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17/12/2002 | FRANCE | N°01-87178

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 17 décembre 2002, 01-87178


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-sept décembre deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller ANZANI, les observations de la société civile professionnelle GATINEAU, et de la société civile professionnelle PARMENTIER et DIDIER, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général COMMARET ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Pierre, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la

cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 4 octobre 2001, qui, dans l'information suiv...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-sept décembre deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller ANZANI, les observations de la société civile professionnelle GATINEAU, et de la société civile professionnelle PARMENTIER et DIDIER, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général COMMARET ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Pierre, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 4 octobre 2001, qui, dans l'information suivie contre Michel Y... du chef d'altération de preuve, a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction constatant l'extinction de l'action publique par la prescription ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 7, 8 et 434-4 du Code pénal et des articles 203, 382, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré les faits prescrits et a, en conséquence, confirmé l'ordonnance ayant déclaré n'y avoir lieu à suivre ;

"aux motifs que, "le délit reproché, à le supposer établi, a nécessairement été réalisé entre le 25 janvier et le 3 février 1993, dates du prélèvement et du dépôt du flacon au laboratoire ;

""le délit dénoncé est un délit instantané ;

""la plainte avec constitution de partie civile de Pierre X... a été déposée le 27 novembre 1996, soit plus de trois ans après la réalisation du délit ;

""par ailleurs, la procédure suivie contre Pierre X... du chef de destruction par incendie n'est pas connexe à la procédure actuelle au sens de l'article 203 du Code de procédure pénale ;

""cette procédure n'a donc pas eu pour effet de suspendre ou d'interrompre le cours de la prescription de l'action publique en la présente affaire" ;

"alors que la prescription du délit d'altération de preuves court à compter du jour où le délit est apparu et a pu être constaté dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique ; qu'en relevant, pour déclarer les faits prescrits, qu'une période de plus de trois ans s'était écoulée entre leur commission et la plainte avec constitution de partie civile déposée par Pierre X..., sans, à aucun moment, s'assurer que la date de commission des faits coïncidait avec celle à laquelle le délit était apparu et avait pu être constaté dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

"alors que Pierre X... faisait valoir qu'un double obstacle de droit l'avait empêché de déposer plainte avant le 18 novembre 1994 au moins ; qu'il soutenait n'avoir pu agir avant cette date sans encourir les peines de dénonciation calomnieuse, d'une part, sans se heurter à une décision de sursis à statuer jusqu'à la fin des poursuites pour incendie volontaire d'autre part ; qu'en s'abstenant de donner la moindre réponse à ce chef péremptoire du mémoire de Pierre X... tiré de l'obstacle de droit l'ayant empêché d'agir, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés ;

"alors qu'il est interdit au juge de procéder par voie d'affirmation ; qu'en l'espèce, en affirmant péremptoirement que la procédure suivie contre Pierre X... du chef de destruction par incendie n'était pas connexe à la procédure actuelle, sans, à aucun moment, préciser en quoi les circonstances de temps et de lieu des infractions à l'origine des deux procédures faisaient obstacle à ce que la connexité soit réalisée et, partant, sans à aucun moment permettre à la Cour de Cassation d'exercer son contrôle, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

"alors qu'outre la connexité entre les infractions litigieuses, Pierre X... invoquait leur indivisibilité comme cause d'interruption de l'action publique ; qu'en se bornant à relever que la procédure suivie contre Pierre X... n'est pas connexe à la procédure actuelle, sans à aucun moment répondre au chef du mémoire de Pierre X... tiré de l'existence d'un lien d'indivisibilité entre les deux procédures, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés" ;

Vu les articles 7, 8 du Code de procédure pénale et 434-4 du Code pénal ;

Attendu que le point de départ de la prescription du délit d'altération de preuves en vue de faire obstacle à la manifestation de la vérité doit être fixé au jour où le délit est apparu et a pu être constaté dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'à la suite d'un incendie, survenu le 24 janvier 1993 dans les locaux d'une société dirigée par Pierre X..., ce dernier a été mis en examen pour incendie volontaire et escroquerie, en raison, notamment, d'une expertise révélant la présence d'alcool à brûler sur les prélèvements effectués sur les lieux du sinistre et transmis au laboratoire par Michel Y..., expert de la compagnie d'assurances ; que, des expertises complémentaires, notamment des autres prélèvements conservés par l'huissier, et les mesures d'instruction ultérieures laissant supposer que l'alcool avait été ajouté postérieurement au sinistre et n'avait subi aucune combustion, Pierre X... a bénéficié d'une ordonnance de non-lieu confirmée par la chambre d'accusation le 20 juin 1996 ;

Attendu que Pierre X... a porté plainte et s'est constitué partie civile le 27 novembre 1996, contre Michel Y... du chef d'altération de preuve en vue de faire obstacle à la manifestation de la vérité ; qu'à l'issue de l'information, le juge d'instruction a rendu une ordonnance constatant l'extinction de l'action publique par l'effet de la prescription ;

Attendu que, pour confirmer cette décision, la chambre de l'instruction relève que le délit est instantané et que "la procédure suivie contre Pierre X... du chef de destruction par incendie n'est pas connexe à la procédure actuelle au sens de l'article 203 du Code de procédure pénale" ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans avoir pris en compte la date à laquelle la partie civile a cessé d'être dans l'ignorance de l'infraction, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus énoncé ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs,

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 4 octobre 2001, et pour qu'il soit jugé à nouveau, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nîmes, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, Mme Anzani conseiller rapporteur, M. Joly, Mmes Chanet, Mazars, MM. Beyer, Pometan conseillers de la chambre, MM. Desportes, Ponsot, Valat, Mme Menotti conseillers référendaires ;

Avocat général : Mme Commaret ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 01-87178
Date de la décision : 17/12/2002
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

PRESCRIPTION - Action publique - Délai - Point de départ - Altération de preuves en vue de faire obstacle à la manifestation de la vérité.

ACTION PUBLIQUE - Extinction - Prescription - Délai - Point de départ - Altération de preuves en vue de faire obstacle à la manifestation de la vérité

ATTEINTE A L'ACTION DE JUSTICE - Entrave à la saisine de la justice - Obstacle à la manifestation de la vérité - Altération de preuves - Action publique - Prescription - Délai - Point de départ

La prescription du délit prévu par l'article 434-4 du Code pénal court du jour où cesse l'ignorance des procédés frauduleux dans laquelle a été tenue la partie lésée. (1).


Références :

Code de procédure pénale 7, 8
Code pénal 434-4

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre de l'instruction), 04 octobre 2001

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1996-06-05, Bulletin criminel 1996, n° 239 (1), p. 729 (cassation) ; Chambre criminelle, 1997-03-04, Bulletin criminel 1997, n° 83 (3), p. 270 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 17 déc. 2002, pourvoi n°01-87178, Bull. crim. criminel 2002 N° 233 p. 851
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2002 N° 233 p. 851

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : Mme Commaret.
Rapporteur ?: Mme Anzani.
Avocat(s) : la SCP Gatineau, la SCP Parmentier et Didier.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:01.87178
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