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08/10/2003 | FRANCE | N°02-10708

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 08 octobre 2003, 02-10708


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 12 novembre 2001), rendu en matière de référé, que la résidence Le Port Neuf est atteinte de désordres consistant en taches de rouille, fissurations, éclatements du béton, auxquels un ravalement réalisé en 1983 n'a pu mettre fin ; qu'avant d'entreprendre des travaux importants destinés à y remédier, le syndicat des copropriétaires a fait établir un diagnostic par le bureau Contrôle et prévention (CEP), aux droits duqu

el se trouve le Bureau Véritas ; que les travaux ont été confiés à la société S...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 12 novembre 2001), rendu en matière de référé, que la résidence Le Port Neuf est atteinte de désordres consistant en taches de rouille, fissurations, éclatements du béton, auxquels un ravalement réalisé en 1983 n'a pu mettre fin ; qu'avant d'entreprendre des travaux importants destinés à y remédier, le syndicat des copropriétaires a fait établir un diagnostic par le bureau Contrôle et prévention (CEP), aux droits duquel se trouve le Bureau Véritas ; que les travaux ont été confiés à la société Serba, une assurance dommages-ouvrage ayant été souscrite auprès de la société ICS Assurances ; que les désordres étant réapparus, le syndicat des copropriétaires a, après expertise, assigné aux fins de provision l'assureur dommages-ouvrage et la société CEP ;

Sur le premier et le deuxième moyens, réunis :

Attendu que le syndicat des copropriétaires fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de provision formée contre la société CEP, alors, selon le moyen :

1 / qu'il résulte des articles 1792 et 1792-1 du Code civil qu'est réputé constructeur de l'ouvrage tout architecte, entrepreneur, technicien ou autre personne liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage ainsi que toute personne qui accomplit une mission assimilable à celle d'un locateur d'ouvrage et que tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit envers le maître de l'ouvrage des dommages qui compromettent la solidité de l'immeuble ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination ; qu'il ressort des propres constatations des juges du fond à la fois que la mission de la société Contrôle et prévention (CEP) devenue Bureau Véritas était d'"aider à définir, par une approche indépendante des intervenants antérieurs, les processus de traitements curatifs et préventifs des désordres diagnostiqués lors des visites détaillées" et qu'au vu des conclusions de l'expert judiciaire, il est démontré

qu'avec l'armature de béton se trouve atteinte la structure même de l'ouvrage et ainsi sérieusement compromise sa solidité ; qu'il en ressort que la société CEP Bureau Véritas était soumise à une obligation de conseil pour ce qui relevait des désordres en cause, qu'elle avait donc la qualité de constructeur et que les désordres compromettaient la solidité de l'immeuble ; qu'en refusant néanmoins de retenir la responsabilité de plein droit de la société CEP Bureau Véritas, la cour d'appel a violé par refus d'application l'article 1792 du Code civil ;

2 / qu'il résulte de l'article 1792 du Code civil que la responsabilité de plein droit du constructeur d'un ouvrage envers le maître de l'ouvrage n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère ; que le fait que le type de désordre et les moyens d'y remédier ne soient pas encore connus à l'époque de l'intervention du constructeur ne constitue pas une cause étrangère exonératoire de responsabilité ; qu'en exonérant néanmoins la société CEP Bureau Véritas de sa responsabilité de plein droit au motif inopérant qu'il ne peut être déclaré responsable d'un défaut de préconisation d'une méthode alors inconnue, la cour d'appel a violé de ce nouveau chef l'article 1792 du Code civil ;

3 / qu'il résulte en tout état de cause de l'article L.111-24 du Code de la construction et de l'habitation que le contrôleur technique est soumis, dans les limites de la mission à lui confiée par le maître de l'ouvrage, à la présomption de responsabilité édictée par les articles 1792 et suivants du Code civil ; que sa responsabilité ne peut être écartée que s'il a adressé au maître de l'ouvrage des mises en garde dont celui-ci n'a pas tenu compte ; qu'en exonérant la société CEP Bureau Véritas de sa responsabilité de plein droit sans constater qu'il avait mis en garde le syndicat de la copropriété, la cour d'appel a violé l'article L. 111-24 du Code de la construction et de l'habitation ;

4 / qu'il résulte de l'article 1315 du Code civil que nul ne peut se constituer de preuve à lui-même ; qu'en se déterminant sur les seules affirmations du Bureau Véritas dans ses conclusions d'appel et récapitulatives pour retenir que le défaut d'imperméabilisation et la suspicion de sable de mer dans le béton n'avaient pas été portés à sa connaissance, ce que le syndicat de la copropriété Port Neuf contestait, la cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;

5 / qu'il résulte de l'article 1792 du Code civil que pour que soit retenue la responsabilité même partielle du maître de l'ouvrage à l'occasion de désordres, il faut qu'il ait été notoirement compétent en matière de construction et que soit caractérisée son immixtion fautive ;

qu'en retenant la responsabilité du syndicat des copropriétaires, incompétent en matière de construction, sans constater la moindre immixtion fautive de celui-ci dans l'opération litigieuse, la cour d'appel a violé l'article 1792 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant exactement retenu, par motifs propres et adoptés, que la présomption de responsabilité encourue par le contrôleur technique sur le fondement de l'article 1792 du Code civil ne jouait que dans la limite de la mission confiée et que le juge des référés ne pouvait fonder ses décisions que sur des obligations échappant à toute contestation sérieuse et relevé que la société CEP n'avait pas reçu une mission de maîtrise d'oeuvre complète, mais une mission dénommée aide à la gestion immobilière rationalisée comportant une première phase de diagnostic et une seconde phase d'assistance au lancement de l'appel d'offres et de contrôle par sondages de la conformité des travaux, que cette société n'avait pas été informée du défaut d'imperméabilisation et de la suspicion de présence de sable de mer dans le béton, révélés lors d'une précédente expertise, qu'à l'époque de l'intervention du CEP, ce type de désordres et les moyens d'y remédier étaient mal connus, et que la première phase de sa mission n'imposait pas au CEP de faire procéder par un organisme spécialisé à des sondages destructifs, seuls susceptibles de révéler l'étendue et la profondeur d'une corrosion, la cour d'appel, qui a pu en déduire, sans inverser la charge de la preuve, que l'obligation de la société CEP était sérieusement contestable, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que le syndicat des copropriétaires fait grief à l'arrêt, rendu en matière de référé, de déclarer irrecevable sa demande de renvoi de l'affaire devant les juges du fond, alors, selon le moyen :

1 / qu'en se fondant sur le fait que le syndicat de la copropriété Port Neuf s'était vu refuser par l'ordonnance entreprise la faculté de faire renvoyer l'affaire directement à une audience pour qu'il soit statué au fond, alors que l'ordonnance entreprise n'avait pas statué sur cette demande, la cour d'appel a dénaturé l'ordonnance entreprise en violation de l'article 1134 du Code civil ;

2 / qu'il résulte des dispositions combinées des articles 811 nouveau et 917 du nouveau Code de procédure civile que la cour d'appel, statuant en référé, dispose incontestablement des pouvoirs dévolus par le nouvel article 811 du nouveau Code de procédure civile précité à la juridiction des référés de renvoyer l'affaire directement à une audience pour qu'il soit statué au fond ; qu'en considérant néanmoins que le syndicat de copropriété Port Neuf ne pouvait demander au juge d'appel statuant en référé de saisir directement le juge du premier degré, la cour d'appel a violé par refus d'application l'article 811 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant retenu à bon droit qu'une partie ne pouvait demander au juge d'appel, sur le fondement de l'article 811 du nouveau Code de procédure civile, de saisir directement le juge du premier degré, la cour d'appel, par ce seul motif, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne le syndicat des copropriétaires Port Neuf aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne le syndicat des copropriétaires Port Neuf à payer à la société Bureau Véritas la somme de 1 900 euros, au groupement d'intérêt économique G 20 la somme de 1 900 euros et à la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics la somme de 300 euros ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande du syndicat des copropriétaires Port Neuf ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit octobre deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 02-10708
Date de la décision : 08/10/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

REFERE - Procédure - Demande de renvoi au fond à jour fixe - Appel - Pouvoirs des juges - Renvoi devant le juge du premier degré (non).

PROCEDURE CIVILE - Procédure à jour fixe - Demande formée devant le juge des référés - Appel - Pouvoirs des juges - Renvoi devant le juge du premier degré (non)

Une partie ne peut demander au juge d'appel, sur le fondement de l'article 811 du nouveau Code de procédure civile, de saisir directement le juge du premier degré.


Références :

Nouveau Code de procédure civile 811
Code civil 1792

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 12 novembre 2001


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 08 oct. 2003, pourvoi n°02-10708, Bull. civ. 2003 III N° 175 p. 154
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2003 III N° 175 p. 154

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Weber.
Avocat général : Avocat général : M. Cédras.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Fossaert-Sabatier.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Vier et Barthélemy, la SCP Piwnica et Molinié, Me Odent, la SCP Masse-Dessen et Thouvenin.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.10708
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