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04/02/2003 | FRANCE | N°02-82902

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 04 février 2003, 02-82902


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre février deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire AGOSTINI et les observations de Me CAPRON, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Noël,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AMIENS, chambre correctionnelle, en date du 31 janvier 2002, qui, pour falsification de denrées alimentaires,

l'a condamné à 1 500 euros d'amende ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassati...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre février deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire AGOSTINI et les observations de Me CAPRON, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Noël,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AMIENS, chambre correctionnelle, en date du 31 janvier 2002, qui, pour falsification de denrées alimentaires, l'a condamné à 1 500 euros d'amende ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 213-3 du Code de la consommation, des articles 1,2, 4-1 du décret n° 86-1037 du 15 septembre 1986 portant application de la loi du 1er août 1905 sur les fraudes et falsifications en matière de produits ou de services en ce qui concerne la commercialisation des produits et substances destinés à l'alimentation animale, de l'article 11-1 de l'arrêté ministériel du 16 mars 1989 portant application du décret n° 86-1037 du 15 septembre 1986, tel que modifié par les arrêtés du 14 septembre 1992, du 9 décembre 1998 et du 8 avril 1999, de l'article 111-4 du Code pénal et des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Noël X... coupable de falsification de denrées alimentaires et l'a condamné, de ce chef, à une amende de 1 500 euros ;

"aux motifs que "les éléments de la procédure, particulièrement les constatations matérielles effectuées par les agents de la Direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de l'Oise, de la

.Direction départementale des affaires sanitaires et sociales de l'Oise, de la Direction des services vétérinaires de l'Oise, de la Direction régionale de l'industrie et de la recherche et des policiers de Compiègne, démontrent clairement que les éléments matériel et intentionnel de l'infraction reprochée à Noël X... sont établis" (cf. arrêt attaqué, p. 4, dernier considérant) ; qu' "en effet, indépendamment des éléments rappelés dans les faits, les constatations des enquêteurs, prouvées par les pièces qu'ils ont versées au dossier, font manifestement apparaître que les bacs de décantation, présentés comme "station d'épuration", recueillaient les eaux usées provenant des toilettes du personnel technique (matières fécales), du refroidissement des eaux des aérocondenseurs, du trop plein de la chaufferie (risque de pollution par le carburant), des eaux de nettoyage des machines et des ustensiles (risque de vidange des moteurs des véhicules) ; ces matières, qui n'ont pas été stockées conformément aux lois de 1964, 1976 et au décret du 21 décembre 1997 sur les sociétés exploitant une installation classée, constituent des boues au sens de l'article 1 du décret du 8 décembre 1997" (cf. arrêt attaqué, p. 5, 1er

considérant) ; que "de surcroît, les déclarations de Noël X... concernant les huiles de vidange sont contredites par M. Y..., responsable de production de la société, et par les observations des agents de la DGCCRF" (cf. arrêt attaqué, p. 5, 2e considérant) ; "en outre, M. Y... a exposé que l'eau utilisée par l'usine (pour les sanitaires, la fabrication, le nettoyage) provenait du puits personnel de l'usine (il ne pouvait fournir aucune analyse micro biologique de cette eau) et que le local de rétention où se trouvait stocké le fuel lourd n'était pas étanche et laissait parfois échapper le fuel" (cf. arrêt attaqué, p. 5, 3e considérant) ; que "par ailleurs, cet homme a indiqué que "concernant la station d'épuration, entre guillemets, nous pompions après flottaison et floculation, environ 1 tonne à 1,5 tonnes de graisses réincorporées dans le circuit de fabrication par jour" ; iI a également déclaré : " depuis votre dernier passage, nous avons évacué les boues de station d'épuration, pour 15 580 kilos brut (...) je vous précise qu'il s'agit de boues et non de graisses" (cf. arrêt attaqué, p. 5, 4e considérant) ; que "cette déclaration, confirmées par le prévenu, indique qu'avant cette date, les déchets de "station d'épuration " n'étaient ni détruits, ni stockés dans l'usine ; en effet, malgré les différentes demandes en ce sens, aucun déchet n'a (...) été montré ou présenté aux enquêteurs lors des différentes visites ; dès lors, la plupart de ces détritus devraient nécessairement être détenus dans les bacs de décantation et reconvertis par incorporation dans les farines animales avec les graisses quotidiennement soutirées desdits bacs" (cf. arrêt attaqué, p. 5, 5e considérant) ; que Noël X... a expliqué que, dans les bacs de décantation, il était procédé uniquement par une flottaison mécanique et naturelle (1er bassin) et à une flottaison naturelle (2e bassin), l'aspiration des graisses se réalisant par un appareil flottant et une partie des boues en suspension était aspirée : " les boues et graisses du premier bassin allaient dans la fabrication ; quant au deuxième bassin, on récupérait les graisses non traitées au premier bassin avec quelques boues en suspension et le reste partait aux eaux de la ville (tout à l'égout) "; il a notamment déclaré : "nous étions conscients du problème des boues mélangées avec les graisses puisque le 8 mars 1999 nous avions commandé un floculateur pour séparer définitivement et radicalement les boues des graisses " " (cf. arrêt attaqué, p. 5, 6e considérant) ; que "le prévenu reconnaissait en outre, lors de la visite du 26 mars 1999, que "toutes les eaux (circuit des toilettes, de la chaufferie et des eaux résiduelles de lavage plus eau refroidie dans (l')aérocondenseur) vont dans la station d'épuration"" (cf. arrêt attaqué, p. 5, 7e considérant) ; que "Noël X... ne (...) peut (donc) prétendre, comme il le fait aujourd'hui, qu'il ignorait que des boues étaient incorporées dans les farines destinées à l'alimentation animale" (cf arrêt attaqué, p. 5, dernier considérant) ; que "l'incorporation des boues, source importante de contamination, est strictement interdite (article 11-1 de l'arrêté ministériel du 16 mars 1989, portant application du décret du 15 septembre 1986 :

"l'incorporation des ingrédients énumérés ci-après

est interdite dans les aliments composés pour animaux: boues issues de station d'épuration traitant des eaux usées " ; mais également l'arrêté préfectoral d'exploitation du site du 18 mars 1981 et complémentaire du 15 avril 1991) ; de surcroît, cette société, dont l'activité avait commencé en 1955, bénéficiait nécessairement d'une certaine expérience et d'un certain professionnalisme concernant les aliments composés pour l'alimentation animale ; à ce titre, en tant que professionnel aguerri, le prévenu ne peut raisonnablement prétendre avoir commis une erreur sur le droit" (cf. arrêt attaqué, p. 6, 1er considérant) ; que "de plus, l'application du décret du 15 septembre 1986 portant application de la loi du 1er août 1905 sur les fraudes et falsifications en matière de produits ou de services trouve parfaitement à s'appliquer en l'espèce, contrairement à ce qu'invoque le prévenu ; en effet, l'article 1er de ce décret vise les " produits et substances commercialisés pour être destinés tels quels ou non à l'alimentation animale soit des animaux élevés pour la consommation ou pour leur fourrure, soit des animaux familiers" ;

ainsi, la farine animale livrée par la SA Mauny, ingrédient composé d'un mélange de farine de porc et de boeuf (produits d'origine animale), et par surcroît de boues, est un produit commercialisé pour être destiné à l'alimentation des animaux (dont la destination est d'entrer dans la composition d'un aliment animal final) et constitue un produit composé au sens de l'article 2 du décret du 15 septembre 1986" (cf arrêt attaqué, p. 6, 2e considérant) ; que "dès lors, les éléments au dossier sont suffisamment étayés pour en conclure que le procédé usité par cette société, consistant à récupérer les matières en suspension dans un bac de décantation afin de réincorporer ces déchets dans la fabrication des farines, constitue une falsification au sens de l'article L. 213-3 du code de la consommation" (cf. arrêt attaqué, p. 6, 3e considérant) ; que " par ailleurs, Noël X... a indiqué aux enquêteurs que le personnel ne disposait pas de délégations de pouvoirs ; à ce titre, il lui appartenait donc de prendre toutes mesures nécessaires et correctives afin de fabriquer et de mettre en vente des produits répondant aux normes en vigueur ; seule sa responsabilité devra donc être retenue compte tenu de sa qualité de dirigeant de la SA Mauny au moment des faits poursuivis" (cf. arrêt attaqué, p. 6, 4e considérant) ; que "dans ces conditions, il y a lieu d'infirmer la décision des premiers juges et de déclarer Noël X... coupable des faits qui lui sont reprochés" (cf. arrêt attaqué, p. 6, 5e considérant) ; que "le casier judiciaire de Noêl X..., né en 1940, ne porte trace d'aucune condamnation" (cf. arrêt attaqué, p. 6, 6e, considérant) ; que "ce retraité, qui perçoit une pension de 2 744 euros (18 000 francs) par mois, a fait montre d'une totale absence de diligence concernant la gestion de la société qu'il dirigeait, et a utilisé des pratiques illicites dans le seul but de satisfaire des profits ; aussi, devra-t-il être sanctionné en conséquence de cette faute" (cf. arrêt attaqué, p. 6, 7e considérant) ;

qu' "en conséquence, la Cour le condamnera à une amende de 1 500 euros" (cf. arrêt attaqué, p. 6, 8e considérant) ;

"alors que, de première part, au moment des faits visés à la prévention, seule était prohibée l'incorporation de boues issues de stations d'épuration traitant des eaux usées dans les aliments composés pour animaux et non l'incorporation de ces mêmes boues dans les ingrédients entrant dans la fabrication d'aliments composés pour animaux ; qu'aux termes de l'article 2 du décret du 15 septembre 1986, applicable au moment des faits visés à la prévention, les aliments composés pour animaux sont des mélanges composés de produits d'origine végétale ou animale destinés à l'alimentation par voie orale sous la forme d'aliments complets ou complémentaires ; que la farine dont la falsification est reprochée à Noël X..., qui n'est pas destinée directement à l'alimentation animale, mais dont la destination, comme l'a relevé la cour d'appel, est d'entrer dans la composition d'un aliment final, et qui ne constitue ni un aliment complet, ni un aliment complémentaire, n'est donc pas un aliment composé pour animaux, mais un ingrédient entrant dans la fabrication d'aliments composés pour animaux ;

qu'en considérant le contraire pour entrer en voie de condamnation à l'encontre de Noël X..., la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les textes susvisés ;

"alors que, de seconde part, toute falsification d'un produit implique le recours à une manipulation ou à un traitement illicite ou non conforme à la réglementation en vigueur, de nature à en altérer la constitution physique ou la substance ; que Noël X... avait fait valoir, dans ses conclusions d'appel (cf. conclusions d'appel du demandeur, p. 10 et suiv.), que les investigations et analyses pratiquées par les services vétérinaires de l'Oise ont établi que le procédé de fabrication incrimé de la farine produite par la société Mauny ne conduisait pas à l'altération de sa constitution physique ou de sa substance ; que la cour d'appel a laissé sans réponse ce moyen péremptoire, entachant ainsi sa décision d'un défaut de réponse à conclusions" ;

Attendu que, pour déclarer Noël X..., dirigeant de la société Mauny, coupable de falsification de denrées destinées à l'alimentation des animaux, l'arrêt attaqué, qui relève que la farine animale produite par la société est un aliment composé au sens de l'article 2 du décret du 15 septembre 1986 relatif à la commercialisation des produits et substances destinées à l'alimentation des animaux, retient que le prévenu savait que des boues issues de la station d'épuration traitant les eaux usées y étaient incorporées, en méconnaissance de l'interdiction résultant de l'arrêté du 16 mars 1989 portant application du décret précité ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, exemptes d'insuffisance comme de contradiction, et relevant de son appréciation souveraine, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Agostini conseiller rapporteur, M. Roman conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-82902
Date de la décision : 04/02/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, chambre correctionnelle, 31 janvier 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 04 fév. 2003, pourvoi n°02-82902


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.82902
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