AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt déféré (Paris, 25 juin 1999) que la société Tolbiac Magnan (la société) ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires par jugements des 4 avril et 30 mai 1995, la SCP Brouard-Daudé, liquidateur, a demandé le prononcé de sanctions personnelles à l'encontre de M. X..., pris en sa qualité de gérant de fait ;
que M. X... a demandé la mise en cause de M. Y... ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que M. X... reproche à l'arrêt d'avoir prononcé sa faillite personnelle, alors, selon le moyen :
1 / qu'aux termes de l'article 191 de la loi du 25 janvier 1985, dans les cas prévus aux articles 187 à 190, le tribunal se saisit d'office ou est saisi par l'administrateur, le représentant des créanciers, le liquidateur ou le procureur de la République ; qu'il en résulte que, même s'il est exact que M. X... n'avait aucune qualité pour demander la mise en cause de M. Y..., la cour d'appel, saisie du recours formé contre le jugement du tribunal de commerce statuant sur l'application des articles 187 à 190 de la loi du 25 janvier 1985, avait, du fait de l'effet dévolutif de l'appel tel que prévu par les articles 561 et 562 du nouveau Code de procédure civile, elle aussi pouvoir pour se saisir d'office aux fins de sanction personnelle contre une personne qui, par son immixtion dans la gestion de la société, s'était comportée comme un véritable dirigeant de fait de ladite société ; qu'en énonçant qu'elle ne disposait pas du pouvoir de se saisir d'office aux fins de sanction personnelle, la cour d'appel a violé les articles 191 de la loi du 25 janvier 1985 et 561 et 562 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / qu'il suffit de se reporter aux motifs des conclusions d'appel de M. X... pour constater qu'il demandait à la cour d'appel de mettre M. Y... dans la cause, au besoin en se saisissant d'office, conformément aux articles 180 à 183 de la loi du 25 janvier 1985, afin de déterminer les responsabilités qui lui incombent ; qu'il s'agissait donc de vérifier l'imputabilité à M. X... des faits qui lui étaient reprochés ; qu'en énonçant que le sens de la demande de M. X... paraissait être qu'elle se saisisse d'office aux fins de sanction personnelle contre M. Y..., la cour d'appel a manifestement méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que les articles 183 et 191 de la loi du 25 janvier 1985 devenus les articles L. 624-6 et L. 625-7 du Code de commerce prévoient que seul le tribunal peut se saisir d'office ; que la cour d'appel en a déduit exactement qu'elle n'avait pas cette faculté ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Et sur le second moyen :
Attendu que M. X... reproche à l'arrêt d'avoir prononcé sa faillite personnelle pour une durée de dix-huit ans et dit qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 201 de la loi du 25 janvier 1985 en ce qui concerne le jugement correctionnel du tribunal de grande instance de Paris du 20 mai 1997 et que la sanction prononcée doit recevoir application, alors, selon le moyen, que l'article 201 de la loi du 25 janvier 1985 dispose que "lorsqu'une juridiction répressive et une juridiction civile ou commerciale ont, par des décisions définitives, prononcé à l'égard d'une personne la faillite personnelle ou l'interdiction prévue à l'article 192, à l'occasion des mêmes faits, la mesure ordonnée par la juridiction répressive est seule exécutée" ; qu'il résulte de ce texte que, dès lors que les mêmes faits ont été soumis aux juridictions commerciales et pénales, seule la sanction prononcée par la juridiction répressive doit être appliquée ; qu'ainsi l'arrêt a violé le texte précité ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que la juridiction répressive avait condamné M. X... pour abstention de tenir la comptabilité, l'arrêt retient qu'il a poursuivi abusivement, dans un intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements de la société et qu'il n'a pas déclaré celle-ci dans le délai de quinze jours ; que la cour d'appel en a exactement déduit que M. X... n'était pas fondé à invoquer les dispositions de l'article 201 de la loi du 25 janvier 1985 dès lors qu'il n'avait pas été condamné à l'occasion des mêmes faits par la juridiction répressive ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le conseiller doyen faisant fonctions de président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille deux.