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27/11/2002 | FRANCE | N°01-11131

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 27 novembre 2002, 01-11131


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 2 février 2001, n 76), que le 14 octobre 1985, la société civile immobilière du Prunier Hardy (SCI) a donné un appartement à bail aux époux X..., que le 24 février 1997, la bailleresse a proposé le renouvellement du bail moyennant un nouveau loyer aux locataires, que ces derniers ayant refusé l'offre, la SCI a saisi, le 30 juin 1997, la commission départementale de conciliation, puis assigné le

s preneurs en fixation du nouveau prix du bail ; que reconventionnellement, ceux...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 2 février 2001, n 76), que le 14 octobre 1985, la société civile immobilière du Prunier Hardy (SCI) a donné un appartement à bail aux époux X..., que le 24 février 1997, la bailleresse a proposé le renouvellement du bail moyennant un nouveau loyer aux locataires, que ces derniers ayant refusé l'offre, la SCI a saisi, le 30 juin 1997, la commission départementale de conciliation, puis assigné les preneurs en fixation du nouveau prix du bail ; que reconventionnellement, ceux-ci ont demandé la réduction du loyer pour troubles de jouissance et le remboursement des frais de dégorgement des vide-ordures ;

Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt de déclarer l'offre de renouvellement régulière, alors, selon le moyen :

1 ) que la cour d'appel, en énonçant que "le point de départ du renouvellement de ces engagements de location (avait été fixé), pour le dernier, au 9 mars 1997" par le premier juge et que la "proposition de renouvellement (avait été délivrée) le 5 août 1996", tout en adoptant expressément sur ce point les motifs du tribunal d'instance qui avait, au contraire, relevé que l'offre de renouvellement du bail avait été faite le 24 février 1997, c'est à dire moins d'un mois avant le renouvellement des engagements de location, a entaché sa décision d'une contradiction de motifs en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

2 ) qu'en cas de désaccord du propriétaire sur la proposition de renouvellement du bail faite par le bailleur, ce dernier doit, avant de saisir le juge, saisir la commission départementale de conciliation ; que l'absence de saisine ou la saisine tardive de la commission départementale de conciliation entraîne l'irrégularité de la saisine du juge et la reconduction du bail aux conditions antérieures ; qu'en relevant que le point de départ du renouvellement des engagements de location devait être fixé, soit par motifs propres, au 9 mars 1997, soit, par motifs adoptés du premier juge, au 14 octobre 1997, tout en considérant que la saisine de la commission départementale de conciliation par lettre recommandée du 30 juin 1997, c'est à dire respectivement plus de trois mois après l'échéance du bail ou seulement trois mois et deux semaines avant ladite échéance, était régulière, la cour d'appel a violé l'article 17 c de la loi du 6 juillet 1989 ;

3 ) que le contrat de bail conclu entre une personne morale et une personne physique le 14 octobre 1985 étant soumis aux dispositions de la loi Quilliot du 22 juin 1982, ne pouvait, en application de l'article 4 de cette loi, être conclu pour une durée inférieure à six ans ;

qu'ainsi, nonobstant les stipulations du bail du 14 octobre 1985, en vertu duquel le contrat était conclu pour une durée de trois ans, ce bail devait être considéré comme ayant été conclu pour six ans ; qu'en considérant, néanmoins, que le bail du 14 octobre 1985 était arrivé à sa première échéance le 13 octobre 1988, c'est à dire six ans plus tard, la cour d'appel a violé l'article 4 de la loi du 22 juin 1982 ;

Mais attendu, d'une part, qu'abstraction faite d'une erreur matérielle quant au point de départ du dernier renouvellement et à la date de délivrance de la proposition, sans conséquence pour la solution du litige, la cour d'appel qui a constaté que la saisine de la Commission départementale de conciliation avait eu lieu le 30 juin 1997, en a exactement déduit, en l'absence de délai impératif prévu, qu'elle se trouvait conforme aux exigences légales ;

Attendu, d'autre part, que les époux X... n'ayant pas soutenu, devant la cour d'appel, que le bail ne pouvait, en application de l'article 4 de la loi du 22 juin 1982, être conclu pour une durée inférieure à six ans, le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit ;

D'où il suit que, pour partie irrecevable, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant constaté qu'il résultait des pièces produites que si certains prêts étaient en cours, ceux-ci ne concernaient pas le bâtiment occupé par les locataires, la cour d'appel qui en a déduit que leur logement n'était plus soumis aux règles de plafonnement prévues par des prêts, a, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, légalement justifié sa décision de ce chef ;

Sur le troisième moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant constaté, par motifs adoptés, qu'en 1988, la SCI avait conclu un accord collectif, en application de l'article 42 de la loi du 23 décembre 1986, prévoyant une augmentation concertée des loyers, sur trois années, à partir de 1989, la cour d'appel qui en a déduit que la convention était expirée, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision de ce chef ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt de fixer à une certaine somme le montant du loyer, alors, selon le moyen :

1 ) que les articles 17 c et 19 de la loi du 6 juillet 1989 prévoient que le bailleur doit proposer un nouveau loyer par référence aux loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables ; que sont exclues les références relatives à des locations soumises à un régime dérogatoire de droit commun ; qu'est ainsi notamment exclue la référence à des logements soumis à une législation différente, indépendamment du régime juridique du bail et que doivent donc être exclus du secteur locatif libre les loyers des sociétés d'économie mixte, des sociétés de HLM, les loyers soumis à la loi de 1948, ainsi que les loyers de logements à vocation sociale tels ceux construits par des SCIC avec des financements privilégiés ; qu'en admettant comme références au titre des articles 17 c et 19 précités des loyers du secteur libre quand le bail de M. et Mme X... leur a été consenti pour un logement construit par une SCIC avec des financements privilégiés, au seul motif que la qualification juridique du bail est indépendante du mode de financement de la construction de l'immeuble, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 17 c et 19 de la loi du 6 juillet 1989 ;

2 ) que par conclusions récapitulatives, les époux X... soutenaient que "reconnaître à la SCI du Prunier Hardy, propriétaire d'immeubles qui ne lui ont rien coûté, la faculté de jouir de rentes du marché libre, serait porter atteinte au principe d'égalité de la concurrence" ; qu'en ne répondant par aucun motif à ce chef de conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

3 ) que l'article 1 b du décret du 31 août 1990 pris pour l'application de l'article 19 de la loi du 6 juillet 1989, dispose que les références de logements comparables servant à déterminer le loyer mentionnent "la qualité et l'époque de construction de l'immeuble" ; que ce texte implique nécessairement que soient pris en compte -outre des paramètres tels que le nombre de pièces, la surface ou les éléments d'équipement ou de confort- la vétusté et l'état d'entretien du logement ;

qu'en considérant néanmoins que la loi n'a pas imposé de prendre en considération l'état de vétusté et l'état d'entretien du logement, la cour d'appel a violé ensemble les articles 19 de la loi du 6 juillet 1989 et 1 b du décret du 31 août 1990 ;

4 ) qu'en tout état de cause, tout loyer, même fixé judiciairement en application de l'article 17 c de la loi du 6 juillet 1989, doit être déterminé au terme d'une appréciation in concreto qui tient compte de l'état de la chose louée ; que la fixation du loyer suppose ainsi, en toute hypothèse, la prise en compte de l'état de vétusté et de l'état d'entretien de la chose louée et notamment du logement ; qu'en refusant de prendre en considération l'état de vétusté et l'état d'entretien de l'immeuble loué par la SCI du Prunier Hardy, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 17 c et 19 de la loi du 6 juillet 1989 ;

Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé exactement, par motifs propres et adoptés, que les références devaient porter sur des taux qui n'étaient pas dérogatoires au régime de droit commun de la loi du 6 juillet 1989, et que la qualification du régime juridique du contrat de location était indépendante du mode de financement de l'immeuble concerné, la cour d'appel qui a retenu que les éléments de comparaison visaient des logements tout à fait comparables, répondant aux exigences du décret du 31 août 1990, sans être tenue de répondre à un simple argument sur l'atteinte au principe d'égalité de la concurrence, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant, par motifs adoptés, exactement énoncé que la loi n'impose pas de prendre en considération l'état intérieur du logement pour le choix des références et constaté que la bailleresse avait exécuté d'importants travaux de rénovation et d'amélioration concernant les parties communes et privatives, qu'elle engageait un programme pour les années 1996 et 1997, et justifiait de l'entretien des ascenseurs et des espaces verts, la cour d'appel a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Sur le cinquième moyen, pris en ses première et deuxième branches, réunies :

Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande reconventionnelle, alors, selon le moyen :

1 ) que le bailleur ne peut par une décision unilatérale modifier la forme de la chose louée ; qu'il ne peut, alors même qu'il indemniserait le locataire, modifier ou supprimer un poste de régisseur qui existait au moment du contrat et qui était convenu entre les parties ; qu'en tout état de cause, le régisseur qui n'a pas les mêmes fonctions qu'un gardien ne saurait unilatéralement être remplacé par un gardien ; qu'en jugeant néanmoins que le bailleur pouvait supprimer le poste de régisseur et le remplacer par un poste de gardien, la cour d'appel a violé l'article 1723 du Code civil ;

2 ) que pour juger que les époux X... ne justifiaient d'aucun préjudice du fait de la suppression du poste de régisseur, les juges du fond se sont bornés à relever que le remplacement du régisseur par deux gardiens ne portait pas atteinte aux avantages, agréments ou utilités sur lesquels pouvaient compter les locataires ; que néanmoins, en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée par les époux X..., si le préjudice résultant de ce remplacement ne résidait pas dans l'augmentation de 75% des charges de gardiennage et par conséquent des charges locatives, dès lors que le salaire du régisseur était à la charge exclusive du bailleur tandis que le salaire du gardien qui l'a remplacé était mis à la charge des locataires, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1723 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, que les locataires ayant sollicité la réduction du loyer à la suite de la suppression du poste du régisseur, la cour d'appel qui a relevé que la SCI employait désormais deux gardiens et constaté que ce changement n'avait pas entraîné de troubles de jouissance, a pu en déduire que la demande pouvait être rejetée ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant, par motifs adoptés, relevé l'existence de personnel d'entretient distinct des gardiens, dont l'un était installé au 7, allée du Prunier Hardy et, l'autre au 9, de la même allée, la cour d'appel n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le cinquième moyen, pris en sa troisième branche :

Vu l'annexe au décret n° 87-713 du 26 août 1987 ;

Attendu que sont des charges récupérables, les dépenses de produits relatifs à la désinsectisation et à la désinfection, y compris des colonnes sèches de vide-ordures ;

Attendu que pour rejeter la demande des époux X..., l'arrêt retient que le dégorgement des canalisations de vide-ordures étant une opération liée à la bonne élimination des rejets, constitue une charge récupérable ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la liste de l'annexe au décret du 26 août 1987 a un caractère limitatif, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de remboursement des frais de débouchage des vide-ordures, l'arrêt rendu le 2 février 2001, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes des époux X... et de la SCI du Prunier Hardy ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept novembre deux mille deux.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 01-11131
Date de la décision : 27/11/2002
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles (1re chambre civile, 2e section), 02 février 2001


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 27 nov. 2002, pourvoi n°01-11131


Composition du Tribunal
Président : Président : M. WEBER

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:01.11131
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