AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé que le bail du 20 mai 1976 précisait qu'il était expressément convenu que la location était soumise au statut des baux ruraux, même dans le cas où le preneur pourrait être amené à exercer une profession commerciale dans le cadre de sa profession de pépiniériste et retenu que conformément à la volonté expresse et dénuée de toute ambiguïté du bailleur et du preneur, ceux-ci avaient entendu soumettre leurs relations contractuelles au statut des baux ruraux tant au moment de la conclusion du bail initial que lors de son renouvellement le 1er avril 1985, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 7 mai 2001), rendu sur renvoi après cassation (Civ.3, 5 octobre 1999, n° 1447 D) que M. X... a donné à bail qualifié de bail à ferme, divers terrains à M. Y... ; que M. Z... est intervenu à la rédaction de l'acte ; que le bail a été renouvelé le 1er avril 1985 ; que les consorts A... et autres (les héritiers) qui viennent aux droits de M. X..., décédé, ont donné congé à M. Y... pour le 1er avril 1994 sur la base de l'article L. 411-32 du Code rural, en raison du changement de la destination agricole ; que le preneur a contesté le congé et assigné les bailleurs et M. Z... en annulation du congé et en dommages-et-intérêts ;
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de dire le congé valable, alors, selon le moyen :
1 / que M. Y... et M. B... faisaient valoir dans leurs conclusions d'appel du 29 janvier 2001 qu'à supposer que le statut des baux ruraux fût applicable en l'espèce, les bailleurs ne pouvaient se prévaloir des dispositions de l'article L. 411-32 du Code rural dès lors que dès avant la signature du bail, les parcelles louées étaient déjà classées en zone urbaine de sorte qu'il n'y avait pas eu, en cours de bail, un changement de destination résultant d'un plan d'urbanisme ou d'un plan d'occupation des sols au sens de ce texte ; qu'en retenant que les bailleurs s'étaient légitimement prévalus des dispositions de l'article L. 411-32 du Code rural en l'état du classement en zone urbaine des parcelles louées au moment de la délivrance du congé sans répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / que constitue une fraude à la loi le fait, pour une partie, de faire jouer, au préjudice de son cocontractant une règle de droit pour en tourner une autre qui lui est moins favorable ; qu'en se fondant, pour exclure l'existence d'une fraude aux droits du preneur, sur la seule circonstance que la coïncidence de la date d'effet du congé avec celle de la date d'échéance contractuelle du bail lui était plus favorable qu'une résiliation qui aurait pu intervenir avant cette date, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la fraude ne résultait pas de la circonstance qu'en faisant coïncider la date de résiliation du bail à celle de son expiration, les bailleurs avaient été animés par le souci exclusif de priver ainsi M. Y... de son droit d'obtenir l'indemnité de résiliation prévue par l'alinéa 5 de l'article L. 411-32 du Code rural laquelle n'est due qu'au preneur qui est obligé de quitter les lieux avant la date de la fin du bail en cours, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe fraus omnia corrumpit ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a exactement relevé que l'article L. 411-32 du Code rural dispose que le propriétaire peut résilier le bail sur des parcelles dont la destination agricole peut être changée en application des dispositions d'un plan d'urbanisme ou d'un plan d'occupation des sols rendu public et approuvé et constaté qu'en l'espèce, au moment de la délivrance du congé, les parcelles visées à ce congé se trouvaient en zone classée urbaine du POS approuvé et publié de la commune ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant souverainement relevé que le congé respectait le préavis exigé par l'article L. 411-32 du Code rural et retenu que la coïncidence de la date d'effet du congé avec celle de la date d'échéance contractuelle du bail ne constituait pas une fraude aux droits du preneur, la cour d'appel a, répondant aux conclusions, légalement justifié sa décision ;
Sur le troisième moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant, par motifs propres et adoptés, retenu que les décisions administratives créant une zone d'aménagement concertée étaient publiées et opposables à tous et que M. Y... ne rapportait pas la preuve d'un manquement du rédacteur de l'acte de bail, dans son obligation de renseignement et de conseil, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne, ensemble, M. Y... et M. B..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne M. Y... et M. B..., ès qualités, à payer aux consorts A..., C..., à Mme D..., aux époux E..., à MM. F... et G..., à Mmes H... et à M. Hubert H..., ensemble, la somme de 1 900 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre deux mille deux.