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03/06/2003 | FRANCE | N°01-41697

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 juin 2003, 01-41697


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 22 janvier 2001), M. X... a été engagé en 1988 en qualité d'électricien par la société de droit italien Compagnia technica internazzionale Procetti (CTIP), dont la faillite a été prononcée par jugement du tribunal civil de Rome du 17 avril 1997 ; qu'il a été licencié le 30 juillet 1997 pour motif économique ; qu'il a fait convoquer devant la juridiction prud'homale le curateur à la faillite de la so

ciété, le mandataire de justice français désigné par le juge de la procédure collec...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 22 janvier 2001), M. X... a été engagé en 1988 en qualité d'électricien par la société de droit italien Compagnia technica internazzionale Procetti (CTIP), dont la faillite a été prononcée par jugement du tribunal civil de Rome du 17 avril 1997 ; qu'il a été licencié le 30 juillet 1997 pour motif économique ; qu'il a fait convoquer devant la juridiction prud'homale le curateur à la faillite de la société, le mandataire de justice français désigné par le juge de la procédure collective pour assister son confrère italien dans les opérations de la liquidation conduites en France et l'AGS, pour obtenir le paiement par son ancien employeur et la garantie par l'institution d'un rappel de salaires et de primes et d'indemnités diverses ;

Attendu que l'AGS et l'UNEDIC font grief à l'arrêt d'avoir décidé que les sommes mises à la charge de M. Pulsoni, ès qualités de curateur à la faillite de la société CTIP, doivent être garanties par l'AGS, alors, selon le moyen :

1 / que lorsque l'employeur est établi dans un autre Etat membre que celui sur le territoire duquel le travailleur réside et exerce son activité salariée, l'institution de garantie compétente, au sens de l'article 3 de la directive n° 80/987/CEE du 20 octobre 1980, est l'institution du territoire sur lequel, selon les termes de l'article 2, paragraphe 1, de la directive, soit l'ouverture de la procédure de désintéressement collectif est décidée, soit la fermeture de l'entreprise ou de l'établissement de l'employeur est constatée ; que selon l'article 2, paragraphe 1, de la directive les deux critères fixés au b pour déterminer si un employeur est en état d'insolvabilité sont alternatifs et s'entendent soit d'une décision d'ouverture de la procédure, soit de la constatation de la fermeture de l'entreprise ou de l'établissement de l'employeur, en cas d'insuffisance d'actif pour justifier l'ouverture de la procédure ; qu'il résulte des dispositions de l'article L. 143-11-1 du Code du travail que l'assurance est due seulement lorsqu'une procédure collective est ouverte en France ;

qu'en considérant qu'en l'espèce où, par un jugement du 17 avril 1997, seul le tribunal civil de Rome avait déclaré la société CTIP en faillite et aucune procédure collective de la société CTIP n'avait été ouverte en France, l'institution compétente pour garantir l'insolvabilité de ladite société à l'égard de M. X... était l'AGS-CGEA de Chalon-sur-Saône, peu important que la succursale de la société CTIP ait la personnalité morale, la cour d appel a violé l'article L. 143-11-1 du Code du travail et la directive n° 80/987/CEE du 20 octobre 1980 ;

2 / que, par arrêt du 17 septembre 1998 (aff. C-11/96) la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit que lorsque l'employeur est établi dans un autre Etat membre que celui sur le territoire duquel le travailleur réside et exerçait son activité, l'institution de garantie compétente, au sens de l'article 3 de la directive n° 80/987/CEE du 20 octobre 1980 concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives à la protection des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur pour le paiement des créances de ces travailleurs, est l'institution sur le territoire duquel, soit l'ouverture de la procédure de désintéressement collectif est décidée, soit la fermeture de l'entreprise ou de l'établissement de l'employeur est constatée ; que, par un arrêt du 16 décembre 1999 (aff. n° 198/98), la Cour de justice des Communautés européennes a écarté cette solution lorsque ledit employeur a une succursale immatriculée sur le territoire de l'Etat membre duquel le travailleur exerçait son activité sans pour autant avoir la personnalité morale et dit pour droit que, dans ce cas, l'institution compétente au sens de l'article 3 de la directive est celle de l'Etat sur le territoire duquel le travailleur exerçait son activité salariée dès lors que les cotisations sociales afférentes à cette garantie ont été versées

à cette institution ; que l'article L. 143-11-1 du Code du travail ayant valeur de transposition en droit français de ladite directive doit être interprété à la lumière de ces décisions ; qu'en considérant que l'institution compétente pour garantir le paiement des salaires de M. X..., embauché par la société de droit italien CTIP ayant son siège social à Rome et ayant fait l'objet d'un jugement de faillite le 17 avril 1997 par le tribunal civil de Rome, était l'AGS française, sans constater que la succursale de la société CTIP en France avait versé les cotisations pour la garantie des créances de M. X... à cet organisme, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles 3 de la directive n° 80/987/CEE du 20 octobre 1980 et L. 143-11-1 du Code du travail ;

3 / que le jugement d'ouverture interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance a son origine antérieurement audit jugement et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ; qu'en disant que l'AGS devait garantir les condamnations en paiement des salaires de M. X... prises en méconnaissance de l'article 47 de la loi du 25 janvier 1985 dès lors qu'elles étaient prononcées à l'encontre du curateur de la société CTIP en faillite, la cour d'appel a violé ledit texte ;

Mais attendu, d'abord, que la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit : "Lorsque les travailleurs victimes de l'insolvabilité de leur employeur exerçaient leur activité salariée dans un Etat membre pour le compte de la succursale d'une société constituée selon le droit d'un autre Etat membre, dans lequel cette société a son siège social et y est mise en liquidation, l'institution compétente, au regard de l'article 3 de la directive n° 80/987/CEE du Conseil du 20 octobre 1980, concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives à la protection des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur, pour le paiement des créances de ces travailleurs, est celle de l'Etat sur le territoire duquel ils exerçaient leur activité salariée" (arrêt du 16 décembre 1999, Everson et Barrass c./ Bell, aff. n° C-198/98) ; que la cour d'appel, qui a constaté que la société de droit italien CTIP, dont le siège était à Rome, avait été mise en faillite par le juge italien et que M. X... exerçait son activité en France au service de l'établissement français de la société italienne, a décidé à bon droit que l'AGS devait garantir les créances résultant du contrat de travail de l'intéressé, par application de l'article L. 143-11-1 du Code du travail qui a valeur de transposition en droit français de la directive précitée ;

Attendu, ensuite, que, contrairement aux allégations de la deuxième branche du moyen, la Cour de justice des Communautés européennes n'a pas décidé que l'institution compétente au sens de l'article 3 de la directive n° 80/987/CEE du Conseil, concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives à la protection des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur, est celle de l'Etat membre sur le territoire duquel le travailleur exerçait son activité salariée dès lors que les cotisations sociales afférentes à cette garantie ont été versées à cette institution ; que, de surcroît, si l'article 5 de ladite directive prévoit que les employeurs doivent contribuer au financement des institutions de garantie, à moins que ce financement ne soit assuré intégralement par les pouvoirs publics, il dispose également que l'obligation de paiement des institutions existe indépendamment de l'exécution des obligations de contribuer à leur financement ;

Attendu, enfin, que la cour d'appel, qui était saisie des seuls points de savoir si des créances résultant de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail étaient dues à l'intéressé et si l'AGS devait en garantir le paiement, n'avait pas à se prononcer sur des dispositions applicables aux créanciers du débiteur et inapplicables à ses salariés ;

D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa deuxième branche et qui est inopérant en sa troisième branche en ce qu'il se borne à invoquer des dispositions légales étrangères au litige et dont la cour d'appel n'avait pas à faire application, n'est pas fondé en sa première branche ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'AGS et l'UNEDIC aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois juin deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 01-41697
Date de la décision : 03/06/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° COMMUNAUTE EUROPEENNE - Travail - Insolvabilité de l'employeur - Directive n° 80/987 du 20 octobre 1980 - Garantie - Institution compétente - Détermination.

1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Employeur - Redressement et liquidation judiciaires - Créance des salariés - Assurance contre le risque de non - paiement - Garantie - Application territoriale - Critères - Détermination 1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Salaire - Paiement - Redressement et liquidation judiciaires - Assurance contre le risque de non-paiement - Garantie - Domaine d'application - Etendue 1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Employeur - Employeur étranger - Procédure collective - Garantie des salaires - Condition 1° ENTREPRISE EN DIFFICULTE - Redressement judiciaire - Salariés - Assurance contre le risque de non-paiement - Garantie - Domaine d'application - Etendue.

1° La cour d'appel, qui constate qu'une société de droit italien, dont le siège était en Italie, avait été mise en faillite par le juge italien et que le salarié exerçait son activité en France au service de l'établissement français de ladite société, décide à bon droit que l'association pour la gestion du régime d'assurance des créances des salariés (AGS) doit garantir les créances résultant du contrat de travail de l'intéressé par application de l'article L. 143-11-1 du Code du travail, qui a valeur de transposition en droit français de la directive n° 80/987/CEE du Conseil du 20 octobre 1980, concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives à la protection des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur, en vertu de laquelle l'institution compétente pour le paiement des créances de ces travailleurs est celle de l'Etat sur le territoire duquel ils exerçaient leur activité salariée.

2° COMMUNAUTE EUROPEENNE - Travail - Insolvabilité de l'employeur - Directive n° 80/987 du 20 octobre 1980 - Garantie - Institution compétente - Obligation de paiement - Etendue.

2° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Employeur - Redressement et liquidation judiciaires - Créance des salariés - Assurance contre le risque de non-paiement - Garantie - Institution compétente - Obligation de paiement - Etendue 2° ENTREPRISE EN DIFFICULTE - Redressement judiciaire - Salariés - Assurance contre le risque de non-paiement - Garantie - Institution compétente - Obligation de paiement - Etendue.

2° Si l'article 5 de la directive no 80/987/CEE du Conseil concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives à la protection des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur, prévoit que les employeurs doivent contribuer au financement des institutions de garantie, à moins que ce financement ne soit assuré intégralement par les pouvoirs publics, il dispose également que l'obligation de paiement des institutions existe indépendamment de l'exécution des obligations de contribuer à leur financement.


Références :

1° :
2° :
Code du travail L. 143-11-1,
Directive CEE 80/987 du 20 octobre 1980 art. 3
Directive CEE 80/987 du 20 octobre 1980 art. 5

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 22 janvier 2001

A RAPPROCHER : Chambre sociale, 2002-07-02, Bulletin 2002, V, n° 228, p. 223, (rejet)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 jui. 2003, pourvoi n°01-41697, Bull. civ. 2003 V N° 183 p. 179
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2003 V N° 183 p. 179

Composition du Tribunal
Président : M. Sargos.
Avocat général : M. Lyon-Caen.
Rapporteur ?: M. Chagny.
Avocat(s) : la SCP Piwnica et Molinié, M. Foussard.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:01.41697
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