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26/02/2003 | FRANCE | N°02-82145

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 26 février 2003, 02-82145


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-six février deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller KOERING-JOULIN, les observations de la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE, Me ODENT, de la société civile professionnelle RICHARD et MANDELKERN et de la société civile professionnelle THOMAS-RAQUIN et BENABENT, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé pa

r :

- X... Jean-Michel, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruct...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-six février deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller KOERING-JOULIN, les observations de la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE, Me ODENT, de la société civile professionnelle RICHARD et MANDELKERN et de la société civile professionnelle THOMAS-RAQUIN et BENABENT, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Jean-Michel, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, en date du 14 janvier 2002, qui, dans l'information suivie contre Marie- France Y... et Catherine Z..., épouse A..., du chef d'établissement de certificats faisant état de faits matériellement inexacts, et contre Marie-Antoinette B..., épouse X..., des chefs de complicité de ce délit et usage de certificats faisant état de faits matériellement inexacts, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Vu l'article 575, alinéa 2, 5 , du Code de procédure pénale ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 313-1 du Code pénal et des articles 86, 575 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt a prononcé un non-lieu du chef d'établissement de certificats médicaux faisant état de faits matériellement inexacts et usage de certificats inexacts ou falsifiés ;

"aux motifs qu'il n'existe pas de charges suffisantes contre Marie-Antoinette X... et les docteurs Catherine A... et Marie-France Y... d'avoir commis les infractions qui leur sont reprochées ;

"alors que les juridictions d'instruction doivent statuer sur tous les chefs d'inculpation dénoncés dans la plainte avec constitution de partie civile ; que Jean-Michel X... a adressé au juge d'instruction, le 16 octobre 1999, une plainte avec constitution de partie civile contre Marie-Antoinette X... du chef d'escroquerie au jugement ; que la chambre de l'instruction, qui s'est prononcée du seul chef d'usage de certificats médicaux inexacts s'abstenant ainsi d'apprécier les faits reprochés à Marie-Antoinette X... sous tous les chefs d'inculpation régulièrement dénoncés par la partie civile, a violé les textes susvisés" ;

Attendu que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction, l'arrêt attaqué énonce qu'il n'est pas démontré par l'information que les certificats médicaux litigieux aient constaté des faits matériellement inexacts, ni qu'ils aient été établis "dans l'intention de faire un faux en vue de surprendre la religion des juges ou d'en obtenir une décision favorable" à Marie-Antoinette X..., dans le cadre de la procédure de divorce que celle-ci avait engagée contre la partie civile ;

Attendu qu'en cet état, le grief allégué d'omission de statuer n'est pas encouru ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, de l'article 441-7 du Code pénal et des articles 427, 444, 575 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que la chambre de l'instruction a refusé de procéder à l'audition des professeurs C... et D... ;

"aux motifs qu'il ressort suffisamment des deux expertises effectuées par des experts inscrits sur les listes des cours d'appel, et sans qu'il y ait lieu de procéder à l'audition des professeurs C... et D..., qui sont étrangers à la présente procédure, que les différents examens échographiques et cliniques pratiqués par les docteurs A... et Y... sont en concordance (...) ; que, par ailleurs, aucun autre élément de nature à établir que "le docteur A... a fait évoluer sa position pour la rendre compatible avec les constatations du docteur Y..." oulet que les experts ont cherché à "étouffer l'affaire" n'a été apportée ;

"1 I alors que le principe d'égalité des armes implique que toute partie doit avoir une possibilité raisonnable d'exposer sa cause au tribunal dans des conditions qui ne la désavantagent pas par rapport à la partie adverse ; qu'en se fondant exclusivement sur les expertises judiciaires sans entendre les experts diligentés par la partie civile au seul motif que ces personnes étaient étrangères à la procédure, la chambre de l'instruction a méconnu le principe d'égalité des armes en violation des textes susvisés ;

"2 I alors qu'aucun texte de procédure pénale n'interdit la production par le plaignant à l'appui de sa plainte de pièces de nature à constituer des charges contre les personnes visées dans celle-ci et il appartient aux juridictions répressives d'en apprécier la valeur probante au regard des règles relatives à l'administration de la preuve des infractions ; qu'en écartant les attestations des professeurs D... et C... confirmant l'analyse de Jean-Michel X... selon laquelle les quatre certificats litigieux étaient incohérents entre eux et constituaient donc des faux, au motif inopérant que ces personnes étaient étrangères à la procédure, s'abstenant ainsi d'énoncer un quelconque motif propre à justifier du caractère non probant de ces attestations, la chambre de l'instruction a privé sa décision de motifs en violation des textes susvisés" ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 441-7 du Code pénal et des articles 575 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que la chambre de l'instruction a estimé qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre Marie-Antoinette X... et les docteurs A... et Y... d'avoir commis les infractions qui leur étaient reprochées ;

"aux motifs qu'il ressort, tout d'abord, des pièces versées au débats que Marie-Antoinette X..., à la suite d'une altercation survenue avec son mari le 13 juin 1999, a consulté dans la matinée du 16 juin 1999, pour une douleur du thorax, le docteur Y..., radiologiste, qui n'a constaté aucune lésion visible radiologiquement et a suggéré une échographie ; qu'elle s'est ensuite rendue au commissariat de police pour déposer une main courante actant, d'une part, d'une ecchymose au bras gauche et, d'autre part, une douleur au thorax ; que, dans l'après midi, elle a fait constater par le docteur A..., médecin généraliste, une ecchymose au bras gauche de 4 cm x 5 cm ; que dans ces conditions, les deux certificats médicaux établis ne sont nullement contradictoires entre eux en ce qu'ils portent sur des lésions différentes, l'une visible à l'oeil nu, l'autre justifiant des examens plus approfondis ; que, dans son compte-rendu échographique établi le 21 juin 1999, le docteur Y... a conclu à l'existence "d'une image pouvant corroborer un hématome localisé en voie de régression" ; que s'il est constant qu'une erreur a été commise dans la retranscription des dimensions de la zone hypoéchogène sur le certificat, les clichés qui y était joints ont permis aux experts d'attester l'existence de cette zone et de la

déclarer compatible avec les conclusions qui en étaient tirées, à savoir, un hématome en voie de régression, étant observé qu'en ce domaine, l'interprétation est donnée en fonction du contexte de survenue, ce type d'images pouvant correspondre à d'autres pathologies ; que par certificat médical du 7 juillet 1999, le docteur A... a constaté "la présence d'un hématome de deux centimètres, à deux centimètres de la ligne médiane (à droite), à l'endroit dont se plaignait Marie-Antoinette X..." ; que ce constat n'est nullement contradictoire avec le précédent, les experts ayant noté que l'hématome avait pu se développer avec retard, postérieurement au 16 juin 1999 ; qu'en conséquence, il ressort suffisamment des deux expertises effectuées par des experts inscrits sur les listes des cours d'appel, et sans qu'il y ait lieu de procéder à l'audition des professeurs C... et D..., qui sont étrangers à la procédure, que les différents examens échographiques et cliniques pratiqués par les docteurs A... et Y... sont en concordance ; qu'il n'est pas démontré que les certificats font état de faits matériellement inexacts, si ce n'est l'erreur de retranscription des dimensions de la zone hypoéchogène, commise dans le compte rendu d'échographie du 21 juin 1999, dont le caractère volontaire n'a pas été établi, les clichés étant joints au document litigieux; que, par ailleurs, aucun autre élément de nature à établir que "le docteur A... a fait évoluer sa position pour la rendre compatible avec les constatations du docteur Y..." oulet que les experts ont cherché à "étouffer l'affaire" n'a été apportée ; que si l'interprétation de l'échographie, dans la mesure où elle est fonction du "contexte de survenue" peut donner lieu à discussion, de même que le lien entre la lésion relevée par cet examen et l'hématome constaté le 7 juillet 1999, compte-tenu de la taille et de la localisation de la lésion et des conditions spécifiques propres aux examens cliniques et échographiques, il n'est pas établi par l'information que les constatations des médecins aient été guidées par l'intention de faire un faux en vue de surprendre la religion des juges ou d'en obtenir une décision favorable à Marie-Antoinette X... ; que, dans ces conditions, il n'existe pas de charges suffisantes contre Marie-Antoinette X... et les docteurs Catherine A... et Marie-France Y... d'avoir commis les infractions qui leur sont reprochées ; que, par voie de conséquence, il n'y a pas lieu de surseoir à statuer jusqu'à ce qu'une décision définitive soit intervenue sur les plaintes déposées devant la juridiction pénale contre les experts" ;

"1 / alors que la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; que la Chambre de l'instruction a relevé que le certificat établi le 16 juin 1999 par le docteur Y... faisait état d'un traumatisme violent à l'hémithorax droit et que le certificat rédigé le 7 juillet 1999 par le docteur A... constatait un hématome de la paroi abdominale ; qu'en affirmant néanmoins que les certificats des docteurs Y... et A... étaient en concordance bien qu'il résulte de ses propres constatations que ces certificats visaient des lésions différentes puisque l'un concernait le thorax et l'autre l'abdomen, la chambre de l'instruction a entaché sa décision d'une contradiction de motifs en violation des textes susvisés ;

"2 l alors que tout jugement doit comporter les motifs propres à justifier sa décision ; que la chambre de l'instruction a estimé que les deux certificats du 16 juin 1999 - établis, l'un dans la matinée, par le docteur Y... et faisant état d'un "traumatisme violent de la région antéro-inférieur de l'hémithorax droit" assorti de "douleurs exquisément précises et intenses", l'autre l'après-midi, par le docteur A... et mentionnant uniquement une "ecchymose au bras gauche" - ne sont pas contradictoires dès lors qu'ils portent sur des lésions différentes, l'une visible à l'oeil nu, l'autre justifiant des examens plus approfondis ; que cependant, comme le faisait valoir le demandeur, ces deux certificats ont été établis à quelques heures d'intervalles, or le second ne mentionne pas de douleurs à l'hémithorax pourtant décrites comme "exquisément précises et intenses" et le premier ne mentionne pas l'existence d'une ecchymose au bras gauche pourtant visible à l'oeil nu ; qu'en affirmant que les certificats établis par les docteurs A... et Y... n'étaient pas contradictoires sans s'expliquer sur ce moyen péremptoire, la chambre de l'instruction a privé sa décision de motifs en violation des textes susvisés" ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 434-20 et 441-7 du Code pénal, des articles 646, 575 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que la chambre de l'instruction a refusé de surseoir à statuer jusqu'à ce qu'une décision définitive soit intervenue sur les plaintes déposées devant la juridiction pénale contre les experts ;

"aux motifs qu'il n'existe pas de charges suffisantes contre Marie-Antoinette X... et les docteurs Catherine A... et Marie-France Y... d'avoir commis les infractions qui leur sont reprochées ; que, par voie de conséquence, il n'y a pas lieu de surseoir à statuer jusqu'à ce qu'une décision définitive soit intervenue sur les plaintes déposées devant la juridiction pénale contre les experts ;

"alors que le juge ne saurait refuser de surseoir à statuer jusqu'à ce qu'il ait été prononcé sur le faux par la juridiction compétente lorsque la pièce arguée de faux est de nature à exercer une influence déterminante sur la solution du litige ; que la chambre de l'instruction a estimé qu'il n'y avait pas lieu de surseoir à statuer jusqu'à ce qu'une décision soit intervenue sur les plaintes pour faux déposées devant la juridiction pénale contre les experts dès lors qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre les prévenus ; qu'en refusant ainsi de surseoir à statuer jusqu'à ce qu'il ait été statué sur les expertises judiciaires arguées de faux bien qu'elle se soit fondée, pour conclure au non-lieu, exclusivement sur ces pièces arguées de faux, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, la chambre de l'instruction, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés dans la plainte et répondu aux articulations essentielles du mémoire produit par la partie civile appelante, a exposé les motifs pour lesquels elle a estimé qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis les délits reprochés ni toute autre infraction ;

Que le demandeur qui se borne à critiquer ces motifs sans justifier d'aucun des griefs que l'article 575 du Code de procédure pénale autorise la partie civile à formuler à l'appui de son pourvoi contre un arrêt de la chambre de l'instruction en l'absence de recours du ministère public ;

Que, dès lors, les moyens sont irrecevables ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

DECLARE IRRECEVABLES les demandes présentées au titre de l'article 618-1 du Code de procédure pénale par Marie-France Y... et Marie-Antoinette B..., épouse X... ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Koering-Joulin conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-82145
Date de la décision : 26/02/2003
Sens de l'arrêt : Rejet irrecevabilité
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 14 janvier 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 26 fév. 2003, pourvoi n°02-82145


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.82145
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