La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/01/2003 | FRANCE | N°02-84044

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 janvier 2003, 02-84044


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux janvier deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller X..., les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par:

- LA SOCIETE PELLENC, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de NIMES, en date du 13 mai 20

02, qui, dans l'information suivie sur sa plainte, contre personne non dénommée, du chef de...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux janvier deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller X..., les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par:

- LA SOCIETE PELLENC, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de NIMES, en date du 13 mai 2002, qui, dans l'information suivie sur sa plainte, contre personne non dénommée, du chef de faux en écriture publique, a déclaré irrecevable sa constitution de partie civile ;

Vu l'article 575, alinéa 2, 2 , du Code de procédure pénale ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 81, 85, 86, 575-1 et 2 , 592 et 593 du Code de procédure pénale, 441-1, 441-4 du Code pénal ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable la plainte avec constitution de partie civile de la SA Pellenc ;

"aux motifs que les délibérations des juges sont secrètes ; que la partie civile n'est pas recevable à contester, sous couvert d'une qualification pénale, les conditions dans lesquelles les juges ont délibéré, et le juge d'instruction n'est pas autorisé à instruire sur ces fautes ; que ni le contenu des motifs d'une décision juridictionnelle, ni la teneur de son dispositif ne peuvent être, pour le magistrat qui en est l'auteur, constitutif d'une infraction pénale ;

"alors, d'une part, qu'une plainte avec constitution de partie civile est recevable dès lors qu'elle s'appuie sur des circonstances faisant apparaître comme possible l'existence d'un préjudice en relation directe avec une infraction pénale ; que les jugements sont des actes publics et authentiques, susceptibles de faire l'objet d'un faux ; que, dès lors, la plainte de l'employeur reprochant à la rédaction d'un jugement de Conseil de Prud'hommes de n'être pas conforme au délibéré, dans un sens qui lui était défavorable, s'appuie sur des faits qui, s'ils sont établis, sont susceptibles de caractériser un faux en écriture publique et de nature à porter préjudice au plaignant ; qu'en déclarant irrecevable une telle plainte, sans avoir procédé à aucune vérification sur les faits allégués, l'arrêt attaqué a violé les textes visés au moyen ;

"alors, d'autre part, que le secret du délibéré ne saurait faire obstacle aux pouvoirs que le juge d'instruction tient de l'article 81 du Code de procédure pénale d'accomplir tout acte utile à la manifestation de la vérité dès lors que les faits dont il est saisi sont susceptibles d'une qualification pénale ;

"alors, enfin, qu'aucun texte ne crée une immunité pour un magistrat susceptible d'avoir commis une infraction pénale, fût-ce à l'occasion de l'exercice de ses fonctions" ;

Vu les articles 441-1 et 441-4 du Code pénal, ensemble les articles 2, 85, 86 et 593 du Code de procédure pénale ;

Attendu que, pour qu'une constitution de partie civile soit recevable devant la juridiction d'instruction, il suffit que les circonstances sur lesquelles elle s'appuie fassent apparaître comme possible l'existence d'un préjudice en relation directe avec une infraction à la loi pénale ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, que, le 21 mai 2001, la société PELLENC a porté plainte avec constitution de partie civile du chef de faux en écriture publique contre le juge départiteur du conseil de prud'hommes d'AVIGNON auquel elle reproche d'avoir, dans l'instance l'opposant à un salarié, rédigé et signé, en faveur de ce dernier, un jugement non conforme au délibéré ;

Attendu que, pour infirmer l'ordonnance du juge d'instruction et déclarer cette constitution de partie civile irrecevable, les juges du second degré énoncent, notamment, d'une part, qu'en raison du secret des délibérations des juges, la partie civile n'est pas recevable à contester, sous couvert d'une qualification pénale, les conditions dans lesquelles les juges ont délibéré, et, d'autre part, que ni le contenu des motifs d'une décision juridictionnelle ni la teneur de son dispositif ne peuvent être, pour le magistrat qui en est l'auteur, constitutifs d'une infraction pénale ;

Qu'ils ajoutent que les décisions de justice ne peuvent être critiquées que par l'exercice des voies de recours ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que les faits allégués, à les supposer établis, sont susceptibles de recevoir une qualification pénale et de porter une atteinte directe aux intérêts de la société plaignante, la chambre de l'instruction a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs,

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de NIMES, en date du 13 mai 2002 ;

Vu l'article L. 131-5 du Code de l'organisation judiciaire ;

Et attendu que la Cour de Cassation est en mesure d'appliquer la règle de droit ;

DECLARE RECEVABLE en l'état la constitution de partie civile ;

DIT n'y avoir lieu à RENVOI ;

ORDONNE le retour du dossier au juge d'instruction saisi ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nîmes, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé.

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Rognon conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-84044
Date de la décision : 22/01/2003
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ACTION CIVILE - Partie civile - Constitution - Constitution à l'instruction - Recevabilité - Préjudice en relation directe avec une infraction à la loi pénale - Possibilité - Condition suffisante.


Références :

Code de procédure pénale 2, 85, 86

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de NIMES, 13 mai 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 22 jan. 2003, pourvoi n°02-84044


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.84044
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award