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10/09/2003 | FRANCE | N°02-86510

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 septembre 2003, 02-86510


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix septembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller ROGNON, les observations de la société civile professionnelle de CHAISEMARTIN et COURJON, et de Me FOUSSARD, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Jean-Claude,

contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 25 j

uin 2002, qui, pour fraude fiscale et omission d'écritures en comptabilité, l'a condamné à ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix septembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller ROGNON, les observations de la société civile professionnelle de CHAISEMARTIN et COURJON, et de Me FOUSSARD, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Jean-Claude,

contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 25 juin 2002, qui, pour fraude fiscale et omission d'écritures en comptabilité, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis, 7 500 euros d'amende, a ordonné la publication et l'affichage de la décision et a prononcé sur les demandes de l'administration des Impôts, partie civile ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1741 et 1743 du Code général des impôts, 588, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a décidé que les infractions prévues aux articles 1741 et 1743 du Code général des impôts, reprochées au demandeur, étaient établies, l'a condamné par conséquent à une peine de 6 mois d'emprisonne ment avec sursis et à une amende de 7 500 euros et sur l'action civile de l'Administration fiscale, l'a déclaré solidairement tenu avec la société Copacabana Loisirs Investissements au paiement des impôts fraudés et pénalités y afférentes ;

"aux motifs que le tribunal correctionnel qui a relaxé Jean-Claude X... de la poursuite basée sur l'article 1741 du Code général des impôts, n'a pas statué sur le délit de l'article 1743 du même Code dont il était pourtant saisi ; que cette infraction est constante et non sérieusement discutée par Jean-Claude X... dès lors que les services fiscaux ont relevé l'absence des journaux auxiliaires de caisse, de banque, achat et opérations diverses pour la période du 1er octobre 1992 au 31 mai 1993 (période non visée à la prévention) et du 1er octobre 1995 au 30 avril 1996 ; que l'absence de ces journaux auxiliaires rend irrégulière la comptabilité reprise au grand livre et au livre journal ; que la répétition de ces absences, à chaque fois à cheval sur un exercice, jointe à la non sincérité du livre d'inventaire, établit l'intention frauduleuse de Jean-Claude X... ; qu'il y a lieu de rappeler les irrégularités relevées par l'Administration des Impôts ;

en matière de stocks :

- le stock au 30 septembre 1992 est inexact car incomplet en raison de la présence de produits non valorisés ainsi que de l'omission de divers produits acquis en mars 1991 du précédent exploitant ;

- absence d'inventaire physique au 30 septembre 1993, le stock ayant été arrêté à partir de celui existant au 30 septembre 1992 par application d'un coefficient d'augmentation de prix de 5 % ;

- les stocks arrêtés au 30 septembre 1992, 1993, 1994 et 1995 sont incomplets, aucun d'entre eux ne faisant état des produits afférents aux activités restaurant, snack-buvette et boissons non alcoolisées servies à la discothèque ;

en matière de recettes :

- absence de comptabilisation des recettes snack pour l'exercice clos le 30 septembre 1995 ;

- le pointage des tickets de caisse joints aux relevés journaliers a permis de constater l'absence de certains tickets ainsi que le non-respect de la chronologie de la numérotation et des dates : [* absence de certains tickets ; tickets z correspondant à la recette du 20 au 21 mai 1993 non présentés, ticket 398 absent, non présentation de l'original de la bande de caisse enregistreuse correspondant aux tickets n° 0013 à 0106 de mai 1993, *] non respect de la chronologie de la numérotation et des dates, ticket 17 daté du 16 mai 1993 inclus dans la recette du 15 mai, ticket n° 18 daté du 16 mai 1992 inclus dans la recette du 19 mai, ticket n° 20 daté du 21 mai 1993 inclus dans la recette du 20 mai ;

- absence de comptabilisation du produit de la revente des tabacs pour les mois d'août 1995 à avril 1996 à l'exception des ventes des 7 et 9 octobre 1995 ;

en ce qui concerne les entrées à la discothèque :

- absence de registre des entrées rendant impossible le contrôle des plaques vendues au début de la période vérifiée ;

- absence de remise de tickets pour les entrées gratuites ;

- prix mentionnés sur certains tickets ne correspondant pas toujours au prix réel pratiqué ;

en ce qui concerne les achats : absence de ventilation entre les achats discothèque et les achats restaurant ;

autres irrégularités : absence de suivi journalier des sorties de cave ; que ces faits sont constants et que Jean-Claude X... qui les a commis en sa qualité de gérant de droit d'une SARL dont il détenait 50 % des parts et son fils 50 %, et qui a tenu une comptabilité irrégulière, a contraint l'Administration des impôts à rejeter sa comptabilité et à reconstituer son chiffre d'affaires ; qu'il ne peut alors critiquer devant la juridiction pénale la méthode de reconstitution appliquée qui a été admise par la Commission départementale des impôts et qui a abouti à des redressements non contestés devant les juridictions administratives ; que la méthode même que Jean-Claude X... propose n'aboutit pas à supprimer tout redressement puisqu'il admet notamment à propos de l'exercice 1994-1995 et concernant la "récapitulation en bouteilles du chiffre d'affaires" un redressement au niveau du résultat de 698 930 francs et au niveau de la TVA de 117 083 francs ; qu'il en est de même à hauteur de 3 538 francs au niveau de la TVA concernant l'exercice 1995 au 30 avril 1996 (cf. réponse du contribuable du 2 novembre 1996-B14) ; que Jean-Claude X... ne conteste pas la non déclaration des recettes du snack au titre de l'exercice 199 (B10 page 4) ; qu'enfin, en proposant 16 % pour la "politique d'offerts" alors que l'Administration des Impôts retient 1 à 2 %, Jean-Claude X... ne fait référence à aucune méthode, mais procède par affirmations non vérifiables (B10 page 7) ; que la somme de 1 000 francs prévue à l'article 1741 du Code général des impôts est dépassée ; qu'il n'est pas inutile de relever que les dissimulations constituent, selon la méthode de l'Administration des impôts, 39 % au niveau des recettes et 68 % au niveau de la TVA ; que l'intention frauduleuse de Jean-Claude X... est manifeste dès lors qu'il ne peut ignorer les obligations fiscales du gérant de droit qu'il était d'une SARL dont il détenait avec son fils 100 % des parts et alors surtout que les irrégularités sont nombreuses et systématiques, qu'il a abusivement et sciemment déduit de la TVA sur des loyers qu'il n'avait pas payés et qu'il a utilisé sa comptabilité dans le but de dissimuler le chiffre d'affaires réellement réalisé ; que, par ailleurs, l'absence d'inventaire physique au 30 septembre 1993 et l'absence de comptabilisation des produits achetés en mars 1991 par le précédent exploitant, résultent d'une manoeuvre délibérée de Jean-Claude X... ; qu'il en est de même de l'absence de remise de tickets d'entrée à la discothèque ; que les faits reprochés sont donc établis et qu'il y a lieu de faire droit aux réquisitions du ministère public de première instance ;

"alors que le juge correctionnel ne peut légalement statuer que sur les faits dont il est saisi ; que l'arrêt attaqué constate que Jean-Claude X... était prévenu d'avoir "courant 1995 et 1996" volontairement soustrait la société dont il était le représentant légal "à l'établissement et au paiement partiel de la TVA exigible au titre de la période du 1er décembre 1994 au 30 avril 1996" et au paiement "de l'impôt sur les sociétés dû au titre de l'exercice clos le 30 septembre 1995" ainsi que d'avoir en cette même qualité sciemment omis de passer "au titre de l'exercice clos le 30 septembre 1995" des écritures dans les documents comptables obligatoires ; qu'en retenant pour caractériser les infractions dont Jean-Claude X... a été déclaré coupable des faits afférents à des périodes antérieures et notamment l'absence de journaux auxiliaires, de caisse, de banque, achats et opérations diverses pour la période du 1er octobre 1992 au 31 mai 1993, l'inexactitude du stock au 30 septembre 1992, l'absence d'inventaire physique au 30 septembre 1993, le caractère incomplet des stocks arrêtés au 30 septembre 1992, 1993, 1994, l'absence de tickets de recettes ou le non respect de la chronologie de leur numérotation pour certains jours de 1993 et l'absence de comptabilisation des produits achetés en mars 1991, la Cour a méconnu l'étendue de sa saisine, violant ainsi les textes visés au moyen" ;

Attendu que, pour déclarer Jean-Claude X... coupable de fraude fiscale et d'omission d'écritures en comptabilité, l'arrêt prononce par les motifs exactement repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel, qui a pu, sans méconnaître l'étendue de sa saisine, fonder sa conviction sur l'ensemble des éléments de preuve soumis au débat contradictoire, a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Mais, sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties et pris de la violation des articles 131-35 du Code pénal, 1741, alinéa 3, et 1743 du code général des impôts ;

Vu lesdits articles ;

Attendu, selon ces textes, qu'en cas de condamnation pour fraude fiscale ou pour omission d'écritures en comptabilité, le tribunal qui ordonne la publication et l'affichage de la décision aux frais du condamné, n'a pas à en fixer le coût, lequel ne doit toutefois pas excéder le maximum de l'amende encourue ;

Attendu qu'après avoir reconnu Jean-Claude X... coupable des délits précités et ordonné la publication et l'affichage de la décision, les juges du second degré ont fixé à 500 euros le coût maximal de l'insertion ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes et principe susvisés ;

D'où il suit que la cassation est dès lors encourue ;

Qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de Cassation étant en mesure d'appliquer la règle de droit appropriée ainsi que le permet l'article L. 131-5 du Code de l'organisation judiciaire ;

Par ces motifs ;

CASSE et ANNULE, en ses seules dispositions relatives aux frais de publication de la décision de condamnation, l'arrêt susvisé de la Cour d'appel de Montpellier, en date du 25 juin 2002, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Dit n'y avoir lieu à renvoi ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Montpellier, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Rognon conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-86510
Date de la décision : 10/09/2003
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Impôts directs et taxes assimilées - Pénalités et peines - Peines - Affichage et publication des jugements - Fixation par le juge du coût de l'insertion - Nécessité (non).

PEINES - Peines complémentaires - Publicité et affichage - Fixation par le juge du coût de l'insertion - Nécessité (non)

AFFICHAGE - Affichage et publication de condamnation - Peine complémentaire - Impôts et taxes - Fixation par le juge du coût de l'insertion - Nécessité (non)

En cas de condamnation pour fraude fiscale ou pour omission d'écritures en comptabilité, le Tribunal qui ordonne la publication et l'affichage de la décision, aux frais du condamné, n'a pas à en fixer le coût, lequel ne doit toutefois pas excéder le maximum de l'amende encourue (1).


Références :

Code général des impôts 1741, al. 3, 1743
Code pénal 131-35

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier (chambre correctionnelle), 25 juin 2002

CONFER : (1°). (1) A comparer: Chambre criminelle, 1995-10-12, Bulletin criminel 1995, n° 306, p. 839 (rejet et cassation sans renvoi) ; Chambre criminelle, 1996-03-28, Bulletin criminel 1996, n° 144, p. 410 (cassation sans renvoi).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 10 sep. 2003, pourvoi n°02-86510, Bull. crim. criminel 2003 N° 157 p. 622
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2003 N° 157 p. 622

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Rapporteur ?: M. Rognon
Avocat(s) : la SCP de Chaisemartin et Courjon, Me Foussard.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.86510
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