AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux janvier deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller DULIN et les observations de la société civile professionnelle BACHELLIER et POTIER de la VARDE, avocat en la Cour ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Gilles,
contre l'arrêt de la cour d'appel de CAEN, chambre correctionnelle, en date du 18 février 2002, qui, pour recel d'abus de biens sociaux, l'a condamné à 4 500 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1351 du Code civil, 321-1 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Gilles X... coupable de recel de fonds provenant d'un abus de biens sociaux ;
"aux motifs que la condamnation de Martine Y... étant définitive, il est définitivement jugé que les sommes de 80 000 francs et 12 500 francs ont été par elle retirées et qu'il en a été fait un usage contraire à l'intérêt social, à des fins strictement personnelles ;
"alors que l'autorité de la chose jugée n'interdit pas, en ce qui concerne le receleur, d'apprécier différemment les faits déclarés constants à l'égard de l'auteur principal par une précédente décision devenue définitive ; qu'en l'espèce, pour justifier ses conclusions aux fins de relaxe du chef de recel de fonds provenant d'un abus de biens sociaux, Gilles X... soutenait que l'abus de biens sociaux reproché à Martine Y... n'était pas caractérisé dès lors que le retrait de fonds sociaux opéré par elle pour lui rembourser une dette personnelle avait été enregistré dans les comptes de la société sous une qualification demeurée inconnue en l'absence de toute investigation réalisée sur ce point ; qu'en s'abstenant de répondre à cette articulation essentielle pour opposer à Gilles X..., à tort, la décision passée en force de chose jugée qui avait déclaré Martine Y... coupable d'abus de biens sociaux, la cour d'appel a entaché sa décision d'une insuffisance de motifs" ;
Attendu que, pour retenir Gilles X... dans les liens de la prévention du chef de recel d'abus de biens sociaux, l'arrêt attaqué énonce que Martine Y..., déclarée coupable d'abus de biens sociaux, n'avait aucun rôle effectif dans la société OCT dont elle était gérante de droit et qu'elle ne faisait qu'exécuter les ordres du prévenu ;
que l'arrêt ajoute qu'elle a prélevé, dans son intérêt personnel, des sommes dans les comptes sociaux de cette société et les a remises au prévenu afin de le rembourser des apports qu'il avait faits ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors qu'il est sans conséquence que cette opération ait été enregistrée dans les comptes de la société, la cour d'appel a caractérisé en tous ses éléments constitutifs le délit d'abus de biens sociaux avant de déclarer le prévenu coupable de recel de cette infraction ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Dulin conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;