Attendu qu'à la suite d'un contrôle portant sur les années 1990 et 1991, l'URSSAF a réintégré dans l'assiette des cotisations sociales dues par la société Mercédès-Benz le coût des voyages et cadeaux offerts à certains de ses salariés, et à certains salariés de ses concessionnaires, à la suite de concours de ventes, ainsi que le coût du voyage des salariés du siège affectés à l'encadrement et l'animation, et a notifié à la société un redressement de 1 174 337 francs, outre 117 432 francs de majorations de retard ; qu'à la suite d'un second contrôle portant sur la période du 1er février 1993 au 31 décembre 1994, l'URSSAF a réintégré le coût des voyages offerts à des salariés et à des salariés de concessionnaires et a notifié à la société une mise en demeure de 3 342 306 francs, outre 334 230 francs de majorations de retard ; que l'arrêt attaqué (Versailles, 17 octobre 2000) a rejeté les recours de la société Mecédès-Benz et l'a condamnée à payer les sommes figurant dans les mises en demeure, y compris les majorations de retard ;
Sur le premier moyen et sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :
Attendu que la société Mercédès-Benz fait grief à la cour d'appel d'avoir rejeté son recours, alors, selon les moyens :
1° que l'obtention par les salariés de la société, lauréats de concours organisés par l'employeur, de voyages qui en constituent le prix ne peut, en raison de son caractère aléatoire inhérent au procédé du concours, être regardée comme la perception d'un élément de rémunération, fût-ce en nature, versée en contrepartie ou à l'occasion du travail ; que le Conseil d'état a déjà eu l'occasion, dans des arrêts en date du 10 février 1997, 21 juin 1995 et 31 juillet 1992, de décider que l'obtention de tels voyages ne pouvait être qualifiée de rémunération ou d'avantages en nature ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel viole l'article L.242-1 du Code de la sécurité sociale ;
2° que l'obtention par les salariés du concessionnaire, lauréats de concours organisés par le concédant, de voyages qui en constituent le prix ne peut, en raison de son caractère aléatoire inhérent au procédé du concours, être regardée comme la perception d'un élément de rémunération, fût-ce en nature, versée en contrepartie ou à l'occasion du travail ; que le Conseil d'état a déjà eu l'occasion dans des arrêts en date du 10 février 1997, 21 juin 1995 et 31 juillet 1992, de décider que l'obtention de tels voyages ne pouvait être qualifiée de rémunération ou d'avantages en nature ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel viole l'article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que l'arrêt retient à bon droit que les prix attribués par la société à ses salariés, ou à ceux de ses concessionnaires dans la mesure où ils lui seraient rattachés par un lien de subordination, constituent des compléments de rémunération en nature acquis en contrepartie ou à l'occasion du travail et que, dès lors, l'URSSAF devait en réintégrer le coût dans l'assiette des cotisations sociales, peu important leur qualification fiscale ; que les moyens ne sont pas fondés ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que la société Mercédès-Benz fait grief à la cour d'appel de l'avoir condamnée à payer les majorations de retard de 10 %, alors, selon le moyen, que, selon l'article R.243-20 du Code de la sécurité sociale, les employeurs peuvent formuler une demande gracieuse en réduction des majorations et pénalités de retard, la requête n'étant recevable qu'après le règlement de la totalité des cotisations ayant donné lieu à l'application des majorations ; que la demande est d'abord portée, selon les cas, devant le directeur de l'organisme de recouvrement ou la commission de recours amiable et, en cas de recours, devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, en sorte que l'assujetti ne peut saisir directement la juridiction contentieuse d'une demande de remise des majorations de retard ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel prive donc la société Mercédès-Benz de la possibilité de formuler une demande gracieuse de réduction de remise des majorations après le règlement des cotisations, en méconnaissance de l'article précité du Code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que, contrairement aux affirmations du moyen, la condamnation de la société au paiement de la majoration de retard de 10 % prévue par l'article R. 243-18 du Code de la sécurité sociale n'a pas pour effet de priver la société, après paiement de l'intégralité des cotisations, du droit de demander gracieusement la remise desdites majorations en application de l'article R.243-20 du même Code ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen, pris en ses cinq dernières branches :
Vu l'article L.242-1 du Code de la sécurité sociale, ensemble l'article L.121-1 du Code du travail ;
Attendu, selon le premier de ces textes, que, pour le calcul des cotisations de sécurité sociale, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion d'un travail effectué dans un lien de subordination ; que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que le travail au sein d'un service organisé peut constituer un indice du lien de subordination lorsque l'employeur détermine unilatéralement les conditions d'exécution du travail ;
Attendu que, pour rejeter le recours de la société Mercédès-Benz portant sur les voyages et les lots accordés aux salariés des sociétés concessionnaires, la cour d'appel retient que l'agent de contrôle a caractérisé une activité complémentaire déployée par ces salariés et profitable à la société Mercédès-Benz, de sorte que les concours constituaient une charge exposée dans l'intérêt de l'entreprise ; que les vendeurs, engagés dans un lien contractuel vis-à-vis des concessionnaires, étaient directement impliqués dans la campagne promotionnelle décidée par la société et que leur activité, si elle profitait au concessionnaire, profitait aussi à la société ; que l'opération visait en définitive à convaincre les salariés d'aller au-delà de leurs attributions normales et que les prix et voyages étaient attribués en contrepartie d'une tâche complémentaire, distincte qui ne constituait pas l'exécution normale des obligations découlant du contrat de travail, accomplie au sein d'un service organisé au profit de la société qui en dictait unilatéralement les conditions d'exécution en se réservant la possibilité de sélectionner les gagnants au vu des résultats contrôlés par ses propres salariés ; que des actions de motivation et d'incitation étaient régulièrement exercées sur les vendeurs, ce dont il découle a contrario des sanctions déguisées frappant les non participants, ou les moins performants en cas de participation ; que, par leur adhésion aux conditions du concours, les salariés acceptaient d'oeuvrer à la réalisation d'objectifs fixés par la société ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, sans caractériser le fait que les salariés des concessionnaires qui participaient aux concours avaient accompli sous la direction et le contrôle de la société Mercédès-Benz des tâches distinctes de celles qu'ils étaient tenus d'effectuer au profit de leur employeur en application de leur contrat de travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré bien fondé le redressement portant sur la valeur des voyages et prix remis aux salariés des sociétés concessionnaires, l'arrêt rendu le 17 octobre 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris.