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02/04/2003 | FRANCE | N°02-85974

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 02 avril 2003, 02-85974


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le deux avril deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller ROGNON, les observations de la société civile professionnelle GHESTIN, la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Danielle,

contre l'arrêt de la cour d'appel de CHAMBERY, chambre correctionnelle, en d

ate du 4 juillet 2002, qui, pour abus de confiance, l'a condamnée à 2 ans d'emprisonnem...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le deux avril deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller ROGNON, les observations de la société civile professionnelle GHESTIN, la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Danielle,

contre l'arrêt de la cour d'appel de CHAMBERY, chambre correctionnelle, en date du 4 juillet 2002, qui, pour abus de confiance, l'a condamnée à 2 ans d'emprisonnement dont 18 mois avec sursis et mise à l'épreuve et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-3, 314-1 et 314-10 du Code pénal et de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Danielle X... coupable du délit d'abus de confiance et l'a condamné à une peine d'emprisonnement de 2 ans dont 18 mois avec sursis et mise à l'épreuve ainsi qu'à des réparations au profit des parties civiles ;

"aux motifs que Danielle X... a exercé des fonctions de responsable bénévole du centre de distribution d'Annemasse depuis 1989 puis de directrice salariée de la Maison Y... à partir du mois de juin 1995 ; qu'il lui est reproché d'avoir commis des malversations en détournant des sommes provenant de collectes, dons ou participation imposée aux hébergés, en profitant encore à titre personnel de marchandises et mobiliers appartenant à l'Association ; qu'elle conteste les faits en soutenant que l'intégralité des sommes a servi au fonctionnement du Centre d'hébergement ou ont été remises à Roger Z... qui se rendait régulièrement à Annemasse pour récupérer l'argent collecté ; qu'elle distribuait aux personnes dans le besoin les marchandises emportées ; que cependant ces déclarations sont invérifiables et sont contredites par les témoignages de nombreuses personnes et les explications des co-prévenus Roger Z... et Jean-Marc A... ; qu'il résulte de l'audition de témoins que Danielle X... a reçu des dons en espèces sans aucun récépissé ni enregistrement ; qu'ainsi Mme B... a déclaré que les dons en espèce étaient remis à Annemasse mais n'étaient jamais consignés sur un registre ni comptabilisés ; qu'ils étaient placés dans un tiroir dont elle avait seule accès ; que d'autres témoins ont confirmé ces propos ; que des collectes de fonds ont été organisés au moins jusqu'en 1997 ;

que les urnes étaient ramenés au centre d'Annemasse où Danielle X... procédait seule à la récupération et au comptage des sommes ; qu'il n'a pas été trouvé trace de ces collectes et de ces dons dans la comptabilité de l'association ; que divers témoins ont attesté de ces faits ; que si elle soutient que ces fonds ont été récupérés par Roger Z..., cette affirmation est contredite par plusieurs personnes et notamment par M. C... qui confirme que Roger Z... n'est venu récupérer lui-même ces urnes qu'à partir de la fin de l'année 1997 ; que s'agissant des tirelires, Roger Z... conteste formellement en avoir reçu le produit ; que, sur la dîme imposée aux hébergés, il est établi par les aveux de Danielle X... et les témoins que les hébergés de la Maison Y... devaient verser une participation de 10 francs par nuitée ; que seule la somme de 10 092,85 francs a été répertoriée dans le journal des comptes sur trois ans et demi ce qui correspond à un ratio de versement de 2,58 % ;

que Danielle X... explique que fort peu d'hébergé versait cette contribution ; qu'il ressort cependant des auditions nombreuses et concordantes des bénévoles que Danielle X... veillait au versement effectif de cette contribution ; qu'une affiche avait été placée à sa demande à l'entrée du centre pour rappeler le caractère obligatoire de cette obole ; que les sommes étaient mises dans une urne fermée par un cadenas ; que Danielle X... relevait la caisse sans qu'aucune comptabilité ne soit tenue ; que sur l'opération La Tune de Coeur, le journaliste de la Tribune de Genève s'est rendu à la Maison Y... en 1995 et a remis à Danielle X... la somme de 62 000 francs ; qu'en 1996, 1997 et 1998 la prévenue a été impliquée dans cette même opération ; qu'à chaque fois les fonds ont été ramenés à Annemasse ; qu'en 1999, elle a dépêché M. D... au siège de la Tribune de Genève ; qu'il lui a été remis une enveloppe avec mentionné 5 000 francs ; qu'il a ensuite apporté l'argent à Danielle X... ; qu'elle a envoyé Jean-Marc A... pour récupérer le produit de la collecte soit la somme de 130 000 francs ;

qu'elle conteste avoir détourné quelque somme que ce soit, expliquant que Roger Z... emportait l'argent ; que cependant les fonds provenant de cette opération de bienfaisance, dont aucune trace n'a été relevée en comptabilité, ont été déposés la première année entre ses mains ; qu'au cours des années suivantes ils ont été remis soit en sa présence soit en présence de son concubin M. C... ; qu'en 1999 ils ont été confiés à M. D... puis à Jean-Marc A... ; que tous deux ont confirmé avoir ramené l'argent à Danielle X... ; qu'à chaque fois les fonds ont transité par Annemasse ; que Roger Z... conteste avoir bénéficié de ces fonds ;

qu'il est établi qu'elle a, tout comme Roger Z..., soigneusement dissimulé l'existence de cette opération ; qu'il est ainsi démontré qu'elle a participé de 1995 à 1999 au détournement de l'intégralité de ces fonds ; que sur les détournements de mobiliers et marchandise, de nombreux témoignages précis et concordants établissent que Danielle X... a emporté des denrées alimentaires, des vêtements et du mobilier ; qu'un témoin précise qu'elle se servait de manière régulière des denrées données à la Maison Y... ; qu'elle mettait ces denrées de côté et ne choisissait que des produits de marque ou haut de gamme ; qu'une autre personne ajoute qu'au cours de l'été 1996 elle a constaté la présence de réserves conséquentes qu'il s'agissait de produits du même genre ; que pour se justifier Danielle X... soutient qu'elle faisait le tour des squatts d'Annemasse et qu'elle distribuait ainsi la marchandise ; que cependant la prévenue n'avait pas reçu une telle mission et aucun témoignage ne vient étayer cette affirmation ; qu'aucun bénévole n'en a parlé ni n'a été appelé à y participer ; que les déclarations de Danielle X... apparaissent parfaitement fantaisistes ; que l'enquête a relevé le grand train de vie de la prévenue que si sa manière de vivre peut s'expliquer en partie par l'importance des sommes versées en liquide par son mari puis par son amant, on peut s'interroger sur le fait que ce dernier ait versé sur les comptes de Danielle X... l'intégralité de ses revenus et sur le fait que certaines rentrées d'argent ne pouvaient pas correspondre à des versements de M. C... ; que, d'autre part, le montant des versements en liquide excédait parfois la totalité des revenus de ce dernier (arrêt attaqué p. 7, 8, 9) ;

"1 l alors que le délit d'abus de confiance n'est caractérisé que si son auteur a détourné des fonds ou valeurs qui lui ont été remis à charge de les rendre, de les représenter ou d'en faire un usage déterminé ; que la cour d'appel a relevé à propos de Roger Z... que, de 1996 à 1998, il s'était vu remettre à l'occasion de l'opération dite "la thune du coeur" le fruit des collectes par la Tribune de Genève pour un montant de 477 000 francs ; qu'elle a, par ailleurs, relevé que Danielle X... avait été "impliquée" en 1996, 1997 et 1998 dans cette opération organisée en Suisse car, pendant ces trois années, les fonds avaient été remis en sa présence ou en présence de son concubin ; qu'en énonçant qu'elle avait ainsi participé au détournement de l'intégralité des sommes remises par la Tribune de Genève sans caractériser aucun des éléments matériels, notamment la remise des fonds, et intentionnel du délit reproché, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"2 l alors que Danielle X... a soutenu dans ses conclusions d'appel (p. 10, 11, 16, 17) que, avant comme après 1997, c'était Roger Z... qui récupérait les urnes collectées ou leur produit, qu'il venait au moins une fois par semaine à Annemasse, sinon tous les soirs ; qu'elle a cité plusieurs témoins confirmant ses dires et le fait que Roger Z... contrôlait toutes les opérations et gérait seul les entrées et sorties d'argent ; qu'en se bornant à relever que plusieurs personnes dont M. C... contredisaient ces affirmations sans citer l'identité de ces "personnes" ni la teneur de leurs déclarations et sans faire état ni analyser les témoignages invoqués par Danielle X... en sa faveur, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"3 l alors que Danielle X... s'était fondée sur les conclusions des enquêteurs qui avaient examiné les mouvements de fonds sur son compte bancaire et qui avaient conclu qu'ils avaient tous été justifiés et que "l'analyse des comptes de Danielle X... comparés aux diverses auditions ne fait apparaître formellement aucun détournement soit en espèces soit par chèques" ; qu'elle avait notamment rappelé que son mari, puis après son divorce, M. C... avec qui elle vivait maritalement, versaient l'intégralité de leurs salaires sur ses comptes, ce que ce dernier avait confirmé au cours de l'instruction ; qu'il s'y ajoutait ses propres salaires, des remboursements de frais et le produit de son activité de brocante ; qu'en se bornant à "s'interroger" sur le fait que MM. E... et C... aient pu verser leurs revenus sur le compte bancaire de Danielle X... et à relever que les versements en espèces excédaient parfois les revenus de M. C... sans réfuter le moyen des conclusions d'appel apportant la démonstration de l'origine non frauduleuse de ces versements, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit d'abus de confiance dont elle a déclaré la prévenue coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit des parties civiles, des indemnités propres à réparer le préjudice en découlant ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

CONDAMNE Danielle X... à payer à l'association Les Restaurants du Coeur de Haute-Savoie et à l'association nationale Les Restos du Coeur- Les Relais du Coeur la somme de 1 000 euros chacune au titre de l'article 618-1 du Code de procédure pénale ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Rognon conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-85974
Date de la décision : 02/04/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de CHAMBERY, chambre correctionnelle, 04 juillet 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 02 avr. 2003, pourvoi n°02-85974


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.85974
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