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10/09/2003 | FRANCE | N°02-85240

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 septembre 2003, 02-85240


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix septembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller ROGER, les observations de la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Raymond,

contre l'arrêt de la cour d'appel de METZ, chambre correctionnelle, en date du 22 mai 2002, qui, pour escroquerie, l'a co

ndamné à 3 mois d'emprisonnement avec sursis, 15 000 euros d'amende et 3 ans d'interdiction...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix septembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller ROGER, les observations de la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Raymond,

contre l'arrêt de la cour d'appel de METZ, chambre correctionnelle, en date du 22 mai 2002, qui, pour escroquerie, l'a condamné à 3 mois d'emprisonnement avec sursis, 15 000 euros d'amende et 3 ans d'interdiction de gérer une société ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, de l'article 313-1, 313-7 et 313-8 du Code pénal et de l'article 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt a déclaré Raymond X... coupable du délit d'escroquerie ;

"aux motifs qu'aux termes des conditions particulières du contrat d'agent régional conclu le 29 juillet 1994 avec la société Sofinal SA de droit français au capital de 500 000 francs dont le siège social est à 57 000 METZ - WTC - 2, rue Auguste Fresnel, représentée par Raymond X..., agissant en qualité de président, Miguel Y... s'est engagé à verser à la société Sofinal une somme de 2 000 000 francs, payable pour 250 000 francs à la signature du contrat, pour 250 000 francs au jour du début d'exploitation de la licence et pour le complément de 1 500 000 francs en quote-part sur le chiffre d'affaires réalisé, et ce en contrepartie de la cession de la licence d'exploitation ; que les conditions générales de ce contrat sont signées des mêmes parties le même jour ; que toujours le 29 juillet 1994, Miguel Y... a également conclu avec la société Sofinal SA une convention d'utilisation de l'ensemble des services administratifs et informatiques et d'économat de Sofinal France ;

qu'il est établi qu'à la date du 29 juillet 1994 la société Sofinal SA, telle que mentionnée sur les différents documents contractuels remis à MigueI Y... (société au capital de 500 000 francs dont le siège est rue Auguste Fresnel à Metz), n'a aucune existence juridique faute de toute immatriculation de cette société au registre du commerce et des sociétés ; que cet intitulé figure pourtant sur les différentes conventions conclues par Miguel Y... mais aussi sur les descriptifs de l'activité de Sofinal notamment dans la présentation de l'organigramme fonctionnel ; que c'est encore cette appellation qui est mentionnée sur les avenants au contrat d'agent régional signés les 12 et 14 septembre 1994 ; qu'en outre l'organigramme présente une SARL Sofinal Lorraine au capital de 2 000 000 francs comme chapeautée par la SA Sofinal France, laquelle SARL n'a pas plus d'existence juridique que la SA Sofinal au nom de laquelle sont cependant établis les comptes d'exploitations passé ou provisionnel, soumis à Miguel Y... ; que la conclusion du contrat d'agent régional est précédée pa la transmission de documents concernant Sofinal Lorraine (compte d'exploitation du 1er janvier 1994 au 30 août 1995 établi sur la base de la nouvelle organisation de Sofinal Lorraine, carnet de commande) par le biais d'un courrier du 9 juillet 1994 de Gérard Z... établi sur papier à l'enseigne commerciale Sofinal France mentionnant "Cofinal SARL au capital de 2 000 000 francs - RCS B 344 146 642 Neuilly-APE 7906" ; qu'il est significatif d'observer qu'il est ainsi mis en avant une société dont le capital particulièrement important pour une SARL est de nature à donner aux cocontractants potentiels toute assurance sur le sérieux de leur partenaire ; que cette présentation étayée d'une fausse entreprise caractérise donc les manoeuvres frauduleuses entrant dans les éléments constitutifs du délit d'escroquerie ; que les premiers juges ont à tort estimé que les prévenus avaient régularisé la situation dans la mesure où la société SFEC, constituée dès le 27 septembre 1994, avait repris lors de l'assemblée générale constitutive les actes des fondateurs ; qu'en effet, il convient de rappeler que le délit d'escroquerie est un délit instantané ; que la création postérieurement au 29 juillet 1994, par des statuts en date du 27 septembre 1994, d'une société SFCE qui n'est immatriculée au registre du commerce et des sociétés qu'à compter du 16 novembre 1994, date à laquelle elle est alors dotée de la personnalité morale, ne constitue qu'un repentir actif sans incidence sur la commission du délit d'escroquerie constitué à la date du 29 juillet 1994 quand bien même la société SFCE reprenait les actes accomplis par Raymond X... et Gérard Z... ; que ces manoeuvres ont déterminé Miguel Y... par la fausse croyance créée dans l'existence d'une société importante au capital solide et à la réussite accomplie, à conclure le contrat d'agent régional et à remettre en exécution de ce contrat deux chèques d'un montant chacun de 250 000 francs tirés respectivement les 29 juillet 1994 et 15 septembre 1994, tous deux encaissés sur les comptes de la société Sofinal SARL ; qu'il est à rappeler que dans les mois qui ont précédé la constitution de la société SFCE par statuts du 27 septembre 1994 l'agence messine Sofinal a mis sur ses

correspondances commerciales le numéro RCS de la société Cofinal SARL, société au capital de 2 000 000 francs ayant une existence régulière par son immatriculaion au registre du commerce de Nanterre ; que les premiers juges ont à tort cru pouvoir affirmer que cette SARL Cofinal pouvait servir de soutien financier avant création de SFCE, sauf à cautionner des pratiques entre sociétés distinctes de nature à recevoir des qualifications pénales ;

qu'il s'en est suivi un préjudice pour Miguel Y... qui a demandé le 4 novembre 1994 à Sofinal France la résiliation du contrat avec restitution de la somme engagée ; que d'ailleurs, il a poursuivi le remboursement des sommes versées et a obtenu, par une ordonnance de référé en date du 14 février 1995 (ordonnance qui après avoir stigmatisé Ie comportement de Raymond X... et Gérard Z... ordonne la communication de l'intégralité du dossier au ministère public), la condamnation solidaire de Raymond X..., Gérard Z..., de la SARL Cofinal et de la SA SFCE au paiement d'une provision de 500 000 francs ; que ces agissements, délibérés de la part des prévenus qui tous deux se présentent comme spécialistes de la valorisation d'entreprises et ne peuvent donc ignorer l'importance des renseignements commeciaux communiqués dans des négociations contractuelles, ressortent d'une intention frauduleuse ; qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments que le délit d'escroquerie commis au préjudice de Miguel Y... est constitué et exactement qualifié ; que dès lors les premiers juges ne pouvaient entrer en voie de relaxe envers Raymond X... et Gérard Z... de ce chef de prévention ; qu'il échet en conséquence d'infirmer le jugement entrepris et de déclarer Raymond X... et Gérard Z... coupables des délits d'escroqueries commis au préjudice de Miguel Y... ;

"1°I alors que le délit d'escroquerie n'est constitué que si les manoeuvres employées pour obtenir une remise quelconque ont eu notamment pour but de persuader de l'existence d'une fausse entreprise ; que la cour d'appel a estimé que Miguel Y... avait remis des fonds au prévenu persuadé de l'existence d'une fausse entreprise dès lors que la Sofinal SA, avec laquelle il avait contracté, n'avait pas d'existence juridique faute d'immatriculation ; qu'en qualifiant de manoeuvres frauduleuses Ia conclusion d'un contrat au nom d'une société en formation tout en constatant que cette société avait été ultérieurement immatriculée et que ledit contrat avait été repris par l'assemblée générale constitutive et sans relever un quelconque fait susceptible de démontrer le caractère fictif ou de façade ou l'absence d'activité réelle de cette société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

"2°/ alors que la contradiction de motifs équivaut à son absence ; que la cour d'appel a estimé que les manoeuvres frauduleuses étaient caractérisées dès lors que, pour persuader Miguel Y... de l'existence d'une fausse entreprise, le prévenu avait mentionné sur un courrier du 19 juillet 1994 la SARL Sofinal au capital de 2 000 000 francs, ce qui était de nature à créer la fausse croyance dans l'existence d'une société importante au capital solide et à la réussite accomplie ; qu'en déclarant qu'une telle mention constituait une présentation étayée d'une fausse entreprise tout en constatant, par motifs propres et adoptés, que ladite SARL Sofinal au capital de 2 000 000 francs existait et était régulièrement immatriculée depuis 1988 et que les faits mentionnés étaient dès lors parfaitement exacts, la cour d'appel a privé sa décision de motifs en violation des textes susvisés ;

"3°/ alors que le juge correctionnel ne peut entrer en voie de condamnation qu'autant qu'il constate Ies éléments du délit et qu'il précise les circonstances de fait dans lesquelles il a été commis ; qu'en affirmant que les manoeuvres frauduleuses étaient caractérisées par la fausse croyance créée dans l'existence d'une société importante au capital et à la réussite accomplie, sans caractériser en fait, en quoi Miguel Y... aurait été trompé sur la situation financière de son cocontractant par la production d'un quelconque document erroné ou falsifié de nature à provoquer une croyance erronée en sa prospérité, la cour d'appel a privé sa décision de motifs en violation des textes susvisés" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Roger conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

3


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-85240
Date de la décision : 10/09/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de METZ, chambre correctionnelle, 22 mai 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 10 sep. 2003, pourvoi n°02-85240


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.85240
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