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13/05/2003 | FRANCE | N°01-15572

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 13 mai 2003, 01-15572


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses diverses branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 12 juin 2001), qu'après la mise en redressement judiciaire de la société Gooding électronique, le 23 juin 1995, M. X..., nommé administrateur, a exigé la poursuite des contrats de location de matériel électronique et informatique conclus avec la société Locaconseil ; que, le 24 février 1997, le tribunal a converti le redressement en liquidation judi

ciaire ; que la cour d'appel a infirmé le jugement, par arrêt du 8 avril 1997, ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses diverses branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 12 juin 2001), qu'après la mise en redressement judiciaire de la société Gooding électronique, le 23 juin 1995, M. X..., nommé administrateur, a exigé la poursuite des contrats de location de matériel électronique et informatique conclus avec la société Locaconseil ; que, le 24 février 1997, le tribunal a converti le redressement en liquidation judiciaire ; que la cour d'appel a infirmé le jugement, par arrêt du 8 avril 1997, renvoyé l'affaire devant le tribunal en vue de l'élaboration d'un plan de cession et ouvert une nouvelle période d'observation d'un mois ; que le tribunal a arrêté un plan de cession, par jugement du 29 avril 1997 ; que la société Locaconseil a mis en demeure l'administrateur de lui payer la somme de 510 489,22 francs correspondant à une échéance impayée du loyer de février 1997 et aux mensualités des loyers dus pour la période de février 1997 à juin 1997 ; que l'administrateur lui ayant fait connaître qu'il ne disposait plus de fonds pour payer les montants réclamés, elle l'a assigné en mettant en cause sa responsabilité personnelle ;

Attendu que la société Locaconseil fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le moyen :

1 / que commet une faute l'administrateur qui, en présence de loyers arriérés depuis sept mois et qui ne peuvent plus être réglés qu'au moyen d'un moratoire présenté au cocontractant comme constituant la seule solution d'apurement possible de sa créance, propose néanmoins de poursuivre l'exécution des contrats en payant les échéances futures, et ce sans s'assurer que la société Locaconseil pourra être effectivement payée ; que, dès lors, en statuant comme elle a fait, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui résultaient de ses propres constatations au regard de l'article 1382 du Code civil, qu'elle a violé ;

2 / que commet une faute l'administrateur qui transmet au cocontractant et approuve sans réserve le courrier de son administrée proposant à ce dernier de poursuivre les contrats, en lui précisant que les factures seront réglées à échéance, l'induisant ainsi en erreur sur la situation future de l'entreprise, et l'encourageant à y répondre favorablement ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

3 / qu'en se fondant, pour exclure la faute de l'administrateur judiciaire, sur le libre consentement que la société Locaconseil aurait donné en novembre 1996 au moratoire proposé pour l'apurement de la créance et sur sa renonciation à exiger un paiement immédiat, tout en relevant par ailleurs que le paiement immédiat de l'arriéré de loyers était impossible à cette date et que l'administrateur avait informé la société Locaconseil que ce moratoire constituait la seule solution possible, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations au regard de l'article 1382 du Code civil, qu'elle a violé ;

4 / que si l'administrateur avait résilié les contrats en cours dès le mois de novembre 1996, la société Locaconseil n'aurait pas subi le préjudice résultant du non-paiement des loyers, contrepartie de la poursuite des contrats à partir de février 1997 ; que, dès lors, la faute de l'administrateur est la cause sine qua non de ce préjudice, qu'il doit réparer nonobstant les circonstances postérieures tirées de la demande de liquidation judiciaire ou encore de l'adoption d'un plan de cession de l'entreprise ; qu'ainsi la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir relevé que l'administrateur s'était assuré que le paiement des loyers pouvait être effectué lorsqu'il a exigé la poursuite des contrats, l'arrêt retient qu'en novembre 1996, la société Locaconseil a accordé un moratoire à la société débitrice en lui permettant de s'acquitter de ses arriérés, moyennant le paiement de quatre termes échelonnés de novembre 1996 à février 1997, qu'elle n'a reçu aucune assurance de paiement de la part de l'administrateur qui l'avait informée, le 13 novembre 1996, que la proposition faite par son administrée était, semblait-il, la seule possible à ce jour et qu'elle a accepté en connaissance de cause d'accorder à la société débitrice un moratoire, nonobstant la faculté qu'elle avait de demander la résiliation du contrat ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations excluant l'existence d'une faute commise par l'administrateur concernant l'absence de paiement de l'échéance de loyer de février 1997, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Attendu, en second lieu, que l'arrêt retient que l'administrateur ne peut être tenu pour responsable du non-paiement des loyers de mars à juin 1997 puisqu'il avait demandé la liquidation judiciaire de l'entreprise qui a été prononcée le 21 février 1997, mais qu'à la suite de l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement de liquidation et de la décision de la cour d'appel, ayant ordonné la poursuite de l'activité, celle-ci a été maintenue jusqu'au jugement du 29 avril 1997 ayant arrêté le plan de cession et que le cocontractant qui ne pouvait ignorer le prononcé de la liquidation judiciaire n'a pas pris l'initiative de résilier le contrat ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations excluant l'existence d'une faute commise par l'administrateur, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Locaconseil aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 1 800 euros à M. X... personnellement ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize mai deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 01-15572
Date de la décision : 13/05/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

1° ENTREPRISE EN DIFFICULTE - Redressement judiciaire - Période d'observation - Gestion - Contrats en cours - Option - Poursuite - Location de matériel - Arriérés de loyers - Accord du bailleur - Portée.

1° Une cour d'appel a pu décider qu'un administrateur judiciaire n'avait pas commis de faute en exigeant la poursuite d'un contrat de location de matériel en dépit de l'existence d'arriérés de loyers, après avoir relevé qu'il s'était assuré que le paiement des loyers pouvait être effectué et que le bailleur avait accepté en connaissance de cause d'accorder à la société débitrice un moratoire, nonobstant la faculté qu'il avait de demander la résiliation du contrat.

2° ENTREPRISE EN DIFFICULTE - Organes - Administrateur judiciaire - Responsabilité - Contrat en cours - Loyers impayés - Liquidation judiciaire - Résiliation du contrat - Défaut - Portée.

2° Justifie légalement la décision d'écarter toute responsabilité de l'administrateur pour le non-paiement des loyers résultant de la poursuite du contrat la cour d'appel qui retient que l'administrateur avait demandé le prononcé de la liquidation judiciaire et que le cocontractant qui ne pouvait ignorer le prononcé de cette liquidation n'a pris aucune initiative concernant la résiliation du contrat.


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 12 juin 2001


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 13 mai. 2003, pourvoi n°01-15572, Bull. civ. 2003 IV N° 77 p. 87
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2003 IV N° 77 p. 87

Composition du Tribunal
Président : M. Tricot .
Avocat général : M. Jobard.
Rapporteur ?: Mme Aubert.
Avocat(s) : la SCP Waquet, Farge et Hazan, la SCP Baraduc et Duhamel.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:01.15572
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