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22/05/2003 | FRANCE | N°02-12198

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 22 mai 2003, 02-12198


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Aix-en-Provence, 5 Décembre 2001) que la société Adipeint, dont M. X... était le gérant, ayant ses comptes ouverts dans les livres d'une agence de la Société Marseillaise de crédit (la SMC) dirigée par M. Y..., s'est vue notifier par ce dernier la suspension de l'escompte de ses effets de commerce ;

que M. Y... a proposé ultérieurement à M. X..., qui a accepté, l'escompte de deux nouvelle

s lettres de change émises par la société Adipeint, en contrepartie du versement à son ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Aix-en-Provence, 5 Décembre 2001) que la société Adipeint, dont M. X... était le gérant, ayant ses comptes ouverts dans les livres d'une agence de la Société Marseillaise de crédit (la SMC) dirigée par M. Y..., s'est vue notifier par ce dernier la suspension de l'escompte de ses effets de commerce ;

que M. Y... a proposé ultérieurement à M. X..., qui a accepté, l'escompte de deux nouvelles lettres de change émises par la société Adipeint, en contrepartie du versement à son profit d'une commission ;

qu'à la suite de diverses plaintes, dont celle de M. X..., M. Y... et un tiers, M. Z..., ont été pénalement condamnés des chefs de corruption passive et complicité ; que la société Adipeint ayant été placée en liquidation judiciaire, M. X... a assigné la SMC en réparation sur le fondement de l'article 1384, alinéa 5, du Code civil ; qu'un jugement a débouté de cette action M. A..., intervenu en qualité de mandataire de la liquidation judiciaire personnelle de M. X... ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors selon le moyen :

1 / que dès lors qu'il résulte des propres constatations des juges du fond, et des juridictions pénales, que la société Adipeint avait été sollicitée par le directeur de l'agence de la SMC, dans le cadre d'un système de commissions occultes en vue de l'obtention de facilités d'acceptation d'effets à l'escompte, ce dont il résultait que l'acte dommageable avait un lien direct avec les fonctions du préposé de la SMC, qu'il n'aurait pas été possible sans ses fonctions, et qu'il avait été réalisé dans le cadre de l'exécution des attributions du directeur de l'agence bancaire, qui était d'accorder ou de refuser les facilités d'escompte, la cour d'appel ne pouvait, pour écarter la responsabilité du commettant, juger que le préposé avait agi hors du cadre de ses fonctions, sans violer l'article 1384, alinéa 5, du Code civil ;

2 / que dès lors que M. X..., gérant de la société Adipeint, avait été soumis à la pression du préposé de la banque qui refusait, d'une part, toute facilité d'escompte et proposait, d'autre part, en sa qualité de directeur d'agence un escompte de la SMC moyennant paiement de commissions occultes, il ne pouvait être jugé de mauvaise foi dès lors que la victime n'avait pas agi dans son intérêt mais contrainte par les exigences du préposé de la banque, si bien que la cour d'appel a faussement appliqué les dispositions de l'article 1384, alinéa 5, du Code civil ;

3 / que l'octroi frauduleux de facilités d'escompte contre commissions occultes caractérisait un soutien abusif par le préposé de la banque de la société Adipeint, ce dont il était résulté une aggravation du passif de cette société et donc du préjudice subi par M. X..., si bien que la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision, au regard des articles 1382 et 1384, alinéa 5, du Code civil ;

Mais attendu que l'arrêt retient par motifs propres et adoptés que, selon l'arrêt de condamnation pénale du 21 novembre 1996, M. Y..., directeur d'agence, a, sans le consentement de son employeur, sollicité et obtenu de divers clients des commissions occultes pour prix d'ouverture de comptes, de facilités de découvert, ou d'acceptation d'effets à l'escompte, les commissions étant versées le plus souvent en dehors de l'établissement bancaire ; que M. X..., à qui M. Y... avait signifié en février 1991 l'arrêt total de l'escompte au profit de sa société, lui a versé une commission de 7 000 francs pour l'escompte de deux traites ; que M. X... ne pouvant ignorer le procédé frauduleux utilisé par M. Y... puisqu'il avait donné son accord sur le montant de la commission préalablement à l'escompte des deux traites, ne saurait rechercher la responsabilité du commettant ;

Que par ces seuls motifs, et abstraction faite de ceux visés par la troisième branche du moyen, qui sont surabondants, la cour d'appel a exactement décidé qu'en obtenant de M. X... le paiement volontaire et en connaissance de cause d'une commission occulte, M. Y... avait agi hors de ses fonctions, sans autorisation de son employeur et à des fins étrangères à ses attributions, et que M. X... n'avait pas pu légitimement croire que M. Y... agissait pour le compte de la banque, justifiant ainsi légalement sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. A..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne M. A..., ès qualités, à payer à la Société Marseille de crédit la somme de 2 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mai deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 02-12198
Date de la décision : 22/05/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Commettant-préposé - Lien entre la faute du préposé et ses fonctions - Abus de fonctions - Acte indépendant du rapport de préposition - Banque - Directeur d'agence - Directeur d'agence sollicitant des clients le paiement de commissions occultes .

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Commettant-préposé - Lien entre la faute du préposé et ses fonctions - Abus de fonctions - Acte indépendant du rapport de préposition - Banque - Caractère frauduleux du procédé utilisé par le préposé - Connaissance par la victime - Portée

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Commettant-préposé - Banque - Directeur d'agence - Directeur d'agence sollicitant des clients le paiement de commissions occultes

BANQUE - Responsabilité - Préposé - Directeur d'agence - Abus de fonctions - Connaissance par la victime

Justifie légalement sa décision, une cour d'appel qui, pour débouter le gérant d'une société de son action en réparation sur le fondement de l'article 1384, alinéa 5, du Code civil, exercée contre une banque, en décidant exactement que le directeur d'une des agences de ladite banque avait agi hors de ses fonctions, sans autorisation de son employeur et à des fins étrangères à ses attributions, et que le gérant de la société n'avait pu légitimement croire que le directeur d'agence agissait pour le compte de la banque, retient que, selon une condamnation pénale, un directeur d'agence de cette banque a, sans le consentement de son employeur, sollicité et obtenu de divers clients des commissions occultes pour prix d'ouverture de comptes, de facilités de découvert, ou d'acceptation d'effets à l'escompte, les commissions étant versées le plus souvent en dehors de l'établissement bancaire, que le gérant de la société, à qui le directeur de l'agence avait signifié l'arrêt total de l'escompte au profit de sa société, lui avait versé une commission pour l'escompte de deux traites, que ce gérant, ne pouvant ignorer ce procédé frauduleux, puisqu'il avait donné son accord sur le montant de la commission préalablement à l'escompte des deux traites, ne saurait rechercher la responsabilité du commettant.


Références :

Code civil 1384, al. 5

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 05 décembre 2001

A RAPPROCHER : Chambre civile 2, 1998-06-24, Bulletin 1998, II, n° 225, p. 133 (cassation)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 22 mai. 2003, pourvoi n°02-12198, Bull. civ. 2003 II N° 156 p. 132
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2003 II N° 156 p. 132

Composition du Tribunal
Président : M. Ancel .
Avocat général : M. Kessous.
Rapporteur ?: M. Bizot.
Avocat(s) : M. Choucroy, la SCP Célice, Blancpain et Soltner.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.12198
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