AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1377 du Code civil, ensemble l'article 1315 du même Code ;
Attendu que lorsqu'une personne qui, par erreur, se croyait débitrice, a acquitté une dette, elle a le droit de répétition contre le créancier ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 11 octobre 2000), que, par marché du 23 novembre 1989, la société civile immobilière Les Espaces Saint-Julien (la SCI), représentée par la société Les Espaces d'entreprise "Espace Saint-Julien", maître de l'ouvrage, a chargé la société Désormeaux de l'exécution des travaux du lot n° 7 "Electricité-Chauffage" dans la construction d'un immeuble de bureaux, lequel, vendu à la société civile immobilière Santorin, a été donné en location à la société Educatel ; que la société Désormeaux a, en 1993, assigné en paiement de la somme retenue à titre de garantie le maître de l'ouvrage qui, par voie reconventionnelle, a réclamé à cet entrepreneur la restitution d'une somme qu'il lui aurait indûment versée en règlement de travaux supplémentaires non commandés ;
Attendu que, pour rejeter la demande de la société Désormeaux et accueillir la demande de la SCI, l'arrêt retient que s'il appartient à la SCI de rapporter la preuve du caractère indu du paiement des travaux supplémentaires auquel elle a procédé, il incombe toutefois à l'entrepreneur de démontrer qu'en payant ces travaux supplémentaires, le maître de l'ouvrage les a ratifiés ; que dès lors, le paiement sans réserves par la SCI de travaux réalisés sans ordre écrit de sa part ne peut valoir, en l'absence de preuve d'une renonciation de sa part au bénéfice des stipulations contractuelles, ratification desdits travaux ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la demande dirigée par la SCI contre la société Désormeaux était une action en répétition de l'indu et que c'était à la SCI, demanderesse, qu'il incombait de prouver qu'elle n'avait pas expressément accepté ces travaux supplémentaires en les payant sans réserves, après leur exécution, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 octobre 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Condamne la SCI Les Espaces Saint-Julien aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la SCI Les Espaces Saint-Julien à payer à la société Désormeaux la somme de 1 900 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois décembre deux mille deux.