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25/03/2003 | FRANCE | N°02-82079

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 25 mars 2003, 02-82079


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-cinq mars deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire DESPORTES, les observations de la société civile professionnelle PEIGNOT et GARREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Patrick-André,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de DIJON, en date du 6 mars 2002, qu

i s'est déclarée incompétente pour ordonner l'exécution d'une décision de confiscation p...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-cinq mars deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire DESPORTES, les observations de la société civile professionnelle PEIGNOT et GARREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Patrick-André,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de DIJON, en date du 6 mars 2002, qui s'est déclarée incompétente pour ordonner l'exécution d'une décision de confiscation prononcée contre lui par une juridiction suisse ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 99 et 593 du Code de procédure pénale, 13 et 27 de la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime en date du 8 novembre 1990, défaut et insuffisance de motifs, manque de base légale ;

"en ce que la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Dijon a rejeté la demande de restitution des véhicules de marques Mercedes (immatriculé 1294 WWB 71) et Citroën (immatriculé 2161 QG 69) présentée par Patrick X... ;

"aux motifs qu' "il résulte des pièces soumises à la Cour que, dans le cadre de la procédure suivie contre lui en Suisse et dans le cadre de laquelle la saisie des véhicules en cause avait été ordonnée, Patrick X... a été condamné par jugement du tribunal correctionnel du district de Boudry devenu définitif, cette juridiction ordonnant, entre autres dispositions, la confiscation des valeurs patrimoniales séquestrées ;

"que la convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime - convention à laquelle la Suisse et la France sont parties et qui apparaît applicable en l'espèce au vu des pièces produites - prévoit l'exécution par la Partie, qui en reçoit la demande de la part d'une autre, des décisions de confiscation émanant d'un tribunal de la partie requérante ;

"qu'elle précise que les procédures permettant d'obtenir et d'exécuter la confiscation sont régies par la loi de la Partie requise ;

"que Patrick X... est en conséquence mal fondé à prétendre au caractère non exécutoire en France de la disposition du jugement du tribunal correctionnel du district de Boudry ordonnant la confiscation des biens séquestrés dans le cadre de l'information judiciaire ;

"qu'aucune disposition légale ou réglementaire française ne donne par contre compétence à la juridiction d'instruction pour poursuivre l'exécution d'une sentence ;

"que l'article 707 du Code de procédure pénale stipule en son alinéa 2 que les poursuites pour le recouvrement des confiscations sont faites au nom du procureur de la République par le percepteur ;

"que la Cour, réformant l'ordonnance déférée, ne peut en conséquence que se déclarer incompétente pour poursuivre le recouvrement des confiscations prononcées par le tribunal correctionnel du district de Boudry, rejeter la demande de restitution à son profit présentée par Patrick X... et renvoyer le dossier au ministère public afin que celui-ci se pourvoie ainsi qu'il avisera" ;

"alors, d'une part, que les juges du fond ne peuvent fonder leur décision sur des motifs hypothétiques ou dubitatifs si bien qu'en rejetant la demande en restitution formée par Patrick X..., concernant les deux véhicules de marques Mercedes et Citroën, en énonçant que la convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime "apparaît applicable en l'espèce" sans vérifier ni caractériser dans quelle mesure la convention en question trouvait bien matière à s'appliquer, la chambre de l'instruction qui a statué par motifs dubitatifs et hypothétiques n'a pas justifié sa décision ;

"alors, d'autre part, que le refus de restitution fondé sur l'existence d'une décision de confiscation d'un Etat partie à la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime, en date du 8 novembre 1990, directement exécutoire sur le sol national, doit se fonder sur une demande en ce sens de la part de l'Etat requérant conforme en outre aux dispositions de l'article 27 de la Convention de sorte qu'en rejetant la demande de Patrick X... en restitution des deux véhicules qui avaient été saisis en 1994 par le magistrat instructeur du tribunal de grande instance de Mâcon en exécution de la commission rogatoire internationale du 7 juillet 1994 émise par le magistrat instructeur suisse, sans rechercher ni l'existence d'une telle demande formulée par l'Etat suisse, ni dans quelle mesure cette demande serait conforme aux dispositions de l'article 27 de ladite convention, la chambre de l'instruction n'a pas justifié légalement sa décision" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'en exécution d'une commission rogatoire internationale délivrée par un juge d'instruction de Neuchâtel (Suisse) dans une procédure suivie contre Patrick-André X..., le juge d'instruction de Mâcon a procédé à la saisie de deux véhicules se trouvant en France ;

que, faisant état d'un jugement devenu définitif, en date du 10 mars 1997, par lequel le tribunal correctionnel de Boudry (Suisse) avait ordonné la confiscation des véhicules saisis, les autorités helvétiques ont demandé aux autorités françaises de mettre à exécution cette mesure en procédant à "la réalisation de ces biens au profit de l'Etat de Neuchâtel après compensation des frais engendrés par la mesure de séquestre" ; que, par ordonnance en date du 27 juin 2002, le juge d'instruction de Mâcon a ordonné la confiscation des deux véhicules saisis et leur remise au service des domaines pour qu'il soit procédé à leur vente ; que Patrick-André X... a interjeté appel de cette ordonnance ; qu'il a soutenu, devant la chambre de l'instruction, que le jugement rendu à l'étranger ne pouvait recevoir exécution en France et que, dès lors, les biens saisis devaient lui être restitués, la procédure étant achevée ;

Attendu que, par l'arrêt attaqué, la chambre de l'instruction, infirmant l'ordonnance entreprise, s'est déclarée incompétente pour "poursuivre le recouvrement de la confiscation" des véhicules saisis ;

qu'après avoir retenu que la décision prise par le tribunal de Boudry était susceptible d'être exécutée en France en application de la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime, les juges énoncent qu'il doit être procédé à cette mise à exécution selon les règles internes de procédure et "qu'aucune disposition légale ou réglementaire française ne donne compétence à la juridiction d'instruction" à cet effet ;

Attendu qu'en prononçant ainsi et abstraction faite de tout autre motif, la chambre de l'instruction qui, en l'état de son incompétence, n'avait à se prononcer, ni sur la régularité de la demande de confiscation présentée par l'Etat étranger, ni sur le mérite de la demande de restitution présentée par le requérant, a justifié sa décision ;

Qu'en effet, d'une part, il résulte des articles 13 et 14 de la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime faite à Strasbourg le 8 novembre 1990, applicable dans les relations entre la France et la Suisse, qu'une Partie qui a reçu de l'autre Partie une demande de confiscation concernant des instruments ou des produits situés sur son territoire, est tenue de l'exécuter, dans les conditions prévues par le texte conventionnel, en suivant les procédures organisées par son droit interne ;

Que, d'autre part, aux termes de l'article 12 de la loi n° 96-392 du 13 mai 1996 relative à la lutte contre le blanchiment et le trafic de stupéfiants et à la coopération internationale en matière de saisie et de confiscation des produits du crime, lorsqu'elle fait l'objet d'une demande présentée en application des articles précités de la Convention du 8 novembre 1990, l'exécution sur le territoire français d'une décision de confiscation prononcée par une juridiction de l'un des Etats parties à ladite convention est autorisée par le tribunal correctionnel, lequel est saisi, à cette fin, par le procureur de la République ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, M. Desportes conseiller rapporteur, M. Joly, Mme Anzani, MM. Beyer, Pometan conseillers de la chambre, MM. Ponsot, Valat, Mme Ménotti conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Launay ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-82079
Date de la décision : 25/03/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CONVENTIONS INTERNATIONALES - Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime du 8 novembre 1990 - Confiscation - Exécution en France d'une décision de confiscation prise par la juridiction d'un Etat partie à la Convention - Juridiction française compétente.

Il résulte des articles 13 et 14 de la Convention relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime du 8 novembre 1990, applicable dans les relations entre la France et la Suisse, qu'une Partie qui a reçu de l'autre Partie une demande de confiscation concernant des instruments ou des produits situés sur son territoire, est tenue de l'exécuter, dans les conditions prévues par le texte conventionnel, en suivant les procédures organisées par son droit interne. Aux termes de l'article 12 de la loi n° 96-392 du 13 mai 1996 relative à la lutte contre le blanchiment et le trafic de stupéfiants et à la coopération internationale en matière de saisie et de confiscation des produits du crime, lorsqu'elle fait l'objet d'une demande présentée en application des articles précités de la Convention du 8 novembre 1990, l'exécution sur le territoire français d'une décision de confiscation prononcée par une juridiction de l'un des Etats parties à ladite Convention est autorisée par le tribunal correctionnel, lequel est saisi, à cette fin, par le procureur de la République.


Références :

Convention relative au blanchiment, au dépistage et à la confiscation des produits du crime du 08 novembre 1990 art. 13, art. 14
Loi 96-392 du 13 mai 1996 art. 12

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon (chambre de l'instruction), 06 mars 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 25 mar. 2003, pourvoi n°02-82079, Bull. crim. criminel 2003 N° 74 p. 289
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2003 N° 74 p. 289

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Launay
Rapporteur ?: M. Desportes
Avocat(s) : la SCP Peignot et Garreau.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.82079
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