a perçu des salaires versés par la ville d'Oloron-Sainte-Marie, la cour d'appel, pour indemniser l'ITT subie par la victime, aurait dû tenir compte, non seulement des indemnités journalières, de la perte de revenus et de la perte de la capacité physique, mais encore du montant des salaires versés par la ville d'Oloron-Sainte-Marie ; qu'en s'abstenant de procéder ainsi, et ce alors même qu'elle a déduit du montant du préjudice soumis à recours, tel que fixé par elle, les salaires versés par la commune pour un montant de 17 229,01 euros, la cour d'appel n'a pas apprécié le préjudice résultant de l'atteinte à l'intégrité physique de Gérard X... en tous ses éléments et a, en conséquence, violé les articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985 ;

"alors que, d'autre part, la réparation du préjudice subi par une victime doit être intégrale, celle-ci ne devant subir aucune perte ; qu'en évaluant à la somme de 141 187,03 euros le préjudice subi par Gérard X... au titre de l'ITT sans avoir pris en considération les salaires versés par la commune d'Oloron-Sainte-Marie durant cette période (17 229,01 euros) la cour d'appel en allouant à la victime, au titre du préjudice complémentaire, une somme inférieure à celle à laquelle elle pouvait prétendre, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

"alors que, de troisième part, les décisions judiciaires doivent être motivées et que la contradiction de motifs équivaut à leur absence; qu'ayant constaté que Gérard X... a subi une ITT du jour de l'accident au 7 septembre 1998, date de la consolidation et que pendant l'ITT, il a perçu au titre des indemnités journalières la somme de 8 381,37 euros, la cour d'appel a entaché son arrêt de contradiction en affirmant ensuite que la créance de la FNMF au titre des indemnités journalières complémentaires versées à la victime est justifiée à hauteur de 20 626,16 euros ;

"alors que, de quatrième part, les décisions judiciaires doivent être motivées et que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motif ; que, dans ses conclusions d'appel, Gérard X... faisait valoir que le recours de la FNMF ne pouvait porter que sur les indemnités journalières versées entre le 22 avril 1997 et le 7 septembre 1998 pour un montant de 8 381,37 euros et que le décompte fourni par cet organisme devait être totalement "revu" dès lors qu'il comptabilisait des prestations postérieures à cette date ; qu'en s'abstenant de répondre à Gérard X... de ce chef, la cour d'appel a entaché son arrêt de défaut de motif ;

"alors que, de cinquième part, le recours subrogatoire des tiers payeurs prévu à l'article 29 de la loi du 5 juillet 1985 ne peut avoir pour objet que les prestations consécutives à l'accident ;

qu'ayant constaté que Gérard X... a subi une ITT du jour de l'accident au 7 septembre 1998, date de la consolidation et que la FNMF est en droit d'obtenir le remboursement des indemnités journalières de maladie versées à la victime qui sont en relation directe avec l'accident, la Cour de Pau aurait dû juger que la créance de cet organisme au titre des indemnités journalières n'était justifiée que pour la période allant du jour de l'accident au 7 septembre 1998, date de la consolidation, soit pour un montant de 8 381,37 euros ;

qu'en jugeant que la créance de la FNMF, au titre des indemnités journalières complémentaires versées à la victime, était justifiée à hauteur de 20 626,16 euros, bien qu'il résulte du décompte fourni par la FNMF que la somme de 20 626,16 euros correspond pour un montant de 12 452,69 euros aux indemnités journalières versées à la victime du 27 juillet 1997 au 21 avril 2000 et à la rente d'invalidité pour un montant de 8 173,46 euros, la cour d'appel a violé les articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985 ;

"et alors que, enfin, en déduisant du préjudice soumis à recours de la victime, la créance de la FNMF pour un montant de 20 626,16 euros, alors que les indemnités journalières de maladie versées à la victime qui sont en relation directe avec l'accident ne s'élevaient qu'à la somme de 8 381,37 euros, la cour d'appel a alloué à la victime, au titre du préjudice complémentaire, une somme inférieure à celle qu'elle pouvait prétendre et violé, en conséquence, l'article 1382 du code civil" ;

Vu les articles 1382 du Code civil, 1er et suivants de l'ordonnance du 7 janvier 1959, 29 de la loi du 5 juillet 1985 et 593 du Code de procédure pénale ;

Attendu qu'en cas de recours contre le responsable d'un accident, l'indemnité compensant l'atteinte à l'intégrité physique de la victime, qui sert de limite au remboursement des prestations versées par les tiers payeurs, doit être fixée en fonction de l'intégralité des dépenses provoquées et des pertes subies du fait de l'accident, alors même que le préjudice correspondant a été, en tout ou partie, réparé par le service des prestations;

Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu'appelée à se prononcer sur la réparation du préjudice corporel subi par Gérard X..., agent communal, blessé au cours d'un accident de la circulation dont Marie-Gracieuse Z... a été déclarée entièrement responsable, la cour d'appel, après avoir évalué à 17 229, 01 euros et 8 381, 37 euros les sommes versées à la victime, pendant la période d'incapacité totale de travail, respectivement par la commune employeur, au titre du maintien du traitement, et par la fédération nationale de la mutualité française (FNMF), au titre des indemnités journalières complémentaires, ne prend en compte que la seconde de ces sommes dans l'évaluation de l'assiette du préjudice soumis au recours des tiers payeurs ; que, pour déterminer le montant de l'indemnité complémentaire revenant à la victime, les juges déduisent du préjudice précédemment évalué, notamment, les créances de la commune et celle de la FNMF pour un montant respectif de 11 229, 01 euros et 20 626, 16 euros ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi, et alors que le montant de la totalité des revenus versés à la victime au cours de la période d'incapacité totale de travail devait être inclus dans le calcul de l'indemnité réparant l'atteinte à l'intégrité physique et servant d'assiette au recours des tiers payeurs, et au surplus sans répondre aux conclusions de la partie civile et de son assureur qui demandaient que le recours de la FNMF soit limité au montant des indemnités journalières versées pendant la période d'incapacité, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ces chefs ;

Par ces motifs,

CASSE et ANNULE l'arrêt précité de la cour d'appel de PAU, en date du 20 janvier 2003, en ses seules dispositions ayant prononcé sur l'évaluation du préjudice soumis à recours des tiers payeurs et sur le recours de la commune d'Oloron-Sainte-Marie et de la fédération nationale de la mutualité française, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Toulouse, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Pau et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Agostini conseiller rapporteur, M. Farge conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 03-81119
Date de la décision : 04/11/2003
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, chambre correctionnelle, 20 janvier 2003


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 04 nov. 2003, pourvoi n°03-81119


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:03.81119
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