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30/04/2003 | FRANCE | N°01-88683

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 30 avril 2003, 01-88683


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trente avril deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller DESGRANGE, les observations de la société civile professionnelle GATINEAU et de Me FOUSSARD, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Loïc,

- LA SOCIETE LOIC X... DIFFUSION,

- LA SOCIETE TRB INTERNATIONAL,

contre l'ordonnance du présid

ent du tribunal de grande instance de DRAGUIGNAN, en date du 18 septembre 2001, qui a autorisé l'adminis...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trente avril deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller DESGRANGE, les observations de la société civile professionnelle GATINEAU et de Me FOUSSARD, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Loïc,

- LA SOCIETE LOIC X... DIFFUSION,

- LA SOCIETE TRB INTERNATIONAL,

contre l'ordonnance du président du tribunal de grande instance de DRAGUIGNAN, en date du 18 septembre 2001, qui a autorisé l'administration des Impôts à effectuer des opérations de visite et saisie de documents, en vue de rechercher la preuve d'une fraude fiscale ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 16 B et R. 16 B-1 du Livre des procédures fiscales, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'ordonnance attaquée a autorisé les visites et saisies dans les locaux susceptibles d'être occupés par la société TRB International et/ou Loïc X..., ... ;

"alors, que toute pièce présentée au juge saisi d'une demande d'autorisation de visites et saisies, doit pouvoir être consultée par les parties ; qu'en l'espèce, les habilitations des agents de l'administration fiscale autorisés à procéder aux visites domiciliaires litigieuses ne figurent pas au dossier transmis au greffe de la Cour de Cassation et n'ont pu être communiquées par le tribunal ayant autorisé ces visites, de sorte que les demandeurs au pourvoi n'ont pas été mis en mesure d'en vérifier le contenu et de s'inscrire en faux, le cas échéant, contre les constatations personnelles du juge ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 16 B du Livre des procédures fiscales, 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'ordonnance attaquée a autorisé les visites et saisies dans les locaux susceptibles d'être occupés par la société BRM, ... ;

"aux motifs que, les pièces produites avaient une apparence apparemment licite ; que la société BRM était immatriculée au registre du commerce des sociétés de Paris depuis le 18 décembre 1991 pour une activité d'audits, études et conseils, prises de participation, gestion, administration, assistance aux entreprises, développement, commercialisation de toutes techniques, de tous produits, plus particulièrement dans le domaine du prêt-à-porter ; qu'elle était dirigée par Loïc X..., domicilié ... à Paris, en qualité de président directeur général ; que cette adresse correspondait au domicile de Loïc X... et de son épouse ; que l'enseigne commerciale de la société BRM était Loïc X... Diffusion ; que la société BRM était située ... à Paris et disposait de locaux professionnels sis ... à Paris ; qu'elle disposait d'une ligne téléphonique dans un local situé ... à Saint-Tropez ; que, suivant la délibération n 98174 du 20 juillet 1998, du conseil municipal de la ville de Saint-Tropez, l'impasse Paul Roussel est devenue à partir de cette date rue du parc des lices ; que Loïc X... avait apporté à la société BRM, lors de sa constitution, 499 parts de la SARL Loïc X... Diffusion ; que cette dernière était immatriculée pour une activité d'achat, vente, fabrication, représentation en tant qu'agent, distribution, importation, exportation de prêt-à-porter, de confection, de chaussures, de maroquinerie ; que, dirigée par Loïc X... en qualité de gérant, elle était située ... à Paris ; qu'en outre, elle était immatriculée auprès du registre spécial des agents commerciaux depuis le 6 avril 1992 pour une activité d'achat, vente, fabrication, représentation en tant qu'agent, distribution, importation, exportation de prêt-à-porter, de confection, de chaussures, de maroquinerie, de tissus et de tout ce qui se rapporte à l'habillement, agent commercial ;

qu'elle semblait disposer d'un abonnement téléphonique ... à Paris ; qu'elle était cotitulaire des onze marques suivantes Vilebrequin collectionneurs de soleil, Points cardinaux, V, une marque figurative, Vilebrequin, Permanent Jacket, Permanent shoes, Permanent pant, Permanent shirt, Permanent store, Vilebrequin, Vilebrequin ; qu'elle avait cédé le 30 mai 1996 les marques Vilebrequin, Points cardinaux et Vilebrequin collectionneur de soleil (n 95/595513, 96/620229, 96/620230, 96/646232) à la société TRB Holding, de droit luxembourgeois sise 35 rue Glesener à Luxembourg, moyennant le prix de 150 000 francs français et le versement de 2 % du montant des redevances perçues jusqu'au 31 décembre 1998 (pièces n 9A et n 9B) ; qu'elle était titulaire de deux comptes bancaires ouverts à la Banque générale du commerce et au Crédit du Nord ; que l'immatriculation, la détention de marques et de comptes bancaires et l'obligation contractuelle de versement de redevance jusqu'au 31 décembre 1998 permettaient de présumer que cette société avait encaissé des recettes commerciales et des redevances d'exploitation de marques ; qu'elle n'était, toutefois, plus prise en compte fiscalement depuis le 31 décembre 1996 au centre des Impôts de Vendôme territorialement compétent ; que, dès lors, il pouvait être présumé que la société Loïc X... Diffusion exerçait une activité commerciale en s'abstenant de respecter ses obligations fiscales déclaratives ;

1 ) "alors que le juge qui autorise des visites et saisies à la requête de l'administration fiscale doit vérifier de manière concrète le bien-fondé de la demande de l'administration fiscale à partir des éléments fournis par cette dernière ; qu'en rendant une ordonnance dans des termes strictement identiques à une décision distincte prononcée quelques jours plus tôt par une juridiction différente, ce dont il résulte que le magistrat, qui l'a signée sans en être l'auteur, n'a procédé personnellement à aucune vérification concrète des suspicions de l'Administration, le président du tribunal a méconnu les textes visés au moyen ;

2 ) "alors que le juge ne peut fonder son autorisation de procéder à une visite domiciliaire sur des présomptions de fraudes afférentes à des exercices prescrits ; qu'en retenant, pour autoriser les visites et saisies sollicitées en 2001 par l'administration fiscale, que la société Loïc X... Diffusion avait cédé, le 30 mai 1996, des marques lui appartenant moyennant le prix de 150 000 francs et le versement de 2% du montant des redevances perçues jusqu'au 31 décembre 1998, le président du tribunal qui s'est essentiellement fondé sur des exercices manifestement prescrits, n'a pas légalement justifié sa décision ;

3 ) "alors que le juge qui autorise des visites et saisies à la requête de l'administration fiscale, doit vérifier de manière concrète que les éléments qui lui sont présentés font effectivement présumer la fraude alléguée ; qu'il ne peut, en particulier, présumer que des revenus n'ont pas été déclarés, sans rechercher s'il peut être effectivement présumé qu'ils ont été réellement perçus ; qu'en énonçant, pour caractériser des présomptions de fraude fiscale à l'encontre de la société Loïc X... Diffusion, que la cession de ses marques par cette dernière avait eu pour contrepartie "le versement de 2 % du montant des redevances perçues jusqu'au 31 décembre 1998 (pièces 9A et 9B)", quand ces pièces ne permettaient nullement d'établir, ni même de présumer que des redevances avaient été perçues jusqu'au 31 décembre 1998 et que la société Loïc X... Diffusion avait reçu un pourcentage de ces redevances, le président du tribunal n'a pas légalement justifié sa décision ;

4 ) "alors que, les visites et saisies opérées sur le fondement de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales, pour être étroitement proportionnées au but légitime recherché, doivent circonscrire l'objet de la mesure autorisée ; qu'en ne limitant aucunement dans le temps le champ des investigations autorisées et en permettant ainsi la saisie de tous documents, y compris ceux ne pouvant être d'aucune utilité pour l'Administration, le président du tribunal, qui a autorisé une mesure disproportionnée au but légitime recherché et qui n'était pas nécessaire à la protection des intérêts énumérés par l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, a méconnu les textes visés au moyen" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'ordonnance attaquée mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer qu'elle n'encourt pas les griefs allégués ;

Que, d'une part, le juge, en énonçant dans le dispositif de l'ordonnance que les copies des habilitations nominatives des agents autorisés lui avaient été présentées, a satisfait aux exigences légales ;

Que, d'autre part, les motifs et le dispositif de l'ordonnance sont réputés être établis par le juge qui l'a rendue et signée ; que les circonstances qu'une requête ait été déposée et une décision rendue visant les mêmes contribuables, par un autre magistrat dans la limite de sa compétence, est sans incidence sur la régularité de la décision attaquée ;

Qu'en outre, si les textes visés au moyen ne permettent pas de rapporter la preuve d'agissements couverts par la prescription, ils ne lui interdisent pas de retenir, comme éléments de prescription de faits non prescrits, des documents datant de plus de trois ans, l'acquisition éventuelle de la prescription de ces faits ne pouvant être invoquée que dans une instance engagée au fond sur les résultats de la mesure autorisée ;

Que, de surcroît, le juge s'étant référé, en les analysant, aux éléments d'information fournis par l'Administration, a souverainement apprécié l'existence de présomptions d'agissements justifiant les mesures autorisées ;

Qu'enfin, la protection des droits de l'homme au sens de la Convention européenne des droits de l'homme, est assurée tant par l'intervention du juge qui vérifie le bien-fondé de la requête de l'administration des Impôts que par le contrôle de la Cour de Cassation ; que les dispositions de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ne sont donc pas contraires à celles de l'article 8 de ladite Convention ;

D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;

Et attendu que l'ordonnance attaquée est régulière en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Desgrange conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Lambert ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 01-88683
Date de la décision : 30/04/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Ordonnance du président du tribunal de grande instance de DRAGUIGNAN, 18 septembre 2001


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 30 avr. 2003, pourvoi n°01-88683


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:01.88683
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