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11/03/2003 | FRANCE | N°02-83498

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 11 mars 2003, 02-83498


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le onze mars deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire DESPORTES et les observations de la société civile professionnelle THOUIN-PALAT et URTIN-PETIT, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Marie-Francine, épouse Y...,

- Y... Jean-François,

contre l'arrêt de la cour d'appel de RIOM, cha

mbre correctionnelle, en date du 24 avril 2002, qui, pour dénonciation calomnieuse, a condamné, la pr...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le onze mars deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire DESPORTES et les observations de la société civile professionnelle THOUIN-PALAT et URTIN-PETIT, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Marie-Francine, épouse Y...,

- Y... Jean-François,

contre l'arrêt de la cour d'appel de RIOM, chambre correctionnelle, en date du 24 avril 2002, qui, pour dénonciation calomnieuse, a condamné, la première, à 1 an d'emprisonnement dont 9 mois avec sursis et, le second, à 1 an d'emprisonnement dont 10 mois avec sursis ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 410, 411, 416, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que Marie-Francine et Jean-François Y... ont été condamnés par arrêt contradictoire ;

"aux motifs que le certificat médical produit par Marie-Francine X..., épouse Y..., et Jean-François Y... est trop peu précis pour permettre de considérer que l'état de santé de ces deux prévenus est incompatible avec leur comparution ; en conséquence, ils seront jugés contradictoirement étant représentés par leur avocat qui ne sollicite pas le renvoi ;

"1 ) alors que, si les juges du fond apprécient souverainement la valeur de l'excuse qui leur est présentée, leur décision encourt néanmoins la censure lorsqu'elle se fonde sur des motifs erronés ou imprécis ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait par une simple formule de style déclarer non valables les excuses fournies par Marie-Francine et Jean-François Y... sans dire, séparément pour chacun des prévenus, en quoi le certificat médical produit était insuffisamment précis pour constituer une excuse valable ;

"2 ) alors que n'est pas jugé contradictoirement le prévenu dont l'avocat était présent à l'audience mais qui en raison de la peine encourue ne pouvait pas représenter ledit prévenu" ;

Attendu que, d'une part, en écartant, par les motifs reproduits au moyen, procédant de son appréciation souveraine, l'excuse fournie par les prévenus pour justifier leur non comparution, la cour d'appel a justifié sa décision ;

Attendu que, d'autre part, les demandeurs, qui ont formé leur pourvoi dans le délai prévu par l'article 568, alinéa 1er, du Code de procédure pénale, sont sans intérêt à soutenir que l'arrêt attaqué, qualifié de contradictoire, aurait dû être qualifié de contradictoire à signifier ;

D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 226-10 du Code pénal et des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Marie-Francine X..., épouse Y..., à un an d'emprisonnement dont neuf mois avec sursis et Jean-François Y... à un an d'emprisonnement dont dix mois avec sursis ;

"aux motifs propres que "en l'espèce, il résulte du dispositif de la décision définitive de non lieu dont a bénéficié Jean-Claude Y... le 11 juillet 2001 que les faits dénoncés par les prévenus ne constituaient aucune infraction pénale ; les motifs de cette ordonnance de non-lieu indiquent que Marie-Francine X... a reconnu "qu'il n'y avait jamais eu de viol" et que Jean-Claude Y... n'avait fait que rendre visite à sa belle-soeur en l'absence de son mari ; il résulte de cette décision de non lieu que les faits de viol dénoncés n'ont aucune réalité ; la fausseté des faits de viols dénoncés résulte expressément encore des déclarations de Marie-Francine X... et de Jean-François Y... ; les déclarations de Lucien Y... confirment que ni son épouse, ni sont fils ne lui ont indiqué que Jean-Claude Y... avait entretenu des relations sexuelles consenties ou forcées avec Marie-Francine Y... ; Marie-Francine X... et Jean-François Y... ont reconnu avoir fait une dénonciation mensongère à l'instigation et sur instruction de Lucien Y... dans le but de percevoir des dommages-intérêts ; Lucien Y... ne peut sérieusement prétendre qu'il a pu penser que son épouse avait été victime de viol dès lors qu'il a personnellement eu l'idée de pousser son épouse et son fils à porter plainte, a mis au point la version qu'il convenait d'indiquer aux services de gendarmerie et a fixé le montant des dommages-intérêts qu'il convient de solliciter ; en déclarant les trois prévenus coupables des faits qui leur sont reprochés les premiers juges ont tiré les exactes conséquences légales de leurs constatations ; les faits commis par les trois prévenus sont d'une extrême gravité puisqu'ils ont entraîné pour la victime une incarcération de plus de quatre mois et étaient de nature à entraîner une condamnation pénale à son encontre ; en conséquence de tels faits ne peuvent être sanctionnés que par une peine d'emprisonnement pour partie ferme seule de nature à faire prendre

conscience aux prévenus de leurs agissements délictueux et de les dissuader de réitérer de tels faits ; la personnalité des trois prévenus justifie qu'une partie de la peine soit affectée d'un sursis ; les premiers juges ont prononcé des peines adaptées à la gravité des faits et à la personnalité de chacun des prévenus" ;

"et aux motifs adoptés que "l'information a permis d'établir les faits suivants ; le 14 octobre 1999, Marie-Francine X..., épouse Lucien Y..., déposait plainte devant la gendarmerie pour viols commis sur sa personne par son beau-frère, Jean-Claude Y... ; elle indiquait que depuis le départ de son mari, le 9 juin 1999, Jean-Claude Y... était venu quotidiennement lui rendre visite à son domicile, se montrant de plus en plus pressant jusqu'au jour où il lui avait imposé une pénétration digitale puis une relation sexuelle incomplète ; elle indiquait également que le jour où les faits s'étaient produits, soit entre mars et septembre 1999, elle était impotente en raison d'une surcharge pondérale, et sous traitement médical lourd ; Jean-François Y..., fils de la victime, confortait les dires de sa mère se prétendant témoin partiel des faits qu'elle avait subis ; Lucien Y... rapportait à son tour devant les gendarmes les actes commis par sont frère, tels qu'ils lui avaient été décrits par sa femme et Jean-François, lors de son retour au domicile conjugal ; placé en garde à vue, Jean-Claude Y... reconnaissait les faits de viol et une information était ouverte à son encontre du chef de viols sur personne particulièrement vulnérable, mais devant le magistrat instructeur, il revenait sur ses déclarations, affirmant être victime d'un "complot", sans pouvoir dire pourquoi ; entendue à son tour par le juge d'instruction Marie-Francine Y... confirmait en tout point ses premières déclarations, avec force détails, le 29 octobre 1999 ; le même jour, elle maintenait ses dires, de même que son fils, lors de la confrontation avec le prévenu organisée par le magistrat instructeur ; ce n'est que le 10 mars 2000 que Marie-Francine Y... finissait par reconnaître, devant ce même magistrat qu'il n'y avait jamais eu de viol et que c'était son mari qui lui avait demandé ainsi qu'à son fils d'accuser ainsi son frère, afin d'obtenir de l'argent, ce à quoi elle s'était pliée, ayant peur de son mari, violent et alcoolique ; Marie-Francine X... était alors mise en examen du chef de dénonciation calomnieuse, Lucien Y... et Jean-François Y... étant mis en examen du chef de complicité du même délit ; Jean-Claude Y..., remis en liberté le 10 mars 2000, était en détention provisoire depuis le 16 octobre 1999 ; par ordonnance du 11 juillet 2001, Marie-Francine X..., épouse Y..., et Jean-François Y... étaient renvoyés devant le présent tribunal du chef de dénonciation calomnieuse au préjudice de Jean-Claude Y..., Lucien Y... étant renvoyé pour complicité du même délit ;

à l'audience, Marie-Francine Y... et Jean-François Y... réitéraient leurs déclarations faites devant le juge d'instruction, lors de leur mise en examen, à savoir : que Jean-Claude Y... venait régulièrement voir sa belle-soeur, apportant notamment des légumes de son jardin lui manifestant des gestes d'amitié (main autour du cou, bises), ces gestes n'ayant

aucun caractère déplacé ; qu'ils se sont livrés à une dénonciation calomnieuse non fondée à l'encontre de Jean-Claude, sur la demande expresse de Lucien Y..., lequel réglait vraisemblablement un contentieux avec son frère et voulait principalement obtenir de l'argent ; la confrontation entre les trois prévenus n'apporte aucun élément nouveau par rapport à la confrontation organisée le 1er avril 2000 par le juge d'instruction entre Lucien Y... et Jean-François Y... et en l'absence, pour raisons médicales, de Marie-Francine Y... ; de cette confrontation (D 47), il résulte que ni Marie-Francine Y... ni Jean-François Y... n'ont dit à Lucien Y... qu'il y avait eu viol, mais simplement que Jean-Claude Y... "était collant" et, selon les termes employés par Jean-François Y... "c'est Lucien Y... qui a voulu porter plainte parce qu'il n'a pas pris le temps de comprendre et il a mal interprété". Lucien Y..., sous la question du magistrat instructeur déclarait dans le même sens "vous me demandez si on m'a raconté que mon frère avait pris ma femme de force, non, mais je me suis douté qu'il s'était passé quelque chose" ;

il s'avère, en conséquence, que les trois protagonistes étaient bien d'accord pour dénoncer à la justice des faits inexacts. Ils s'étaient également entendus pour tirer bénéfice d'une telle dénonciation, une telle idée ayant germé en premier lieu dans le cerveau de Lucien Y..., selon son propre aveu (D page 3) et l'accord s'étant fait sur la somme de 10 000 francs ; il y a donc lieu de déclarer les prévenus coupables des faits qui leur sont reprochés" ;

"alors que la reconnaissance par la personne dont les agissements ont été dénoncés de la réalité de ces faits constitue un fait de nature à exonérer l'auteur de la dénonciation de toute responsabilité pénale ; qu'en l'espèce, il est établi qu'au cours de sa garde à vue Jean-Claude Y... a reconnu les faits dénoncés par Marie-Francine Y... dans sa plainte ; qu'en condamnant Marie-Francine Y... du chef de dénonciation calomnieuse et Jean-François Y... pour complicité du même délit, la cour d'appel a donc violé les textes susvisés" ;

Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables de dénonciation calomnieuse, la cour d'appel retient qu'ils ont dénoncé des faits de viol qu'ils savaient totalement inexacts en les imputant à Jean-Claude Y... ;

Attendu qu'en prononçant ainsi et dès lors que la circonstance que la personne mise en cause ait, à la suite de la dénonciation, reconnu à tort avoir commis les faits dénoncés ne pouvait exonérer les prévenus de leur responsabilité pénale, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Desportes conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-83498
Date de la décision : 11/03/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de RIOM, chambre correctionnelle, 24 avril 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 11 mar. 2003, pourvoi n°02-83498


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.83498
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