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04/02/2003 | FRANCE | N°02-81392

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 04 février 2003, 02-81392


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre février deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire BEAUDONNET et les observations de la société civile professionnelle CELICE, BLANCPAIN et SOLTNER, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Jean,

contre l'arrêt de la cour d'appel de GRENOBLE, chambre correctionnelle, en date du 25 janvi

er 2002, qui, pour homicide et blessures involontaires et contravention connexe, l'a condamné ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre février deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire BEAUDONNET et les observations de la société civile professionnelle CELICE, BLANCPAIN et SOLTNER, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Jean,

contre l'arrêt de la cour d'appel de GRENOBLE, chambre correctionnelle, en date du 25 janvier 2002, qui, pour homicide et blessures involontaires et contravention connexe, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis, 1 500 et 225 euros d'amendes, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 112-1, 121-3 dans sa rédaction issue de la loi n° 2000-147 du 10 juillet 2000, 221-6 et 222-20 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Jean X... coupable des délits d'homicide involontaire commis à l'encontre d'Anne-Sophie Y... et de blessures involontaires commises à l'encontre de Samuel Z... et de Nicolas A... ;

"aux motifs que "il ressort des constatations des gendarmes que la chaussée était mouillée en raison de la pluie tombant au moment de l'accident, la visibilité est bonne et que n'a été relevé aucune trace de freinage ou de dérapage, ni obstacle ayant pu gêner la conductrice ; que prêté 6 jours avant l'accident à la victime en exécution d'une convention régulièrement signée avec Jean X..., son propriétaire, la "Renault 21" avait subi un contrôle technique 1 mois auparavant, le 28 septembre 1999, duquel il était résulté que le pneumatique arrière droit présentait une usure irrégulière ; qu'au moment de l'accident ce véhicule avait parcouru, depuis le contrôle technique, la distance de 1 426 kilomètres ; que de l'examen technique confiée par le procureur de la République à une personne qualifiée, il résulte que si les pneumatiques de l'avant du véhicule prêté par Jean X... étaient en excellent état, le pneumatique de l'arrière droit présentait une usure importante, en dessous des normes et le pneumatique de l'arrière gauche une usure limite mais encore dans les normes ; que ces constatations ont été parfaitement corroborées par les photographies desdits pneumatiques qui, prises par l'homme de l'art, ont été jointes au dossier ; en conséquence, qu'en agissant ainsi, Jean X... a méconnu sciemment les articles R. 59 du Code de la route ancien et R. 314-1 du nouveau Code de la route imposant au propriétaire de véhicule une obligation de sécurité ou de prudence entrant dans la constitution de l'homicide et des blessures involontaires à lui reprochés ; qu'un lien de

causalité certaine entre cette faute et les dommages corporels constatés apparaît établi aux termes de l'avis de la personne qualifiée qui, requise par le procureur de la République, a précisé que "l'état des pneumatiques arrière est la cause principale de cet accident, compte tenu de l'état de la chaussée rendue glissante par la pluie", avis encore confirmé par une notice technique émanant de l'entreprise Michelin régulièrement produite aux débats par l'avocat des ayants-droit d'Anne-Sophie Y... ; que cet avis apparaît encore conforté par le témoignage de Nicole Caillon qui a vu le véhicule en cause "glisser comme sur du verglas" ; qu'enfin, il n'a pas été établi, à l'encontre d'Anne-Sophie Y..., une quelconque faute de conduite à l'origine de la survenance de l'accident, en dépit des appréciations subjectives formulées par deux témoins et par Samuel Z... non autrement étayées par des éléments objectifs, alors surtout que la glissade de la "Renault 21" en travers de la chaussée dans les derniers instants précédant l'accident pouvait fausser l'évaluation de la vitesse de la part de deux conducteurs circulant sur la voie opposée à celle d'Anne-Sophie Y... ; qu'en cet état, cette faute personnelle de Jean X... suffit pour sa caractérisation, sans qu'il y ait lieu de caractériser sa particulière gravité au sens de l'article 121-3, alinéa 3, du Code pénal, dès lors qu'elle présente un lien de causalité direct avec le décès d'Anne-Sophie Y... ainsi qu'avec les blessures subies par Samuel Z... et par Nicolas A... ; qu'en toute hypothèse, ladite faute consistant à laisser des pneus en mauvais état sur un véhicule automobile s'analyse également en une faute caractérisée par la gravité de la carence ou défaillance imputable à une personne qui, par sa profession, connaît parfaitement les grands dangers, pour la sécurité routière, de l'utilisation de pneumatiques trop usagés sur un véhicule automobile, dont il doit même normalement avertir les usagers de la route" ;

"alors, d'une part, qu'aux termes de l'article 121-3 du Code pénal, celui qui a créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n'a pas pris les mesures permettant de l'éviter, ne peut être poursuivi que comme auteur indirect de l'infraction, ce qui nécessite que soit caractérisée à son encontre une violation manifestement délibérée d'une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, ou une faute caractérisée exposant autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer ; qu'en désignant Jean X... l'auteur direct de l'accident et en déclarant celui-ci coupable du délit d'homicide involontaire sans qu'il y ait lieu de caractériser la particulière gravité de la faute qui lui était reprochée, cependant que Jean X... n'avait fait que prêter, six jours auparavant, un véhicule dont l'un des pneumatiques présentait une usure irrégulière, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen ;

"alors, d'autre part, que prive sa décision de base légale la cour d'appel qui affirme que le fait pour Jean X..., garagiste, de laisser circuler un véhicule équipé de pneumatique en mauvais état constituerait une faute caractérisée au sens de l'article 121-3 du Code pénal, tout en relevant par ailleurs que le contrôle technique obligatoire effectué un mois auparavant, s'il avait mentionné l'usure irrégulière d'un pneumatique, n'avait cependant pas imposé son remplacement dans la mesure où celui-ci satisfaisait aux prescriptions réglementaire, et qui élude en outre sans aucun motif toutes les considérations des premiers juges selon lesquelles l'accident était au moins en partie dû à une faute de conduite d'Anne-Sophie Y... qui avait abordé à une vitesse excessive sous la pluie un virage réputé dangereux" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt infirmatif attaqué que, le 3 novembre 1999, Anne-Sophie Y..., qui conduisait une voiture prêtée par Jean X..., garagiste, s'est, dans un virage signalé sur la gauche, mise en travers de la chaussée, et a heurté une camionnette qui circulait sur la voie opposée ; qu'elle est décédée dans l'accident ; que les conducteur et passager de la camionnette ont été blessés ; que Jean X... a été poursuivi pour homicide et blessures involontaires et utilisation d'un pneumatique défectueux ;

Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable des faits reprochés, les juges du second degré retiennent notamment que l'usure des pneumatiques arrière du véhicule conduit par Anne-Sophie Y... a contribué à la survenance de l'accident sur une chaussée rendue glissante par la pluie ; qu'en prêtant un véhicule ainsi équipé, Jean X... qui, par sa profession, connaît les graves dangers de l'utilisation de pneumatiques trop usagés, a commis une faute caractérisée ;

Attendu qu'en l'état de ces seules énonciations procédant de son appréciation souveraine, d'où il résulte que le prévenu, qui a contribué à créer la situation ayant permis la réalisation des dommages, a commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer, au sens des dispositions de l'article 121-3, alinéa 4, du Code pénal, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Beaudonnet conseiller rapporteur, M. Roman conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-81392
Date de la décision : 04/02/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

RESPONSABILITE PENALE - Homicide et blessures involontaires - Faute - Faute caractérisée - Garagiste - Prêt d'une voiture équipée de pneus usagés.


Références :

Code pénal 121-3 alinéa 4

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, chambre correctionnelle, 25 janvier 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 04 fév. 2003, pourvoi n°02-81392


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.81392
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