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29/10/2003 | FRANCE | N°02-11387

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 29 octobre 2003, 02-11387


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen du pourvoi principal :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis, 12 octobre 2001), que l'association Shia Ithna Asheri Jamate ayant fait procéder à des travaux d'extension d'une mosquée, a assigné la société Prudence créole, assureur dommages-ouvrage, en paiement de sommes destinées à réparer son préjudice consécutif à l'apparition de désordres, la procédure prévue à l'annexe II de l'article A 243-1 du Code des assurances n'ayant p

as abouti dans les délais impartis ;

Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt de ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen du pourvoi principal :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis, 12 octobre 2001), que l'association Shia Ithna Asheri Jamate ayant fait procéder à des travaux d'extension d'une mosquée, a assigné la société Prudence créole, assureur dommages-ouvrage, en paiement de sommes destinées à réparer son préjudice consécutif à l'apparition de désordres, la procédure prévue à l'annexe II de l'article A 243-1 du Code des assurances n'ayant pas abouti dans les délais impartis ;

Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt de rejeter l'exception de nullité de la police d'assurance et de le condamner à payer diverses sommes à son assurée, alors, selon le moyen :

1 / que la société Prudence créole avait soulevé la nullité de la police dommages-ouvrage en faisant valoir que l'association maître de l'ouvrage ne l'avait pas informée du changement du risque tenant à ce que l'entreprise Bart n'effectuerait que la seconde tranche des travaux pour le prix initial prévu pour les deux tranches que les travaux seraient totalement modifiés et qu'elle les dirigerait elle-même ; que dès lors en lui opposant, pour écarter la nullité de ce chef, les articles 10-32 à 10-41 des conditions générales du contrat d'assurance, qui énoncent seulement les sanctions à l'obligation pour le souscripteur de déclarer à l'assureur, dans le mois des comptes définitifs, le coût total de construction définitif, au lieu d'examiner, comme elle y était invitée, s'il n'y avait pas eu aggravation du risque non déclarée en cours de contrat, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard des articles L. 113-2 et L. 113-8 du Code des assurances ;

2 / que, pour faire jouer la garantie de l'assureur dommages-ouvrage à titre de sanction du non-respect du délai de soixante jours pour répondre à la déclaration de sinistre, l'assuré doit notifier à l'assureur son intention d'engager les dépenses nécessaires à la réparation des dommages ; que dès lors en affirmant, pour décider que le retard de la société Prudence créole à répondre dans les soixante jours à la déclaration de sinistre lui interdisant de contester sa garantie, que la notification à l'assureur n'était nécessaire que lorsque l'assuré choisit d'engager les dépenses nécessaires à la réparation, la cour d'appel, qui a relevé que, par contrat du 22 avril 1997, l'association Shia Ithna Asheri Jamate avait confié à M. X... notamment les travaux de consolidation de l'ouvrage existant et, par motifs adoptés, que l'expert judiciaire avait constaté l'exécution d'une partie des travaux de reprise par M. X... pour une somme de 517 580 francs, n'a pas tiré de ses constatations, d'où ressort qu'en l'espèce, l'association assurée, avait précisément engagé les dépenses de réparation, les conséquences légales qui s'imposaient et violé l'article L. 242-1 du Code des assurances ;

3 / que l'assurance dommages-ouvrage prend effet après l'expiration du délai de parfait achèvement de l'article 1792-6 du Code civil et ne garantit le paiement des travaux nécessaires, après réception que si après mise en demeure restée infructueuse l'entrepreneur n'a pas exécuté ses obligations, avant réception que dans le cas où après mise en demeure restée infructueuse, le contrat conclu avec l'entrepreneur est résilié pour inexécution de ses obligations ; que dès lors, en affirmant, pour condamner la société Prudence créole à garantir l'association Shia Ithna Asheri Jamate du paiement de tous les travaux de réparation des désordres affectant son ouvrage y compris ceux non mentionnés dans sa déclaration de sinistre, que s'agissant de la mise en oeuvre de l'assurance dommages-ouvrage l'existence ou non d'une réception de travaux par le maître de l'ouvrage était sans incidence sur la solution du litige, la cour d'appel a de nouveau violé l'article L. 242-1 du Code des assurances ;

Mais attendu, d'une part, que la société Prudence créole n'ayant pas soutenu que l'association Shia Ithna Asheri Jamate ne lui avait pas notifié son intention d'engager les dépenses nécessaires à la réparation du dommage, le moyen tiré de l'article L. 242-1 du Code des assurances est nouveau, mélangé de fait et de droit ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant retenu par motifs propres que la sous estimation par le maître de l'ouvrage du montant des travaux de construction, à supposer qu'elle soit démontrée, n'avait pas pour effet de changer l'objet du risque, et n'était pas de nature à entraîner la nullité du contrat et constaté, par motifs adoptés, que la réception tacite était intervenue lors de l'inauguration des lieux au mois de novembre 1994, que la déclaration de sinistre avait été reçue par l'assureur le 28 novembre 1996 et que la réponse n'avait été notifiée que le 28 janvier 1997, soit plus de 60 jours plus tard, la cour d'appel, abstraction faite d'un motif erroné mais surabondant, a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que, pour partie irrecevable, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ;

Mais sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi principal, réunis :

Vu l'article L. 242-1 du Code des assurances ;

Attendu que, pour condamner la société d'assurances Prudence créole à payer à l'association Shia Ithna Asheri Jamate la somme de 1 404 420,46 francs en principal, assortie des intérêts au taux double de l'intérêt légal sur la somme de 648 620 francs à compter du 27 janvier 1997 et au taux légal pour le surplus à compter du jugement, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que l'expert judiciaire a évalué à la somme de 1 017 580,16 francs les travaux de reprise comprenant des travaux déjà réalisés pour un montant de 517 580,16 francs dans lequel sont inclus les frais de montage et mise en place de tourelles métalliques à hauteur de la somme de 131 040 francs et qu'après soustraction de cette dernière somme faisant double emploi puisque également prévue dans l'évaluation des travaux demeurant à réaliser, il retient la différence, soit la somme de 386 840 francs qui s'ajoute à l'évaluation globale donnée par l'expert ;

Qu'en statuant ainsi, alors que dans l'évaluation du coût total des travaux de remise en état telle que chiffrée par l'expert, figure la somme de 386 840 francs, elle-même englobée dans celle de 517 580,16 francs représentant les travaux de réfection déjà réalisés, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations ;

Et sur le moyen unique du pourvoi incident :

Vu l'article 1793 du Code civil ;

Attendu que pour condamner l'association Shia Ithna Asheri Jamate à payer à M. X... la somme de 500 000 francs, l'arrêt retient qu'elle a confié à cet entrepreneur des travaux aux termes d'un marché à forfait, que les travaux ont été arrêtés en cours de chantier, leur reprise étant subordonnée au renforcement préalable des ouvrages porteurs existants, que l'entrepreneur s'est retiré du chantier mais a laissé sur les lieux une grue et divers matériels, que, même si l'exécution de ces travaux n'était pas prévue dans le marché, elle a été rendue nécessaire par l'obligation de maintenir les ouvrages existants afin d'éviter leur effondrement, que, toutefois, les sommes réclamées par l'entrepreneur sont exagérées et tendent à imposer au maître de l'ouvrage des pénalités de retard exclues du marché liant les parties et qu'il convient de limiter le dédommagement dû à M. X... ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si ces prestations ne relevaient pas de travaux supplémentaires pour la réalisation desquels l'autorisation par écrit est requise et le prix convenu avec le propriétaire, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Prudence créole à payer à l'association Shia Ithna Asheri Jamate la somme de 1 404 420,46 francs en principal avec intérêts au taux double de l'intérêt légal sur la somme de 648 620 francs à compter du 27 janvier 1997 et au taux légal pour le surplus à compter du jugement, et condamné l'association Shia Ithna Asheri Jamate à payer à M. X... la somme de 500 000 francs assortie des intérêts légaux à compter du 7 février 2000, l'arrêt rendu le 12 octobre 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis, autrement composée ;

Condamne la société Prudence créole aux dépens des pourvois ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de l'association Shia Ithna Asheri Jamate ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf octobre deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 02-11387
Date de la décision : 29/10/2003
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

(Sur le pourvoi incident) CONTRAT D'ENTREPRISE - Forfait - Travaux supplémentaires - Travaux non prévus dans le marché mais nécessaires pour éviter l'effondrement de l'ouvrage - Prestations relevant de travaux supplémentaires pour lesquels un ordre écrit est nécessaire.


Références :

Code civil 1793

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis la Réunion (chambre civile), 12 octobre 2001


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 29 oct. 2003, pourvoi n°02-11387


Composition du Tribunal
Président : Président : M. WEBER

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.11387
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