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24/04/2003 | FRANCE | N°00-16895;00-18457

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 24 avril 2003, 00-16895 et suivant


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° s Q 00-16.895 et N 00-18.457 ;

Donne acte à l'Institut national des arts divinatoires de ce qu'il s'est désisté de son pourvoi n° N 00-18.457 en tant que dirigé contre M. X... ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° N 00-18.457 :

Vu les articles 11 de la Déclaration des droits de l'homme, 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 29 de la loi du 29 juillet 1881 et 1382 du Code c

ivil ;

Attendu que les appréciations, même excessives, touchant les produits, les servi...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° s Q 00-16.895 et N 00-18.457 ;

Donne acte à l'Institut national des arts divinatoires de ce qu'il s'est désisté de son pourvoi n° N 00-18.457 en tant que dirigé contre M. X... ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° N 00-18.457 :

Vu les articles 11 de la Déclaration des droits de l'homme, 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 29 de la loi du 29 juillet 1881 et 1382 du Code civil ;

Attendu que les appréciations, même excessives, touchant les produits, les services ou les prestations d'une entreprise industrielle ou commerciale sont libres, dès lors qu'elles ne concernent pas la personne physique ou morale ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué que l'association Institut national des arts divinatoires (l'INAD) exploite un service minitel, à l'adresse 3617 INAD comportant diverses rubriques, dont un "guide pratique du parfait charlatan", une "sélection INAD des professionnels", et une liste "des professionnels que l'on peut ne pas consulter" ; que se plaignant d'être mentionnée sur cette liste, la société Cristal Voyance a fait assigner devant le tribunal de grande instance, en réparation d'un dénigrement fautif, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, l'INAD, et la société Pictures on Line (la société), dont le centre serveur hébergeait le service télétel de l'INAD ; que le Tribunal a condamné in solidum l'INAD et la société à verser une somme, à titre de dommages-intérêts, à la société Cristal Voyance, a ordonné l'omission de celle-ci de la liste litigieuse, et la publication de la décision dans un organe de presse ;

Attendu que pour condamner l'INAD, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, l'arrêt se réfère à un constat d'huissier du 25 novembre 1997 et retient que l'INAD a sélectionné, d'une part, les professionnels qui "répondent à des critères de moralité et de compétence certaine dans le domaine de la voyance", d'autre part les "professionnels que l'on peut ne pas consulter", parmi lesquels il a inscrit la société Cristal Voyance ; que l'inscription de la société Cristal Voyance dans la liste des "professionnels qu'on peut ne pas consulter" met implicitement mais nécessairement en cause la moralité et les compétences de ce professionnel ; que si l'INAD dispose d'un droit de critique, il ne saurait en faire un usage abusif en méconnaissant l'obligation de prudence et d'objectivité, qui s'impose à l'occasion de la diffusion d'informations qualitatives ; que par suite, il ne saurait être admis que l'INAD, sous le couvert de défense de la moralité d'une profession, écarte des professionnels qu'il estime non recommandables sans justifier d'une enquête sérieuse et de critères objectifs l'autorisant à se prévaloir des abus dénoncés ; que la demande de remboursement des sommes versées par une cliente mécontente en l'absence de résultat ne saurait suffire à caractériser les actes pénalement répréhensibles, que l'INAD impute à la défenderesse ; que le fait que la société Cristal Voyance rembourse ses clients insatisfaits ne saurait être retenu à sa charge, mais s'explique en raison de l'absence de certitude entourant le domaine de la voyance ;

Qu'en déduisant de ces constatations et énonciations que le dénigrement outrepassait le droit de libre critique, alors que la réputation de la société Cristal Voyance n'était pas elle-même atteinte par la publication incriminée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et vu l'article 627 du nouveau Code de procédure civile, attendu qu'il y a lieu de mettre fin au litige en appliquant la règle de droit appropriée ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen unique du pourvoi n° Q 00-16.895 :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 avril 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Déboute la société Cristal Voyance de ses demandes ;

Met à la charge de la société Cristal Voyance les frais exposés devant les juges du fond et les dépens devant la Cour de Cassation ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de la société Pictures on Line, de la société Cristal Voyance et de l'Institut national des arts divinatoires ;

Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre avril deux mille trois.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 00-16895;00-18457
Date de la décision : 24/04/2003
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Analyses

PRESSE - Abus de la liberté d'expression - Définition - Diffamation - Allégation ou imputation portant atteinte à l'honneur ou à la considération d'une personne - Produits, services ou prestations d'une entreprise industrielle ou commerciale - Exclusion .

PRESSE - Abus de la liberté d'expression - Définition - Diffamation - Allégation ou imputation portant atteinte à l'honneur ou à la considération d'une personne - Services de voyance (non)

Les appréciations, mêmes excessives, touchant les produits, les services ou les prestations d'une entreprise industrielle ou commerciale sont libres, dès lors qu'elles ne concernent pas la personne physique ou morale. Tel est le cas de la critique des services de voyance.


Références :

Code civil 1382
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales art. 10
Déclaration des droits de l'homme art. 11
loi du 29 juillet 1881 art. 29

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 28 avril 2000

A RAPPROCHER : Chambre civile 2, 2003-01-23, Bulletin 2003, II, n° 15 (1), p. 12 (cassation)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 24 avr. 2003, pourvoi n°00-16895;00-18457, Bull. civ. 2003 II N° 112 p. 95
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2003 II N° 112 p. 95

Composition du Tribunal
Président : M. Ancel .
Avocat général : M. Joinet.
Rapporteur ?: M. Guerder.
Avocat(s) : M. Balat, la SCP Delaporte, Briard et Trichet, la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:00.16895
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