La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/01/2003 | FRANCE | N°02-84445

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 14 janvier 2003, 02-84445


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatorze janvier deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller POMETAN et les observations de la société civile professionnelle MONOD et COLIN, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Isabelle, partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NIMES, chambre correctionnelle, en date du 30 avril 2002, qui l'a d

éboutée de ses demandes après relaxe de Gérard Y... du chef de dénonciation calomnieuse et ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatorze janvier deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller POMETAN et les observations de la société civile professionnelle MONOD et COLIN, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Isabelle, partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NIMES, chambre correctionnelle, en date du 30 avril 2002, qui l'a déboutée de ses demandes après relaxe de Gérard Y... du chef de dénonciation calomnieuse et a prononcé sur une demande de dommages-intérêts présentée sur le fondement de l'article 472 du Code de procédure pénale ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles R. 812-11, R. 812-12 du Code de l'organisation judiciaire, 510, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué indique la présence de "Mme Z..., adjoint administratif" sous la mention de la composition de la chambre de l'instruction lors des débats ;

"alors qu'à défaut de mention de la prestation de serment de Mme Z..., laquelle n'a pas la qualité de greffier, l'arrêt attaqué ne met pas la Cour de Cassation en mesure de s'assurer de ce que les prescriptions des textes susvisés ont été respectées et, partant, de ce que la composition de la cour d'appel était régulière" ;

Attendu que la mention de l'assistance de la cour d'appel par un fonctionnaire faisant fonction de greffier implique la capacité de celui-ci ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 226-10 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a relaxé Gérard Y... du chef de dénonciation calomnieuse ;

"aux motifs que le procureur de la République avait requis auprès du juge d'instruction que soit prononcé un non-lieu dans cette affaire ; que, pour renvoyer Gérard Y... devant le tribunal correctionnel, le juge d'instruction de Mende a, par une interprétation discutable de la loi, estimé : "enfin, le mis en examen n'a jamais donné suite à son engagement de rapporter qui lui avait dénoncé ces faits et qu'ainsi, son refus de divulguer ses sources ne peut s'analyser que comme un souci de préserver la mise en cause de quelque co-auteur" ; que le tribunal a tout à fait correctement jugé qu'une telle interprétation de la loi n'était pas recevable ; qu'en outre, il ressort du courrier du 2 juillet 1999 rédigé par le président de la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de la Lozère, tout d'abord qu'Isabelle X... est mal fondée à soutenir que la procédure disciplinaire engagée à son encontre est basée sur le seul courrier de Gérard Y..., les griefs articulés contre elle par la CCI étant aussi nombreux que graves ; qu'en outre, la CCI indique clairement à propos des faits dénoncés par Gérard Y..., d'une part, que ces faits sont relevés, ce qui implique de la part de cet organisme une vérification et, d'autre part, elle ne fait nullement référence au courrier de Gérard Y... pour articuler ce grief qui n'est que l'un des cinq reprochés à Isabelle X... ; qu'aux termes de l'article 226-10 du Code pénal, il ne peut y avoir dénonciation calomnieuse que dans le cas d'une dénonciation exposant des faits que l'on sait totalement ou partiellement inexacts ; qu'en l'espèce, d'une part, Gérard Y... ne pouvait supposer que ces faits étaient matériellement inexacts, d'autre part, la CCI, vérification faite, les a retenus ; que, dans ces conditions, le jugement de relaxe est en voie de confirmation ;

"alors, d'une part, que le délit de dénonciation calomnieuse est constitué dès l'instant où le fait dénoncé est susceptible d'entraîner une sanction quelconque de l'autorité compétente, la réalisation de l'infraction ne requérant donc pas le prononcé effectif d'une telle sanction ; qu'une lettre de réclamation mettant nommément en cause une salariée étant nécessairement de nature à lui faire encourir une sanction disciplinaire, la cour d'appel ne pouvait entrer en voie de relaxe au seul motif que la procédure disciplinaire aurait été engagée à la faveur de griefs multiples sans référence expresse au courrier litigieux ; qu'en statuant pourtant en ce sens à la faveur de motifs inopérants, la cour d'appel a privé de nouveau sa décision de base légale ;

"alors, d'autre part, qu'en déduisant l'existence de vérifications matérielles entreprises par la CCI et, implicitement, l'exactitude matérielle des faits dénoncés, de la seule motivation du courrier adressé à la partie civile le 2 juillet 1999, la cour d'appel a statué à la faveur de motifs hypothétiques de nature à priver sa décision querellée de base légale ;

"alors, encore, que la cour d'appel ne pouvait entrer en voie de relaxe du chef de dénonciation calomnieuse sans s'en expliquer au regard de l'attestation de Mme A... régulièrement produite au débat, de laquelle il résultait pourtant que Gérard Y... était susceptible d'avoir agi de mauvaise foi en faisant état de faits dont il connaissait le caractère erroné ; qu'en s'en abstenant pourtant, la cour d'appel a entaché sa décision querellée d'un défaut de motifs ;

"alors, en outre, qu'à supposer même que Gérard Y... n'ait pas eu connaissance de l'inexactitude matérielle des faits reprochés, il n'en appartenait pas moins à la cour d'appel de rechercher s'il n'avait pas, à la faveur de la réclamation litigieuse, présenté sciemment les faits de manière tendancieuse afin de les faire apparaître, faussement, comme devant entraîner une sanction disciplinaire ; qu'en s'en abstenant, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"alors, enfin, qu'à supposer le raisonnement du juge d'instruction erroné en droit, il n'en appartenait pas moins à la cour d'appel de rechercher si le refus de Gérard Y... de dévoiler l'identité de ses informateurs n'était pas, comme le relevait l'ordonnance de renvoi, de nature à révéler sa mauvaise foi ; qu'en s'en abstenant encore de procéder à une telle recherche, la cour d'appel a entaché sa décision d'un ultime défaut de base légale" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Gérard Y... a été poursuivi devant le tribunal correctionnel pour avoir dénoncé calomnieusement, dans une lettre adressée au président de la chambre de commerce et d'industrie de la Lozère, des faits de nature à entraîner des poursuites administratives ou disciplinaires à l'encontre d'Isabelle X..., salariée de cet organisme ; que le tribunal a relaxé le prévenu et débouté la partie civile ;

Attendu que, pour confirmer cette décision sur l'appel du ministère public et de la partie civile, la cour d'appel prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, dont il se déduit que la mauvaise foi du prévenu n'est pas établie, la cour d'appel a justifié sa décision, sans encourir les griefs allégués ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Mais sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 470, 472, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Isabelle X... à verser à Gérard Y... la somme de 450 euros sur le fondement de l'article 472 du Code de procédure pénale ;

"aux motifs que la décision est également en voie de confirmation en ce qu'elle a débouté Isabelle X... de ses demandes sur l'action civile ; qu'y ajoutant, il convient, sur le fondement de l'article 472 du Code de procédure pénale, de la condamner à verser à Gérard Y... la somme de 450 euros ;

"alors que le seul fait pour Isabelle X..., à le supposer établi, d'avoir attrait à tort Gérard Y... devant la juridiction répressive n'implique en rien que cette action soit constitutive d'un abus au sens de l'article 472 du Code de procédure pénale ; qu'en la condamnant néanmoins sur le fondement de cet article sans justifier ni de sa mauvaise foi ni de sa témérité, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;

Vu l'article 472 du Code de procédure pénale ;

Attendu que, s'il résulte de ce texte que la partie civile, qui a elle-même mis en mouvement l'action publique, peut être condamnée à des dommages-intérêts pour abus de constitution de partie civile, il ne peut en être ainsi qu'autant qu'il est constaté par les juges qu'elle a agi de mauvaise foi ou témérairement ;

Attendu que, pour accorder des dommages-intérêts à Gérard Y..., l'arrêt se borne à énoncer qu'il convient de condamner la partie civile à verser au prévenu la somme de 450 euros ;

Attendu qu'en l'état de ce seul motif, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs,

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Nîmes, en date du 30 avril 2002, mais en ses seules dispositions ayant condamné la partie civile à des dommages-intérêts, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Montpellier, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Nîmes, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Pometan conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-84445
Date de la décision : 14/01/2003
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ACTION CIVILE - Partie civile - Mise en mouvement de l'action publique par la partie civile - Action abusive (article 472 du Code de procédure pénale) - Action récursoire en dommages-intérêts - Conditions.


Références :

Code de procédure pénale 472

Décision attaquée : Cour d'appel de NIMES, chambre correctionnelle, 30 avril 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 14 jan. 2003, pourvoi n°02-84445


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:02.84445
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award