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10/09/2003 | FRANCE | N°02-85295

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 septembre 2003, 02-85295


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix septembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SOULARD, les observations de Me CHOUCROY, la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Hervé,

- LA SOCIETE VENUS DE VALDIVIA,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVEN

CE, 5ème chambre, en date du 12 juin 2002, qui, pour infractions à la législation sur les contributi...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix septembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SOULARD, les observations de Me CHOUCROY, la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Hervé,

- LA SOCIETE VENUS DE VALDIVIA,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 5ème chambre, en date du 12 juin 2002, qui, pour infractions à la législation sur les contributions indirectes, les a condamnés à des pénalités fiscales ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 403, 502, 1791 et 1799 du Code général des Impôts, L. 25 et L. 35 du Livre des procédures fiscales, de l'article préliminaire et des articles 388, 459 et 593 du Code de procédure pénale, 6-2 et 6-3 de la Convention européenne des droits de l'homme, renversement de la charge de la preuve, défaut de réponse aux conclusions, défaut et contradiction de motifs, violation des droits de la défense, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Hervé X... et la société Venus de Valdivia coupables d'introduction irrégulière de boissons spiritueuses et en répression, les a condamnés solidairement à une amende de 1 000 francs, à une pénalité proportionnelle de 266 100 francs et au paiement d'une somme de 829 656 francs, pour valoir confiscation de 1 241 bouteilles dont la saisie fictive a été déclarée ;

"aux motifs propres à la Cour que les premiers juges ont parfaitement rappelé le mode de raisonnement retenu par l'administration des Douanes pour reconstituer le montant des droits fraudés en s'appuyant sur les constatations opérées ponctuellement et précisément le 8 mai 1999, sur l'activité habituelle de la discothèque évoquée par Yan Y... le soir du contrôle et confirmée lors de ses auditions par Hervé X... le 18 mai 1999 et le 2 juin 1999 ;

que le prévenu a, par ailleurs, fait preuve d'une certaine désinvolture dans ses réponses relatives aux tarifs des consommations et à l'absence de titres de mouvement accompagnant certaines factures d'achat, en invoquant le laxisme de ses employés, l'oubli des fournisseurs ou sa propre ignorance de ses obligations légales, arguments incompatibles avec sa responsabilité de gérant d'un établissement particulièrement connu et fréquenté à Marseille ; qu'il produit des pièces comptables faisant état de calculs unilatéraux et sans valeur probante objective ; que, par ailleurs, l'emploi de travailleurs clandestins sanctionné par une condamnation prononcée le 2 avril 1999 par le tribunal correctionnel de Marseille pour des faits commis de juin 1997 à novembre 1998, accrédite la nécessité de conserver des recettes occultes pour rémunérer cette main-d'oeuvre particulière ;

"et aux motifs adoptés des premiers juges que les agents du service des Douanes ont évalué les quantités d'alcool pour lesquelles les droits ont été éludés sur la base de 58 bouteilles vides découvertes dans la nuit du 8 mai 1999 ; qu'à raison de trois soirées hebdomadaires, soit 156 soirées annuelles et donc 468 soirées sur trois ans, le nombre de bouteilles écoulées ressort à 27 144 ; que les factures et documents remis par Hervé X... aux agents verbalisateurs et qui figurent à la procédure justifient d'un titre de mouvement pour 15 529 bouteilles ; que la quantité de 11 615 bouteilles représentant un volume global de 7 436 L, dont 7 165 soumis à la cotisation Sécurité Sociale, résulte de la différence entre ces deux quantités ; que lors de la soirée du 8 mai 1999 au cours de laquelle a été effectué le comptage des bouteilles présentes, Yan Y... déclarait aux enquêteurs qu'il s'agissait d'une soirée normale "voire même minimum au point de vue de la fréquentation de sa clientèle habituelle" ; que ces déclarations ont été confirmées par Hervé X..., qui indiquait le 18 mai 1999, s'agissant de l'écoulement des 58 bouteilles vides, que celui-ci "reflète bien le minimum des ventes réalisées au cours de la soirée entre 4 heures et 4 heures 30 et est conforme à une soirée normale" ; que lors de cette audition, Hervé X... précisait que les samedis soirs, le chiffre des entrées payantes variait entre 100 et 150, non compris les invités ne payant pas leur entrée, pour lesquels étaient imprimées environ 300 000 invitations par mois ; que la quantité de bouteilles et donc d'alcool écoulée pendant la période de trois années visée à la citation doit donc être évaluée selon la méthode de calcul ci-dessus exposée et employée par l'Administration ; que le prévenu ne peut valablement contester cette méthode d'évaluation en arguant, comme il le fait, de son caractère excessif, lui

reprochant de ne pas tenir compte des jours fériés et vacances, ainsi que des verres offerts par les employés ; que s'agissant de ces derniers, l'article 502 du Code des Impôts n'établit aucune distinction, le paiement des droits étant exigé aux termes de ce texte pour toute introduction dans les lieux de vente ; qu'en ce qui concerne les vacances et jours fériés, le prévenu n'a nullement évoqué une fermeture de l'établissement durant ces périodes et n'en a nullement justifié à l'audience ;

"alors que, d'une part, la citation à comparaître délivrée aux prévenus par l'administration des Douanes ne visant que des faits d'introduction irrégulière de boissons spiritueuses commis le 8 mai 1999, les juges du fond, qui n'ont relevé l'existence d'aucune infraction commise ce jour-là, mais qui ont néanmoins cru devoir condamner les prévenus au paiement d'une amende et d'une pénalité proportionnelle ainsi qu'à une somme correspondant à la confiscation de bouteilles saisies fictivement calculées sur la base de prétendues infractions qui auraient été commises au cours des trois années écoulées avant le 8 mai 1999, ont ce faisant, statué sur des faits dont ils n'étaient pas saisis, violant ainsi les droits de la défense ainsi que l'article 388 du Code de procédure pénale ;

"alors que, d'autre part, tout accusé étant présumé innocent, en vertu de l'article préliminaire du Code de procédure pénale comme de l'article 6-2 de la Convention européenne de droits de l'homme, il en découle que la preuve des infractions qui lui sont reprochées incombe, conformément aux principes généraux qui gouvernent la charge de la preuve, aux parties poursuivantes, les prévenus n'ayant pas à rapporter la preuve des faits qu'ils invoquent pour démontrer leur innocence ; que, dès lors, en l'espèce, où les juges du fond ont déduit la preuve de l'infraction poursuivie des déclarations d'Hervé - X... et de celles de l'un de ses employés relatives à l'importance de la consommation quotidienne d'alcool dans son établissement conforme à celle constatée par les agents des Douanes le 8 mai 1999 entre 4 heures et 4 heures 30 en refusant de tenir aucun compte du moyen péremptoire de défense soulevé par les prévenus dans leurs conclusions d'appel et tiré du caractère erroné des calculs de l'Administration qui n'avait pas tenu compte des périodes de fermeture de l'établissement ni des variations de sa fréquentation selon les différents jours de la semaine et les saisons, sous prétexte qu'Hervé X... n'en rapportait pas la preuve, a, ce faisant renversé illégalement la charge de la preuve et violé le principe de la présomption d'innocence ;

"alors qu'enfin la désinvolture de l'exploitant d'un débit de boissons lors de son interrogatoire par des douaniers qui l'accusent d'avoir introduit irrégulièrement des boissons alcoolisées dans son établissement, ne pouvant, non plus que l'existence d'une condamnation pour une infraction totalement distincte de ce délit, constituer une preuve de celui-ci, les juges du fond ont privé leur décision de motifs en invoquant ces éléments dépourvus de toute portée pour entrer en voie de condamnation à l'encontre des prévenus sans expliquer en quoi ils pouvaient démontrer leur culpa- bilité au regard du délit poursuivi" ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 403, 502 et 1791 du Code général des Impôts et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné solidairement les prévenus déclarés coupables d'introduction irrégulière de boissons spiritueuses, au paiement d'une somme de 829 656 francs pour valoir confiscation des 1 241 bouteilles dont la saisie fictive a été déclarée ;

"alors que, d'une part, en matière de contributions indirectes, la confiscation ne peut être ordonnée aux termes de l'article 1791 du Code général des Impôts que pour des objets, produits ou marchandises préalablement saisis, ce qui exclut que des prévenus puissent être condamnés au paiement d'une somme pour valoir confiscation d'objets dont la saisie fictive a été déclarée mais qui n'ont pas fait l'objet d'une saisie effective ;

"alors que, d'autre part, après avoir déclaré les prévenus coupables d'introduction irrégulière de 11 615 bouteilles sans titre de mouvement, les juges du fond ont privé leur décision de toute base légale et violé l'article 1791 du Code général des Impôts en condamnant les mêmes prévenus au paiement d'une somme pour valoir confiscation de 1 241 bouteilles dont la saisie fictive a été déclarée, cette saisie fictive apparaissant sans commune mesure avec la quantité des bouteilles sur lesquelles a porté l'infraction" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables d'avoir, entre le 8 mai 1996 et le 8 mai 1999, introduit dans un lieu de vente 11 615 bouteilles de boissons spiritueuses et les condamner, notamment, au paiement d'une somme de 829 656 francs pour valoir confiscation des 1 241 bouteilles dont la saisie fictive avait été ordonnée, la cour d'appel prononce par les motifs repris aux moyens ;

Attendu qu'en cet état, et dès lors, d'une part, qu'il ressort des pièces de procédure que la citation visait les faits commis entre le 8 mai 1996 et le 8 mai 1999, d'autre part, qu'il résulte de l'article 1791 du Code général des impôts qu'en matière de contributions indirectes toute contravention légalement établie entraîne la confiscation des marchandises saisies en contravention, que la saisie fictive a la même valeur et produit les mêmes effets que la saisie réelle et que le paiement de la somme de 829 656 francs pour tenir lieu de confiscation correspond à la valeur des bouteilles saisies fictivement telles que visées à la prévention, la cour d'appel, qui n'a pas renversé la charge de la preuve, a justifié sa décision ;

D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Soulard conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-85295
Date de la décision : 10/09/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 5ème chambre, 12 juin 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 10 sep. 2003, pourvoi n°02-85295


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.85295
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