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28/10/2003 | FRANCE | N°02-88366

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 28 octobre 2003, 02-88366


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-huit octobre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire VALAT, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DAVENAS ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Rémi, LA SOCIETE BOUYGUES BATIMENT, civilement responsable ;

contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 9ème

chambre, en date du 28 novembre 2002, qui, pour blessures involontaires ayant entraîné un...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-huit octobre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire VALAT, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DAVENAS ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Rémi, LA SOCIETE BOUYGUES BATIMENT, civilement responsable ;

contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 9ème chambre, en date du 28 novembre 2002, qui, pour blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à 3 mois, a condamné le premier à 1 000 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-3, 222-19, alinéa 1er, du Code pénal, 170 du décret du 8 janvier 1965, 485, 591, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Rémi X... coupable de blessures involontaires et a déclaré la société Bouygues civilement responsable ;

"aux motifs, propres ou repris des premiers juges, que Rémi X..., est prévenu étant responsable d'un établissement ou par délégation du chef d'entreprise d'un chantier soumis aux dispositions du Code du travail relatives à l'hygiène et à la sécurité (Livre II Titre III, chapitre I, II, III) ainsi qu'à celles du décret du 8 janvier 1965 prévoyant des mesures particulières de protection et de salubrité du personnel exécutant des travaux du bâtiment, des travaux publics et tous autres travaux concernant les immeubles, d'avoir enfreint par sa faute personnelle les dispositions susvisées notamment en laissant travailler trois salariés, Didier Y..., Carlos Z..., Manuel A..., près d'un mur-plaque en béton (ITS) insuffisamment stabilisé, un seul étai ayant été posé, ce contrairement aux directives du plan particulier de sécurité et de protection de la santé qui avait exigé la pose de 2 étais tirant- poussant, étais qui auraient dû être scellés au sol, et par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou les règlements, en l'espèce, inobservation des règles de sécurité fixées, notamment, nombre d'étais insuffisants pour assurer la stabilité d'un mur en béton prés duquel travaillait Carlos Illidio Z..., d'avoir involontairement causé une atteinte à l'intégrité de sa personne, en l'espèce des blessures entraînant une incapacité totale de travail personnel supérieure à trois mois, en l'espèce 4 mois ; que l'installation de voiles préfabriqués, bien que de technique courante, impose une méthodologie précise ; que Rémi X... a établi le plan particulier de sécurité et de protection de la

santé (PPSPS) adapté au chantier ; que le matériel de protection et de sécurité se trouvait en place en quantité suffisante, que le personnel, pris individuellement, avait la compétence pour accomplir les tâches professionnelles qui lui incombaient ; mais qu'il appartenait à Rémi X... de s'assurer que les équipes qu'il avait sous ses ordres appliquaient les consignes qu'il avait lui-même rappelées dans le PPSPS, sous la forme d'icônes, en particulier celles visées à l'article 170 du décret du 8 janvier 1965 relative à la stabilité des ouvrages préfabriqués lourds ; qu'au-delà de la volonté de se conformer à la loi qui exige l'établissement d'un tel PPSPS, le prévenu qui connaissait parfaitement les risques encourus par le personnel d'exécution au cours de la manipulation des voiles préfabriqués retenant des ouvrages lourds (mur de 1,3 tonne), devait personnellement contrôler, sinon s'assurer que les échelons intermédiaires compétents qu'il prétend avoir mis en place, étaient à même de le suppléer dans cette tâche de surveillance ; qu'en l'espèce, en ne s'assurant pas que la zone réservée à la mise en place des éléments de soutien, exigés impérativement par le règlement de sécurité précité, était désencombrée avant que le mode opératoire de stabilisation soit mis en oeuvre, Rémi X... a commis une faute caractérisée qui a exposé Carlos Z... à un risque d'une particulière gravité qu'il n'ignorait pas ; que cette faute personnelle de surveillance et de coordination est d'ailleurs à l'origine de l'accident dont cet ouvrier a été victime ;

"1 ) alors qu'accomplit les diligences normales lui incombant compte tenu de ses fonctions, de sa compétence ainsi que du pouvoir et du moyen dont il dispose, le conducteur de travaux d'une entreprise de construction, délégataire du chef d'entreprise pour les questions de sécurité qui, alors que l'installation de voiles préfabriqués est une tâche courante et que si l'article 170 du décret du 8 janvier 1965 prescrit que l'enlèvement d'éléments préfabriqués et lourds ne peut être effectué que sous le contrôle personnel du chef de chantier, il ne comporte pas une telle obligation en ce qui concerne leur mise en place :

1) établit un plan particulier de sécurité et de protection de la santé (PPSPS) adapté au chantier impliquant nécessairement le respect du désencombrement de la zone réservée préalablement à la mise en place des éléments de soutien ;

2) met en place en quantité suffisante le matériel de protection et de sécurité ;

3) confie le travail de mise en place des éléments préfabriqués à du personnel dont la qualification, le savoir-faire et l'ancienneté lui permettent sans difficulté de respecter le mode opératoire décrit dans le PPSPS ;

et que la cour d'appel, qui constatait que ces trois conditions étaient remplies, ne pouvait, sans se contredire et méconnaître le sens et la portée des dispositions de l'article 121-3 du Code pénal et de l'article 170 du décret susvisé, affirmer que Rémi X... avait commis une faute caractérisée en ne s'assurant pas du désencombrement de la zone réservée préalablement à la mise en place des éléments de soutien, tâche simple qui relevait de la compétence ordinaire du personnel qualifié chargé de la mise en place des éléments préfabriqués ;

"2 ) alors, en tout état de cause, qu'il appartenait à la cour d'appel de rechercher elle-même si les échelons intermédiaires que Rémi X... avait mis en place étaient à même de le suppléer dans la tâche de surveillance qui était la sienne et qu'en ne procédant pas à cette recherche dont elle reconnaissait la nécessité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale" ;

Attendu que, pour déclarer Rémi X... coupable de blessures involontaires, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que le prévenu, qui a contribué à créer la situation ayant permis la réalisation du dommage et n'a pas pris les mesures permettant de l'éviter, a commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer, au sens de l'article 121-3, alinéa 4, du Code pénal, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Valat conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-88366
Date de la décision : 28/10/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

HOMICIDE ET BLESSURES INVOLONTAIRES - Faute - Faute caractérisée - Conducteur de travaux délégataire du chef d'entreprise pour les questions de sécurité - Défaut de mise en place des mesures de nature à éviter la réalisation du dommage.


Références :

Code pénal 121-3, 222-19
Décret du 08 janvier 1965 art. 170

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 9ème chambre, 28 novembre 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 28 oct. 2003, pourvoi n°02-88366


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.88366
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