La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/01/2003 | FRANCE | N°02-80657

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 janvier 2003, 02-80657


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux janvier deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SAMUEL, les observations de Me VUITTON, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Franck,

- Y... Eric,

contre l'arrêt de la cour d'appel de METZ, chambre correctionnelle, en date du 13 décembre 2001, qui, pour infractions à l

a législation sur le démarchage, complicité d'escroquerie, d'abus de faiblesse et de tentatives d'e...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux janvier deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SAMUEL, les observations de Me VUITTON, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Franck,

- Y... Eric,

contre l'arrêt de la cour d'appel de METZ, chambre correctionnelle, en date du 13 décembre 2001, qui, pour infractions à la législation sur le démarchage, complicité d'escroquerie, d'abus de faiblesse et de tentatives d'escroquerie, les a condamnés chacun à 4 mois d'emprisonnement et 7 500 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé pour Franck X..., pris de la violation des articles 388 du Code de procédure pénale, 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme et de l'article préliminaire du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a requalifié en complicité de délits d'abus de faiblesse et de tentatives d'escroquerie les délits d'abus de faiblesse et de tentatives d'escroquerie initialement reprochés à Franck X..., ce dernier coupable de délits ainsi requalifiés et a statué sur l'action publique et civile ;

"aux motifs que sont particulièrement condamnables les pratiques de fonctionnement mises en oeuvre par les prévenus Franck X... et Eric Y... consistant en :

- la fabrication immédiate des matériaux et leur livraison au secteur malgré la rétractation des clients et avant l'expiration du délai de rétractation ;

- la livraison ou la tentative de livraison, au besoin dans le voisinage, malgré la rétractation intervenue, ce procédé équivalant à une livraison forcée ;

- l'instruction mise en évidence par l'information, donnée aux chefs de groupe qui centralisent les commandes, de placer la marchandise et ce même moyennant une réduction de prix, étant prévu au surplus en cas d'échec des sanctions à l'encontre du salarié, voire des retenues sur salaires ; que c'est donc à tort que les premiers juges sont entrés en voie de relaxe au profit des prévenus pour la majeure partie des faits visés à la prévention, à l'exception des quatre cas de tentative d'escroquerie effectivement retenus, en considérant qu'il ne pouvait leur être reproché aucun fait personnel, alors que les éléments du dossier et les débats, ainsi que l'analyse évoquée plus haut, conduisent à juger que les deux prévenus se sont en réalité rendus coupables de complicité relativement à l'ensemble des délits poursuivis par provocation ou instigation et qu'ils ne pouvaient qu'avoir conscience de ce qu'ils provoquaient en incitant à la commission de l'action principale par les auteurs matériels des faits, la provocation et l'instigation ici caractérisées étant en conséquence forcément antérieures à la perpétration de ces faits dans la plupart des cas ; que dans le cas de l'envoi de mise en demeure comminatoire destinées à forcer la résistance de clients, cet acte effectivement postérieur à la conclusion du contrat constitue néanmoins un acte de complicité en ce qu'il est la mise en oeuvre du mode de fonctionnement défini à l'avance et conçu par les dirigeants de EP DIFFUSION ; qu'ainsi la Cour estime trouver dans la cause les éléments suffisants pour requalifier les délits de tentatives d'escroquerie et d'abus de faiblesse en complicité des mêmes délits et pour considérer que cette complicité est établie ;

"alors que s'il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c'est à la condition que le prévenu ait été mis en demeure de se défendre sur la nouvelle qualification envisagée ; qu'en l'espèce, Franck X... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour y répondre notamment des délits de tentative d'escroquerie et d'abus de faiblesse ; qu'en requalifiant ces faits en complicité d'escroquerie et complicité d'abus de faiblesse, sans que Franck X... ait été en mesure, au préalable, de préparer sa défense sur les nouvelles qualifications envisagées, la Cour a violé les textes visés au moyen" ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé pour Eric Y..., pris de la violation des articles 388 du Code de procédure pénale, 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme et de l'article préliminaire du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a requalifié en complicité de délits d'abus de faiblesse et de tentatives d'escroquerie les délits d'abus de faiblesse et de tentatives d'escroquerie initialement reprochés à Eric Y..., ce dernier coupable de délits ainsi requalifiés et a statué sur l'action publique et civile ;

"aux motifs que sont particulièrement condamnables les pratiques de fonctionnement mises en oeuvre par les prévenus Franck X... et Eric Y... consistant en :

- la fabrication immédiate des matériaux et leur livraison au secteur malgré la rétractation des clients et avant l'expiration du délai de rétractation ;

- la livraison ou la tentative de livraison, au besoin dans le voisinage, malgré la rétractation intervenue, ce procédé l'équivalant à une livraison forcée ;

- l'instruction mise en évidence par l'information, donnée aux chefs de groupe qui centralisent les commandes, de placer la marchandise et ce même moyennant une réduction de prix, étant prévu au surplus en cas d'échec des sanctions à l'encontre du salarié, voire des retenues sur salaires ; que c'est donc à tort que les premiers juges sont entrés en voie de relaxe au profit des prévenus pour la majeure partie des faits visés à la prévention, à l'exception des quatre cas de tentative d'escroquerie effectivement retenus, en considérant qu'il ne pouvait leur être reproché aucun fait personnel, alors que les éléments du dossier et les débats, ainsi que l'analyse évoquée plus haut, conduisent à juger que les deux prévenus se sont en réalité rendus coupables de complicité relativement à l'ensemble des délits poursuivis par provocation ou instigation et qu'ils ne pouvaient qu'avoir conscience de ce qu'ils provoquaient en incitant à la commission de l'action principale par les auteurs matériels des faits, la provocation et l'instigation ici caractérisées étant en conséquence forcément antérieures à la perpétration de ces faits dans la plupart des cas ; que dans le cas de l'envoi de mise en demeure comminatoire destinées à forcer la résistance de clients, cet acte effectivement postérieur à la conclusion du contrat constitue néanmoins un acte de complicité en ce qu'il est la mise en oeuvre du mode de fonctionnement défini à l'avance et conçu par les dirigeants de EP DIFFUSION ; qu'ainsi la Cour estime trouver dans la cause les éléments suffisants pour requalifier les délits de tentatives d'escroquerie et d'abus de faiblesse en complicité des mêmes délits et pour considérer que cette complicité est établie ;

"alors que s'il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c'est à la condition que le prévenu ait été mis en demeure de se défendre sur la nouvelle qualification envisagée ; qu'en l'espèce, Eric Y... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour y répondre notamment des délits de tentative d'escroquerie et d'abus de faiblesse ; qu'en requalifiant ces faits en complicité d'escroquerie et complicité d'abus de faiblesse, sans que Eric Y... ait été en mesure, au préalable, de préparer sa défense sur les nouvelles qualifications envisagées, la Cour a violé les textes visés au moyen" ;

Les moyens étant réunis ;

Vu l'article 388 du Code de procédure pénale, ensemble l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme et l'article préliminaire du Code de procédure pénale ;

Attendu que, s'il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c'est à la condition que le prévenu ait été en mesure de se défendre sur la nouvelle qualification envisagée ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que Franck X... et Eric Y... ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel pour tentatives d'escroquerie, abus de faiblesse, complicité d'escroqueries et infractions à la législation sur le démarchage ;

Attendu que les juges du second degré ont requalifié d'office les faits poursuivis des chefs de tentatives d'escroquerie et abus de faiblesse en complicité desdits délits, sans avoir invité les prévenus à s'expliquer sur cette nouvelle qualification ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et du principe ci-dessus énoncé ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de cassation proposés ;

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Metz, en date du 13 décembre 2001, et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Colmar, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Metz, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé.

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Samuel conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-80657
Date de la décision : 22/01/2003
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

JURIDICTIONS CORRECTIONNELLES - Disqualification - Conditions - Prévenu mis en mesure de se défendre sur la nouvelle qualification envisagée.


Références :

Code de procédure pénale 388
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950, art. 6.1

Décision attaquée : Cour d'appel de METZ, chambre correctionnelle, 13 décembre 2001


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 22 jan. 2003, pourvoi n°02-80657


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.80657
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award