La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/03/2003 | FRANCE | N°02-81443

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 mars 2003, 02-81443


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf mars deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller DULIN, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CHEMITHE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Anne-Marie, épouse Y..., partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de GRENOBLE, en date du 23

octobre 2001, qui a déclaré irrecevable sa constitution de partie civile du chef de f...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf mars deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller DULIN, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CHEMITHE ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Anne-Marie, épouse Y..., partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de GRENOBLE, en date du 23 octobre 2001, qui a déclaré irrecevable sa constitution de partie civile du chef de faux et escroquerie ;

Vu le mémoire produit ;

Vu l'article 575, alinéa 2, 2 , du Code de procédure pénale ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 575, alinéa 2, 2 , du Code de procédure pénale, 3, 4, 5 du même Code, 1351 du Code civil et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable la plainte avec constitution de partie civile déposée par Anne-Marie X... ;

"aux motifs que, "par arrêt de la chambre des urgences du 4 juillet 2000, il a été déclaré que Jean-Louis Z... avait tout pouvoir pour représenter la société civile immobilière Pontivy et que l'argument selon lequel le procès-verbal de l'assemblée générale du 4 août 1998 était un faux a été rejeté ; que, malgré ce, la partie civile conteste encore ce fait (déjà jugé) et prétend que ces documents sont des faux ; qu'il faut relever que son acharnement procédural est à blâmer et que ses arguments ont déjà été développés devant la juridiction civile ; qu'ainsi, elle a déjà choisi la voie civile et ne peut, pour les mêmes causes, indubitablement, choisir maintenant la voie pénale" ;

"alors, d'une part, que l'article 5 du Code de procédure pénale, qui indique que la partie qui a exercé son action devant la juridiction civile ne peut plus la porter devant la juridiction répressive, n'est applicable qu'autant que les demandes constituent l'exercice d'une action identique par sa cause et par son objet, opposant les mêmes parties ; qu'il ne résulte pas des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour d'appel ait vérifié qu'il existait, entre la demande ayant donné lieu à l'arrêt de la chambre des urgences du 4 juillet 2000 et celle soumise aux juges répressifs, une triple identité d'objet, de cause et de parties ; qu'en statuant comme elle l'a fait, elle n'a donc pu mettre la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle ;

"alors, d'autre part, qu'il résultait de l'exposé des prétentions des parties figurant dans l'arrêt attaqué que l'action exercée devant la chambre des urgences opposait l'ancien propriétaire de la maison vendue aux enchères, Jean-Louis A..., au nouvel acquéreur, la société civile immobilière Pontivy, pour une question de prise de possession des lieux ; que l'action exercée au civil n'avait donc ni le même objet, ni la même cause, et n'opposait pas les mêmes parties, l'action civile exercée devant le juge pénal par Anne-Marie X... aux fins de voir condamner la société civile immobilière Pontivy et Jean-Louis Z... pour escroquerie leur reprochant d'avoir fait usage de faux documents pour se porter acquéreur du bien" ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 575, alinéa 2, 2 , du Code de procédure pénale, 2, 3, 85, 86 du Code de procédure pénale, 593 du même Code, 1382 du Code civil, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable la plainte avec constitution de partie civile déposée par Anne-Marie X..., épouse Y... ;

"aux motifs, "enfin, l'on ne voit pas quel préjudice elle a pu subir, une simple perte de chance comme elle l'affirme elle-même ne pouvait constituer un préjudice, s'agissant d'un immeuble ne lui appartenant nullement et ses offres ayant été inférieures à celles proposées par un autre aux enchères ; que la seule perte de chance qu'elle peut soutenir est de par sa seule faute n'ayant pas suffisamment enchéri" ;

"alors, d'une part, qu'une perte de chance constitue bien un préjudice réparable, supposant seulement la disparition, par l'effet de l'infraction, de la probabilité d'un événement favorable ;

qu'ainsi, en prétendant le contraire, et en s'abstenant de rechercher si, en surenchérissant sans avoir qualité pour le faire, au moyen d'un faux, le prévenu n'avait pas fait perdre à Anne-Marie X... une chance sérieuse d'acquérir le bien vendu aux enchères, lui causant ainsi un préjudice directement causé par l'infraction poursuivie, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés ;

"alors, d'autre part, que la circonstance selon laquelle Anne-Marie X... n'aurait pas suffisamment enchéri ne saurait constituer une faute de nature à faire disparaître le lien de causalité entre l'infraction commise par Jean-Louis Z... en se portant frauduleusement acquéreur du bien immobilier, objet des enchères, pour le compte de la société civile immobilière Pontivy, au moyen d'un faux, et le préjudice subi par Anne-Marie X... qui s'est, ainsi, vue privée de la possibilité d'acquérir ledit bien dans des conditions plus favorables et dans les limites qu'elle s'était fixées ;

"alors, enfin, que, dans son mémoire devant la chambre de l'instruction, Anne-Marie X... invoquait tant un préjudice matériel qu'un préjudice moral, en faisant valoir qu'elle avait été spoliée d'une acquisition où l'intérêt familial était de surcroît en jeu, par la commission et l'usage d'un faux au cours de la procédure d'adjudication, ayant permis à Jean-Louis Z... de se porter acquéreur du bien au nom de la société civile immobilière Pontivy, et ajoutait que, tant son intérêt personnel que celui de la société avaient été lésés dans la mesure où des procédures judiciaires s'étaient déroulées, au cours desquelles les juridictions saisies avaient, elles aussi, été induites en erreur ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces différents points, et notamment sur la possibilité d'un préjudice moral subi par Anne-Marie X... en raison des faits dénoncés, la chambre de l'instruction n'a pu justifier sa décision" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, dans le cadre d'une vente aux enchères publiques, Jean-Louis Z..., représentant de la société Pontivy, s'est porté acquéreur, le 7 mai 1998, d'une maison d'habitation ; qu'il a été déclaré adjudicataire de ce bien le 20 août 1998, après surenchère d'Anne-Marie Y... ; que, le 5 mars 2001, celle-ci a porté plainte avec constitution de partie civile contre Jean-Louis Z... au motif qu'il s'est porté adjudicataire de ce bien, au nom de la société Pontivy, alors qu'il n'est pas le représentant de cette société et que le procès-verbal d'assemblée générale du 4 août 1998 le désignant en cette qualité est un faux, ce qui lui a occasionné un préjudice résultant de l'impossibilité dans laquelle elle a été d'acquérir le bien en cause ;

Attendu que, si c'est à tort que l'arrêt a dit que la plainte d'Anne-Marie Y... était irrecevable par les motifs justement critiqués aux moyens, l'arrêt néanmoins n'encourt pas la censure, dès lors qu'il est constant que les infractions dénoncées, à les supposer établies, n'ont aucun lien avec le seul préjudice allégué qui est le fait de n'avoir pas été déclaré adjudicataire ;

D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Dulin conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-81443
Date de la décision : 19/03/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ACTION CIVILE - Préjudice - Réparation - Conditions - Lien avec les infractions dénoncées - Faux et escroquerie.


Références :

Code de procédure pénale 2, 3

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Grenoble, 23 octobre 2001


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 19 mar. 2003, pourvoi n°02-81443


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.81443
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award