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25/03/2003 | FRANCE | N°02-83832

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 25 mars 2003, 02-83832


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-cinq mars deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller ANZANI, les observations de la société civile professionnelle NICOLAY et de LANOUVELLE, de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE et de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Io

n,

- Y... Lazar,

- Z... Gheorghe,

- A... Marin,

contre l'arrêt de la cour d'appel de...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-cinq mars deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller ANZANI, les observations de la société civile professionnelle NICOLAY et de LANOUVELLE, de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE et de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Ion,

- Y... Lazar,

- Z... Gheorghe,

- A... Marin,

contre l'arrêt de la cour d'appel de ROUEN, chambre correctionnelle, en date du 18 avril 2002, qui les a condamnés pour vol aggravé, à 10 ans d'emprisonnement en portant la durée de la période de sûreté aux deux tiers de la peine, à l'interdiction définitive du territoire français, et a prononcé sur l'action civile ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé pour Ion X..., pris de la violation des articles 407, 512, 593 du Code de procédure pénale, manque de base légale ;

"en ce qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que les prévenus ne parlant pas la langue française, le président a désigné deux interprètes en langue roumaine et leur a fait prêter serment ;

"alors que, dans le cas où le prévenu ou le témoin ne parle pas suffisamment la langue française, le président désigne d'office un interprète, et il doit être constaté que l'interprète a prêté son concours chaque fois que cela a été nécessaire ; que dès lors, en l'état de ces seules constatations, il n'est pas établi que les interprètes de langue roumaine aient assisté le prévenu pour tous les actes substantiels des débats" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, que, lors de l'audience des débats, les prévenus ne parlant pas la langue française, deux interprètes, qui ont prêté serment d'apporter leur concours à la justice en leur honneur et conscience, ont été désignés par le président ;

que, par ailleurs, l'un de ceux-ci a assisté les prévenus à l'audience à laquelle a été donné lecture de l'arrêt ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations desquelles il résulte que l'interprète a prêté son concours pour tous les actes substantiels des débats, l'arrêt n'encourt pas le grief allégué ;

Que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé pour Gheorghe Z..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 427, 463, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'ordonner les investigations complémentaires sollicitées par les prévenus et a déclaré Gheorghe Z... coupable du délit de vol avec violences ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à 8 jours ;

"aux motifs que Ludovic B... a précisé que les prévenus étaient organisés en équipe et il a donné des détails sur la R 25 et sur une conversation entre Lazar Y... et Marin A... et en présence de Gheorghe Z... à propos d'un cambriolage ; que Lazar Y... a assisté à une discussion entre MM. C..., D... et E... selon laquelle une bagarre aurait éclaté avec un buraliste au cours d'un vol ; qu'outre le fait que ces individus ont disparu ce qui interdit toute investigation complémentaire, cette version est contestée par Gheoghe Z... qui nie avoir été présent lors de cet entretien ;

"alors que, d'une part, l'exigence de l'égalité des armes implique l'obligation d'offrir à chaque partie une possibilité raisonnable de présenter sa cause, y compris ses preuves, dans des conditions qui ne la place pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire ; que la cour d'appel, en refusant le supplément d'information qui était susceptible d'apporter la preuve de la véracité des prétentions des prévenus, a méconnu les textes susvisés ;

"alors que, d'autre part, tout accusé a le droit d'obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge ; qu'en refusant les investigations complémentaires consistant à entendre divers témoins à décharge, les juges du fond ont, derechef, privé leur décision de base légale" ;

Sur le deuxième moyen de cassation, proposé pour Gheorghe Z..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 427, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué n'a pas pris en compte un courrier présenté pour la première fois par les prévenus devant la cour d'appel et a déclaré Gheorghe Z... coupable du délit de vol avec violences ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à 8 jours ;

"aux motifs qu'au cours de la procédure d'appel, un courrier a été remis mettant en cause une voiture Peugeot 405 ; que cette version ne saurait convaincre la cour d'appel vu son caractère tardif et il s'agit d'une concertation entre les intéressés ;

"alors que les juges ne peuvent refuser d'examiner un élément versé aux débats en raison du prétendu caractère tardif de la communication" ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé pour Lazar Y... et Marin A..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 427, 463, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a débouté les prévenus de leur demande d'investigations complémentaires, a déclaré Lazar Y... et Marin A... coupables du chef de vol commis avec violences ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à 8 jours et, en répression, les a condamnés chacun à une peine de 10 ans d'emprisonnement, dont la durée de la période de sûreté a été portée jusqu'aux deux tiers de la peine, outre l'interdiction du territoire français à titre définitif ;

"aux motifs que Lazar Y... a soutenu qu'il avait assisté à une discussion au camp de Mirapolis entre les dénommés C..., D... et E... selon laquelle une bagarre aurait eu lieu avec un buraliste qui se serait réveillé au cours d'un vol et qui aurait été frappé ; qu'outre le fait que ces individus ont disparu en Espagne ou en Roumanie ce qui interdit toute investigation complémentaire, cette version a été contestée par Gheorghes Z... qui, contrairement à ce que soutient Lazar Y..., nie avoir été présent lors de cet entretien ; que d'ailleurs, et à supposer même qu'un véhicule Peugeot 405 ait participé aux faits du 12 janvier 2000, le témoin Patrick F... n'a vu qu'un seul véhicule ; que ce fait n'est pas de nature à occulter la présence certaine de la voiture R 25 sur les lieux et de combattre efficacement l'ensemble des très nombreux autres éléments probants et convaincants qui imposent de retenir la culpabilité des prévenus ; que dès lors il ne sera pas satisfait à la demande des prévenus et notamment de Lazar Y... tendant à ce qu'il soit procédé à des investigations complémentaires ;

"alors que l'égalité des armes implique l'obligation d'offrir à chaque partie une possibilité raisonnable de présenter sa cause, y compris ses preuves, dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire ; qu'en s'abstenant dès lors de faire droit à la demande d'investigations complémentaires formulée notamment par Lazar Y..., lesquelles étaient pourtant susceptibles d'établir la véracité des arguments de défense invoqués par les prévenus s'agissant de la présence de traces de sang dans un véhicule Peugeot 405 actuellement détenu par la gendarmerie de Pontoise, la cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble les droits de la défense" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, d'une part, l'opportunité d'ordonner une mesure complémentaire d'instruction est une question de pur fait qui échappe au contrôle de la Cour de Cassation ; que, d'autre part, contrairement à ce qui est allégué, il résulte des énonciations de l'arrêt que la cour d'appel a apprécié la pertinence des documents que Gheorghe Z... a produits devant elle ;

D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;

Sur le second moyen de cassation, proposé pour Ion X..., pris de la violation des articles 6.3 de la Convention européenne des droits de l'homme, 121-1, 121-6, 121-7, 311-1, 311-4, 311-6 du Code pénal, défaut de motifs et manque de base légale

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable de vol en réunion et avec violences ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours ;

"aux motifs que les prévenus nient les faits qui leur sont reprochés, soutiennent que les auteurs auraient utilisé un véhicule automobile 405 de couleur bleue et sollicitent en conséquence leur relaxe ; qu'il ressort de l'enquête préliminaire, de l'information et des débats que Roger G... a, dans la nuit du 11 au 12 janvier 2000, été victime d'une agression alors qu'il se reposait dans son logement situé au-dessus du bureau de tabac-presse dont il était exploitant à Gaillefontaine ; que parmi les objets qui lui étaient dérobés dans le courant de cette même nuit figuraient, outre l'argent de la recette, des cigarettes, des tickets de grattage et des recharges pour téléphone mobile dites "mobicartes" ; que l'enquête s'orientait sur la population non sédentarisée d'origine roumaine installée dans les camps de Mirapolis à Cergy, où diverses interpellations avaient été effectuées en février 2000 dans le cadre d'une association de malfaiteurs ; que les investigations devaient se poursuivre au camp de Bessancourt sur lequel la communauté roumaine s'était fixée après la vague d'arrestations pratiquée au camp de Mirapolis ; qu'un témoin, Patrick F..., à qui était présentée la R 25 dont était propriétaire l'un des prévenus, Marin A..., devait reconnaître formellement cette voiture comme étant celle qu'il avait remarquée à l'arrêt, inoccupée et feux allumés, garée non loin du commerce de Roger G... dans la soirée du 11 janvier 2000 ; que les auditions auxquelles il était alors procédé mettaient à jour le fait que la R 25, si le certificat de vente du 28 novembre 1999 était établi au nom de Marin A..., avait été en réalité achetée par un ensemble de personnes qui l'affectaient à une utilisation commune ; que, parmi les propriétaires indivis ou utilisateurs en commun de ce véhicule étaient cités, aux côtés de Marin A..., Lazar Y..., Gheorghe Z... et Ion X... ; que, le 29 janvier 2000, la voiture avait d'ailleurs fait l'objet d'un contrôle de police, alors que se trouvaient à son bord Marin A..., Ion X... et Lazar Y... ; que les prévenus sont présentés chacun par plusieurs témoins comme des voleurs d'habitude formant des bandes spécialisées dans le cambriolage de domiciles privés et surtout de débits de tabac ; que, pour soutenir leur innocence, les prévenus contestent d'une part le témoignage de M. F... en ce qu'il a vu, le soir des faits, un véhicule Renault 25 stationné à proximité du commerce de Roger G..., le témoignage à charge de Ludovic B..., l'utilisation dans les conditions décrites des téléphones portables et d'autre part affirment l'existence d'un véhicule 405 de couleur bleue qui aurait servi de transports aux auteurs réels des faits dont ils n'ont pas quant à présent, donné les identités par crainte de représailles ou par solidarité ; qu'il

est cependant formellement démontré que le véhicule incriminé R 25 était sur place et qu'il a été déclaré par Elena H... comme appartenant à A... Marin, ce qu'a confirmé Saleem Munir, son précédent propriétaire qui a présenté un double du certificat de vente établi en ce sens ; qu'il résulte de nombreuses déclarations que les véhicules, de même d'ailleurs que les téléphones portables, étaient utilisés par les divers membres de la communauté, lesquels, en ce qui concerne les voitures, les achetaient en commun, et notamment pour la R 25 par A... Marin mais également par Ion X... et Lazar Y... d'ailleurs filmé la conduisant, par les services de gendarmerie ; que tous trois ont fait également l'objet d'un contrôle par la police de Cergy le 29 janvier 2000, alors qu'ils étaient dans cette voiture ; qu'il est à noter que Eléna H... a fourni des détails sur la perte des clés de contact de la R 25 et la mise à nue des fils pour la démarrer, qui se sont avérés exacts, ce qui rend son témoignage également crédible . que les dires du témoin Ludovic B..., contestés pour ses contradictions par les prévenus, sont exactement corroborés notamment en ce qui concerne l'utilisation de son téléphone par I..., par les relevés des appels établis par les services de France Télécom ; que l'intéressé après avoir prévenu qu'il fait l'objet de pressions et indiqué qu'il craignait des représailles, a confirmé ses dires devant le juge d'instruction puis s'est opposé à toute confrontation avec les prévenus ; que mis en présence des mis en cause, s'il s'est alors violemment refusé à reprendre certaines de ses déclarations, il a néanmoins maintenu nombre d'entre elles; qu'il n'est pas indifférent de relever qu'un Roumain, Gari J..., a confirmé l'existence d'équipes de pilleurs de bureaux de tabac et reconnu sur photographie les prévenus ; que Gari J..., Stoian J..., voire Lazar Y... lui-même, ont décrit les intéressés comme de tels voleurs ; qu'à supposer même qu'un véhicule Peugeot 405 ait participé aux faits du 12 janvier 2000, étant rappelé que le témoin F... n'a vu qu'un seul véhicule, ce fait n'est pas de nature à occulter la présence certaine de la voiture R 25 sur les lieux et à combattre efficacement l'ensemble des très nombreux autres éléments probants et convaincants qui imposent de retenir la culpabilité des quatre prévenus ; que dès lors, il ne sera pas satisfait à la demande des prévenus et notamment de Lazar Y... tendant à ce qu'il soit procédé à des investigations complémentaires ;

"alors que, d'une part, en déduisant de ces seules considérations l'existence d'un vol avec violences commis en réunion, sans indiquer toutes les circonstances exigées pour que le fait poursuivi soit punissable et sans préciser notamment en quoi le prévenu, Ion X..., doit être tenu pour coauteur ou complice du vol avec violences commis en réunion de plusieurs personnes, la cour d'appel n'a pas caractérisé le délit de vol prévu par les articles 311-4 et 311-6 du Code pénal ;

"alors que, d' autre part, en déclarant le prévenu coupable de vol avec violences ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours, sans constater la nature et la gravité des violences exercées, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision" ;

Sur le troisième moyen de cassation, proposé pour Gheorghe Z..., pris de la violation des articles 121-1, 121-4, 121-6, 121-7, 311-1, 311-6, 311-11 du Code pénal, 591, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Gheorghe Z... coupable de vol avec violences ayant entraîné une incapacité totale de travail de plus de 8 jours ;

"aux motifs que l'identification par leur numéro de certaines des cartes volées permettait d'identifier les titulaires des téléphones portables ayant activé ces recharges, soit Lorédana K..., Ludovic B..., Florina H..., Hubert L..., Violeta M... et Stéphane N... ; que les renseignements fournis par France Télécom permettaient de circonscrire le lieu d'activation des recharges et orientaient les enquêteurs sur la population d'origine roumaine installée dans les camps de Mirapolis à Cergy ; que Florina H... révélait que Marin A... était propriétaire d'une R 25 grise dont les caractéristiques s'accordaient aux déclarations du témoin Patrick F... qui l'a formellement reconnue comme étant celle garée non loin du commerce de Roger G... dans la soirée du 11 janvier 2000 ; que cette voiture avait été en réalité achetée par Marin A..., Lazar Y..., Gheorghe Z... et Ion X... ; que Ludovic B... indiquait que, dans la matinée du 12 janvier 2000, il avait été témoin d'une conversation entre Marin A... et Lazar Y... qui évoquaient un cambriolage au cours duquel ils avaient du frapper une personne, ces propos se tenant en présence de Gheorghe Z... ; que 6 mobicartes dérobées étaient utilisées dans la journée du 12 janvier 2000 sur le téléphone détenu par Gheorghe Z... et notamment à destination de sa concubine ; que le téléphone de Hubert L... avait été activé par une mobicarte dérobée à Roger G... et servait à appeler en Roumanie un voisin d'Ion X... ; que les prévenus sont présentés comme des voleurs d'habitude par plusieurs témoins ; que les prévenus contestaient le témoignage de Patrick F... et affirmaient qu'un véhicule 405 de couleur bleu aurait servi de transport aux auteurs réels des faits dont ils n'ont pas donné les identités par crainte de représailles ;

que, contrairement à ce qui est allégué, Patrick F... a formellement identifié le véhicule, et que le fait que d'autres véhicules aient pu circuler ne retire rien à la crédibilité du témoin et qu'aucune autre voiture n'est mentionné par ce témoin ; qu'il est ainsi formellement démontré que le véhicule R 25 était sur place et qu'il a été déclaré comme appartenant à Marin A... et était utilisé en outre par Ion X... et Lazar Y... ; que ce dernier a soutenu qu'il avait assisté à une discussion au camp de Mirapolis entre les dénommés C..., D... et E... selon laquelle une bagarre aurait eu lieu au cours d'un vol et que Gheorghe Z... nie avoir été présent à cet entretien ; qu'un courrier intercepté permet de se convaincre que Gheorghe Z... s'adressait à Marin A... et Ion X... et leur donnait des instructions quant aux déclarations à faire pour mettre en cause un véhicule Peugeot 405 ;

que cette version ne saurait convaincre la cour au regard de son caractère tardif et qu'il s'agit à l'évidence d'une concertation entre les intéressés ; qu'à supposer même qu'un véhicule Peugeot 405 ait participé aux faits, ce fait n'est pas de nature à occulter la présence de la voiture R 25 et de combattre efficacement les très nombreux éléments probants et convaincants ;

"alors, d'une part, que pour entrer en voie de condamnation à l'encontre d'une personne pour une infraction commise par plusieurs, les juges doivent constater la participation personnelle de chacun des prévenus ; qu'en se bornant à déduire des éléments de faits constitutifs d'un vol avec violences commis par plusieurs personnes, la participation personnelle de Gheorghe Z... sans préciser en quoi ce prévenu doit être tenu pour coauteur ou complice de cette infraction, la cour d'appel n'a pas caractérisé le délit de vol avec violences à son encontre ;

"alors, d'autre part, que pour condamner le prévenu coupable de vol avec violences ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à 8 jours, la cour d'appel devait constater la nature et la gravité des violences exercées ; en s'abstenant d'une telle constatation, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;

Sur le deuxième moyen de cassation, proposé pour Lazar Y... et Marin A..., pris de la violation des articles 121-1, 121-4, 121-6, 121-7, 311-1, 311-6, 311-11 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Lazar Y... et Marin A... coupables du chef de vol commis avec violences ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à 8 jours et, en répression, les a condamnés chacun à une peine de 10 ans d'emprisonnement, dont la durée de la période de sûreté a été portée jusqu'aux deux tiers de la peine, outre l'interdiction du territoire français à titre définitif ;

"alors, que d'une part, l'arrêt attaqué qui se borne à constater avec force détails que Lazar Y... et Marin A... seraient propriétaires d'un véhicule R 25 correspondant à la description faite par un témoin d'une voiture se trouvant, le jour du vol, à proximité des lieux du délit et qu'ils auraient utilisés des téléphones portables avec des cartes dérobées sans constater en quoi ils auraient personnellement et effectivement participé à la réalisation du vol et des violences poursuivis et, par suite, en quoi ils devaient en être tenus pour coauteurs ou complices, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des textes susvisés ;

"et alors que, d'autre part, ni le jugement ni l'arrêt attaqué ne constatent quelles violences ont été exercées, ni la nature des blessures qui en sont résultées, en sorte que la peine de dix ans d'emprisonnement prononcée n'est pas légalement justifiée" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré les prévenus coupables, et a ainsi justifié l'allocation, au profit des parties civiles, de l'indemnité propre à réparer le préjudice en découlant ;

D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Sur le quatrième moyen de cassation, proposé pour Gheorghe Z..., pris de la violation des articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, 4 du Protocole n° 7 à cette Convention, 131-30, 311-15 du Code pénal, 591, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Gheorghe Z... à une peine de 10 ans d'emprisonnement et à l'interdiction du territoire français à titre définitif ;

"aux motifs que le maintien en détention des prévenus est nécessaire pour préserver l'ordre public, empêcher le renouvellement des infractions et éviter que les intéressés qui possèdent de fortes attaches familiales en Roumanie ne tentent de se soustraire à l'exécution de leur peine ; que ces mêmes motifs justifient l'interdiction définitive du territoire national ;

"1) alors que l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme consacre le droit au respect de tout individu à sa vie privée et familiale, et l'article 14 de cette même Convention assure la jouissance d'un tel droit sans discrimination ; que, dès lors, la cour d'appel en prononçant une peine d'interdiction du territoire français, a condamné le prévenu à une peine discriminatoire aboutissant à le priver de son droit naturel à mener une vie familiale normale ;

"2) alors que les juges ne peuvent, sous peine de discrimination, condamner un étranger à une double peine, en lui infligeant non seulement une sanction pénale, mais encore une interdiction du territoire, sauf à violer les textes susvisés ;

"3) alors que la juridiction correctionnelle ne peut prononcer l'interdiction du territoire français à l'encontre d'un étranger reconnu coupable de l'une des infractions visées à l'article 311-15 du Code pénal, qu'après avoir spécialement motivé le choix de cette peine au regard de la gravité de l'infraction et de la situation personnelle et familiale de cet étranger conformément à l'article 131- 30 du Code pénal ; qu'en se bornant, pour justifier le choix de la peine d'interdiction du territoire national, à se référer aux motifs justifiant le maintien en détention sans égard pour la situation personnelle et familiale du prévenu, la cour d'appel qui n'a pas motivé spécialement le choix de la peine d'interdiction du territoire national a privé de base légale sa décision" ;

Sur le troisième moyen de cassation, proposé pour Lazar Y... et Marin A..., pris de la violation des articles 8, 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, 4 du protocole n 7 à cette même Convention, 131-30, 311-15 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Lazar Y... et Marin A... chacun à une peine de 10 ans d'emprisonnement, dont la durée de la période de sûreté a été portée jusqu'aux deux tiers de la peine, outre l'interdiction du territoire français à titre définitif ;

"aux motifs que le maintien en détention des prévenus est nécessaire pour préserver l'ordre public, empêcher le renouvellement de l'infraction et éviter que les intéressés qui possèdent de fortes attaches familiales en Roumanie ne tentent de se soustraire à l'exécution de leur peine ; que pour les mêmes motifs et par application des dispositions des articles 311-15 et 131-30 du Code pénal, l'interdiction définitive du territoire français doit être également prononcée contre les prévenus ;

"alors, d'une part, que le juge répressif ne peut, sous peine de discrimination, condamner un étranger à une double peine en lui infligeant tout à la fois une sanction pénale et une interdiction définitive du territoire français, sauf à violer les textes susvisés ;

"alors, d'autre part, que les juridictions correctionnelles ne peuvent prononcer une interdiction du territoire français à l'encontre d'un étranger reconnu coupable de l'une des infractions visées à l'article 311-15 du Code pénal qu'après avoir spécialement motivé le choix de cette peine au regard de la gravité de l'infraction et de la situation personnelle et familiale de cet étranger et ce, conformément à l'article 131-30 du Code pénal ; qu'en se bornant dès lors à justifier le choix de la peine d'interdiction du territoire national à titre définitif à la faveur des seuls motifs justifiant le maintien en détention des prévenus, sans s'en expliquer au regard de la situation personnelle et familiale de chacun d'eux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, pour prononcer à l'encontre des prévenus l'interdiction définitive du territoire français, l'arrêt relève notamment la gravité des faits en raison de la violence particulièrement sauvage qui a été exercée sur la victime et la personnalité des prévenus dont certains ont déjà été condamnés et qui possèdent de fortes attaches familiales en Roumanie ;

Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors qu'au demeurant, aucun des prévenus n'a fait valoir que sa situation personnelle et familiale en France entrait dans les prévisions de l'article 131-30 du Code pénal, la cour d'appel a justifié sa décision tant au regard de ce texte que des dispositions conventionnelles invoquées ;

D'où il suit que les moyens ne peuvent être accueillis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Anzani conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-83832
Date de la décision : 25/03/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

(Sur le premier moyen de Ion AVRAM) JUGEMENTS ET ARRETS - Mentions - Interprète - Assistance des prévenus - Mentions suffisantes.


Références :

Code de procédure pénale 407

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, chambre correctionnelle, 18 avril 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 25 mar. 2003, pourvoi n°02-83832


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.83832
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