AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le huit octobre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller ROGER, les observations de Me CHOUCROY, de Me COSSA, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Simone, épouse Y..., partie civile,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de COLMAR, en date du 28 novembre 2002, qui, dans l'information suivie contre personne non dénommée du chef de faux en écriture publique ou authentique commis par une personne dépositaire de l'autorité publique, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 441-1 et 441-4 du Code pénal, 7 et 8, 575, alinéa 2, 3 , 5 et 6 , 85, 86 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré n'y avoir lieu à suivre sur les poursuites exercées pour faux dans une écriture authentique à la suite de la plainte avec constitution de partie civile déposée par Simone X... ;
"aux motifs propres à la Cour que, comme l'a observé la police judiciaire en conclusion de son rapport, des manoeuvres frauduleuses pourraient éventuellement être relevées dans la présente procédure, à l'encontre de personnes ayant persuadé Simone X... de l'existence d'une licence imaginaire ; mais que ces faits délictuels qui remontent à décembre 1994 étaient prescrits malgré l'enquête de police diligentée courant 1995 par la Sûreté Urbaine à la suite d'une première plainte de Simone X..., lorsque celle-ci s'est constitué partie civile du chef du crime de faux en écritures publiques commis par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public qu'elle impute au notaire ; qu'il résulte du rapport d'appel du parquet de Strasbourg que "Me Z... se trouve actuellement sous curatelle en raison d'un déficit important de son étude" ; que le témoin assisté Bertrand Z... a déclaré au juge d'instruction qu'il n'avait "peut-être pas été attentif" ; qu'il est surprenant que ce praticien n'ait pas eu son attention attirée par le séquestre dans l'acte de cession précédant celui qu'il dressait d'une somme de 100 000 francs représentant le prix de la licence IV (lequel prix passait instantanément à 150 000 francs en dépit des termes du compromis) ; que cependant, contrairement à ce que fait plaider la partie civile, il ne suffit pas que des fautes professionnelles soient commises en connaissance de ce qu'il s'agit d'irrégularités, même graves, pour qu'elles se muent en infractions pénalement punissables, car elles peuvent n'être que la conséquence
d'une lourde négligence ; qu'il n'existe pas en l'espèce de charges suffisantes de ce que le témoin assisté Bertrand Z... ait eu personnellement connaissance de l'inexistence de la licence IV pour justifier une mise en examen qui déboucherait sur un renvoi devant la juridiction de jugement ;
"et aux motifs adoptés du premier juge que Me Z... n'a pas vérifié l'existence d'inscriptions qui pourtant existaient ; qu'à cela on peut ajouter que ces inscriptions existaient du chef de la SARL Le Séoul elles ne concernaient pas la SARL Azerty pour la vente à la SARL La France et de fait il appartenait à Me Jung de désintéresser les créanciers, avec les sommes perçues lors de la transaction Le Séoul - Azerty ; que Me Z... ne pouvait pas juridiquement affecter le prix de vente du fonds de commerce au remboursement de privilèges ou nantissements résultant d'un précédent propriétaire ; que sur ce point, Simone X... reconnaît que si elle a été poursuivie par des huissiers, elle n'a jamais rien réglé, ce qui est confirmé par Me Jung, laquelle déclare avoir fait le nécessaire pour la levée des hypothèques peut-être avec retard ;
"alors que, d'une part, la chambre de l'instruction, qui a formellement constaté qu'une enquête de police avait été diligentée courant 1995 à la suite d'une plainte déjà déposée par la partie civile pour le crime de faux en écriture authentique ayant nécessairement interrompu le cours de la prescription, a privé sa décision de motifs et violé les articles 7 et 8 du Code de procédure pénale en invoquant, sans autre explication, la prescription des faits commis en décembre 1994 à la suite de la seconde plainte identique à la première déposée en 1999 ;
"alors que, d'autre part, après avoir relevé la mise sous curatelle du témoin assisté en raison du déficit important de son étude de notaire et avoir souligné le caractère surprenant de son comportement ayant consisté à affirmer faussement l'existence d'une licence IV attachée au fonds de commerce dont il avait établi l'acte authentique de vente, la chambre de l'instruction s'est mise en contradiction avec elle-même et a entaché sa décision d'un défaut de motifs en violation de l'article 575, alinéa 2, 6 , du Code de procédure pénale en refusant de reconnaître l'existence du crime de faux commis par ce témoin assisté ;
"et qu'enfin le magistrat instructeur ayant formellement constaté que le témoin assisté avait faussement attesté dans l'acte authentique de vente qu'il avait établi, l'absence d'inscriptions qui pourtant existaient sur le fonds de commerce vendu et que la partie civile avait, en conséquence de ces inscriptions, été poursuivie par des huissiers avant que les bénéficiaires de ces inscriptions ne soient finalement désintéressés, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision de non-lieu en se contentant d'adopter les motifs de l'ordonnance ayant prononcé un non-lieu sur ce chef de poursuites, le crime de faux en écriture authentique résultant, aux termes de l'article 441-1 du Code pénal, de toute altération frauduleuse de la vérité susceptible de causer un préjudice qui s'est manifestement réalisé en l'espèce du fait des poursuites des huissiers" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué et de l'ordonnance de non-lieu qu'il confirme mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la chambre de l'instruction, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés dans la plainte et répondu aux articulations essentielles du mémoire produit par la partie civile appelante, a exposé les motifs pour lesquels elle a estimé qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis le crime reproché ;
Que la demanderesse se borne à critiquer ces motifs, dont certains, surabondants, sans justifier d'aucun des griefs que l'article 575 du Code de procédure pénale autorise la partie civile à formuler à l'appui de son pourvoi contre un arrêt de chambre de l'instruction en l'absence de recours du ministère public ;
Que dès lors, le moyen est irrecevable, et qu'il en est de même du pourvoi, par application du texte précité ;
Par ces motifs,
DECLARE le pourvoi IRRECEVABLE ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Roger conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;