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22/01/2003 | FRANCE | N°01-88651

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 janvier 2003, 01-88651


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux janvier deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller CHALLE et les observations de Me CHOUCROY, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Yves,

contre l'arrêt de la cour d'appel de BASSE-TERRE, chambre correctionnelle, en date du 13 novembre 2001, qui, pour abus de confiance aggravé, l'a condamné à 15

mois d'emprisonnement avec sursis, 200 000 francs d'amende et 2 ans d'interdiction professi...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux janvier deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller CHALLE et les observations de Me CHOUCROY, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Yves,

contre l'arrêt de la cour d'appel de BASSE-TERRE, chambre correctionnelle, en date du 13 novembre 2001, qui, pour abus de confiance aggravé, l'a condamné à 15 mois d'emprisonnement avec sursis, 200 000 francs d'amende et 2 ans d'interdiction professionnelle ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 445, 446, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué, qui fait état de l'audition des témoins Y... et Z... à la demande du conseil du prévenu, ne constate pas que ces témoins ont prêté le serment de dire toute la vérité, rien que la vérité, prévu par l'article 446 du Code de procédure pénale ;

"alors que les dispositions de l'article 446 relatives au serment que les témoins doivent prêter avant de commencer leur déposition devant une juridiction de jugement correctionnel, sont punies à peine de nullité de la décision, de sorte qu'en l'espèce l'arrêt attaqué ne peut qu'être censuré" ;

Attendu que le demandeur ne saurait se faire un grief de l'inobservation des dispositions de l'article 446 du Code de procédure pénale relatives au serment des témoins, dès lors que les juges ne se sont pas fondés sur les déclarations de ces témoins pour asseoir leur conviction sur la culpabilité ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 668 et 593 du Code de procédure pétale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué, a rejeté la demande du prévenu en annulation du jugement en raison de la partialité du tribunal correctionnel ;

"aux motifs qu' iI n'appartient pas à la présente chambre de faire application de la procédure de récusation prévue par l'article 668 du Code de procédure pénale, que la saisine du Président de la cour d'appel est prévue par l'article 669 du Code de procédure pénale ; que le fait que l'épouse du Président du tribunal correctionnel ait travaillé pendant deux ans en 1991 et 1992 avec Yves X..., alors clerc de notaire, au sein d'une étude à Pointe à Pitre, ne suffit pas pour suspecter M. A... de partialité ; que la réalité de manifestations assez graves pour faire suspecter l'impartialité ou l'inimitié de M. A... ne ressort ni des diverses attestations ni des débats, qu'il n'apparaît pas inutile de mentionner qu'avant le jugement du 10 novembre 2000, Yves X... ne supposait pas la prétendue partialité de M. A..., que la sévérité de la décision que le tribunal a adopté en collégialité ne suffit pas à établir la partialité de son président, qu'enfin le jugement est sérieusement motivé en fait et en droit, ce qui exclut toute partialité de la juridiction correctionnelle qui a statué ;

"alors que, aux termes de l'article 668 du Code de procédure pénale un juge peut être récusé quand il y a eu entre lui ou son conjoint et une des parties au procès-pénal, des manifestations assez graves pour faire suspecter son impartialité, qu'en outre l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales impose le respect du principe du droit pour tout accusé à un procès équitable devant un tribunal impartial, qu'en l'espèce, si le prévenu invoquait ces dispositions pour solliciter l'annulation du jugement, en soutenant dans ses conclusions d'appel qu'après le jugement qui, pour un prétendu abus de confiance qu'il avait lui-même révélé avant de rembourser aussitôt les sommes prétendument détournées, l'avait condamné à une peine de deux ans d'emprisonnement dont six mois ferme, il avait appris que l'épouse du Président de cette juridiction l'avait accusé devant diverses personnes de n'avoir pas tenu des promesses d'embauche qu'il lui avait faites pour la faire venir de métropole en Guadeloupe avec ses deux jeunes enfants, lui causant ainsi un préjudice important en la plaçant dans une situation précaire, la Cour, qui n'a pas même cru devoir faire état de l'existence des sommations interpellatives que le prévenu invoquait dans ses conclusions d'appel pour démontrer la réalité des manifestations d'hostilité de l'épouse du Président du tribunal à son encontre et qui a considérablement diminué les peines infligées par le tribunal, a laissé sans réponse un moyen péremptoire des conclusions du prévenu en se contentant d'énoncer des motifs inopérants au regard du principe d'impartialité résultant de

l'article 6-1 de la Cour européenne des droits de l'homme" ;

Attendu que le moyen, qui fait grief à la cour d'appel d'avoir rejeté la demande d'annulation du jugement du tribunal correctionnel dont l'impartialité était contestée par le prévenu, est inopérant, dès lors que, si elle avait annulé la décision, elle aurait évoqué et statué sur le fond en application de l'article 520 du Code de procédure pénale ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 406 de l'ancien Code pénal, 314-1, 314-3 et suivants du Nouveau Code pénal, 459 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, défaut de réponse a conclusions, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Yves X... coupable d'abus de confiance par officier ministériel ;

"aux motifs qu'en créant en 1999 une société dénommée Caraïbes Invest dont la dénomination est proche de celle dont les fonds conservés depuis 1994 (Société Caraïbes Expansion) vont être retirés par M. B... à des fins personnelles, qu'en conservant pendant quatre ans sur un compte de l'étude des fonds non réclamés qui auraient dû être consignés à la Caisse Des Dépôts et Consignations, qu'en utilisant pour transférer les fonds sur un compte de la société Caraïbes Invest le chéquier de l'étude en faisant inscrire comme bénéficiaire sur le double du chèque consacré au sein de l'étude non pas Caraïbes Invest mais Caraïbes Expansion, qu'en dévoilant ensuite aux inspecteurs nationaux le fait qu'il a prélevé des sommes non réclamées par un client de l'étude à son profit et en qualifiant dans sa lettre du 10 mai 2000 ce prélèvement de "détournement" ; qu'en utilisant les fonds à titre personnel, Yves X... a manifestement fait preuve de mauvaise foi dans le prélèvement révélant une intention frauduleuse de s'approprier l'argent d'autrui, sans que le fait que les sommes déposées au sein de son étude depuis 1994 n'aient pas été réclamées pendant quatre ans par leur véritable propriétaire ne fasse disparaître la volonté d'Yves X... de s'approprier de mauvaise foi une somme ne lui appartenant pas ; sans que le fait qu'Yves X... ait consigné ensuite le 15 mai 2000 ladite somme entre les mains de Me Lamo dans l'intention de la rembourser et ait rencontré des difficultés pour reconstituer les fonds ne fasse disparaître l'infraction alors qu'Yves X... a consigné ladite somme après la mise à jour des faits délictueux qu'il a révélés le 10 mai 2000 ; sans que le fait que ladite somme ait été délaissée par la société Caraïbes Expansion en redressement judiciaire en novembre 1995 ne fasse disparaître l'infraction alors que ladite somme qui aurait dû être portée à l'actif de la société en redressement judiciaire dès 1994 était le gage des créanciers de la société Caraïbes Expansion dès l'ouverture de la procédure collective en 1995 et que le prélèvement d'Yves X... a été opéré à leur détriment ; sans que les difficultés alléguées par Yves X... dans l'obtention d'un financement pour réaliser l'informatisation de son étude ne l'autorisent à effectuer ledit prélèvement à son profit, que par conséquent, l'infraction d'abus de confiance est constituée tant dans son élément matériel

que son élément moral ;

"alors que, d'une part, après avoir relevé que le demandeur avait transmis les fonds, qui lui avaient été remis par l'acquéreur d'un terrain appartenant à la société Caraïbes Expansion, au créancier hypothécaire de cette dernière pour éteindre sa dette mais que les fonds lui avaient été retournés avant la mise en redressement judiciaire de cette personne morale, puisqu'il avait conservé les fonds ainsi délaissés au sein de son étude pendant quatre ans avant de les emprunter pour une courte période dans l'attente d'un prêt octroyé par le Crédit Agricole, qui devait lui permettre de les reconstituer et qu'il avait révélé de son propre chef cet emprunt aux inspecteurs venus contrôler son étude en consignant, quelques jours plus tard le montant de la somme empruntée, la Cour s'est mise en contradiction avec ses propres constatations qui excluaient toute volonté de détournement de la part du prévenu en affirmant néanmoins sa volonté d'appropriation des fonds du demandeur ;

"alors que, d'autre part, la Cour, qui a reconnu que les fonds litigieux avaient été délaissés après leur retour à l'étude du prévenu et la mise en redressement judiciaire de la société ayant vendu le terrain, n'a pas caractérisé l'élément matériel du délit d'abus de confiance dont elle a déclaré Me Yves X... coupable, en laissant sans réponse le moyen péremptoire des conclusions du demandeur, tiré de la déshérence des fonds et de l'absence de préjudice causé à qui que ce soit par ces agissements, qu'en effet, l'abus de confiance ne saurait être constitué puisque les agissements de Me Yves X... n'ont porté préjudice à personne, et ce, d'autant qu'aucune des parties à la vente n'avait réclamé cette somme et qu'aucune mise en demeure n'avait été adressée à Me Yves X... qu'il ne peut davantage y avoir de préjudice éventuel - ce que la Cour n'a d'ailleurs pas recherché - puisque les fonds ont été immédiatement consignés par Me Yves X... et qu'à tout moment, sans l'action pénale qui a été exercée contre celui-ci, ces fonds étaient intégralement couverts par le prêt que le Crédit Agricole avait accepté de consentir" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable ;

D'où il suit que le moyen qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Challe conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 01-88651
Date de la décision : 22/01/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de BASSE-TERRE, chambre correctionnelle, 13 novembre 2001


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 22 jan. 2003, pourvoi n°01-88651


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:01.88651
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