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26/11/2002 | FRANCE | N°02-80843

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 26 novembre 2002, 02-80843


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-six novembre deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller BERAUDO, les observations de la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE et de la société civile professionnelle VINCENT et OHL, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Denise, épouse Y..., partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'a

ppel de VERSAILLES, 8ème chambre, en date du 19 décembre 2001, qui, dans la procédure suivie c...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-six novembre deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller BERAUDO, les observations de la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE et de la société civile professionnelle VINCENT et OHL, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Denise, épouse Y..., partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 8ème chambre, en date du 19 décembre 2001, qui, dans la procédure suivie contre Jean-Claude Z..., des chefs d'homicide involontaire et refus de priorité, a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1382 du Code civil et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a débouté Denise Y... de sa demande tendant à l'indemnisation du préjudice économique qu'elle a subi du fait du décès de son époux ;

"aux motifs que, s'il y a lieu de compenser la diminution des revenus du ménage, résultant de la disparition de l'un des conjoints, lequel, par son travail, apportait une rémunération qui s'ajoutait à celle de l'autre, permettant à la famille de bénéficier d'un budget global, il y a lieu bien évidemment de rechercher si la perte de rémunération amène, en l'espèce, une diminution du niveau de vie, qui serait alors assurée par la réparation sollicitée ; que, suivant une jurisprudence désormais affirmée, il y a lieu, pour évaluer la perte patrimoniale, d'établir une comparaison entre les revenus et la quote-part de consommation de chacun et des frais fixes du ménage, avant le décès et ceux qui subsistent, au profit des ayants droit, après le décès ; qu'en l'espèce le défunt a perçu, en 1999, la somme de 77 117 francs et son épouse la somme de 113 119 francs ;

que contrairement à ce qui a été énoncé par les premiers juges, chacun des époux absorbant 30% des revenus de l'autre pour ses besoins personnels, le montant consommé par Jean-Claude Z... (sic : il faut lire Michel Y...) sur les revenus de son épouse se révélait supérieur au montant consommé par cette dernière sur les revenus de son mari ; que suivant ce calcul, Denise Y... ne subit pas de perte, si l'on déduit du montant cumulé des deux revenus, la part que consommait la victime et ses gains personnels ;

qu'il ne revient, en conséquence aucune somme à ce titre à Denise X... veuve Y... ; qu'elle sera déboutée de sa demande en l'absence de préjudice économique indemnisable ;

"1 ) alors que, si les juges du fond apprécient souverainement l'étendue du préjudice résultant d'une infraction, il en est autrement lorsque cette appréciation est fondée sur des motifs contradictoires ou erronés ; que la cour d'appel estime qu'il y a lieu, pour évaluer la perte patrimoniale subie par Denise Y..., d'établir une comparaison entre les revenus, la quote part de consommation de chacun et des frais fixes du ménage avant le décès de Michel Y... et ceux qui subsistent après le décès ;

qu'en se bornant, pour écarter l'existence d'un préjudice économique, à relever que le montant consommé par Michel Y... sur les revenus de son épouse se révélait supérieur au montant consommé par cette dernière sur les revenus de son mari, la cour d'appel, qui ne respecte aucune des règles qu'elle a énoncées n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé les textes susvisés ;

"2 ) alors que pour déterminer si l'épouse d'une victime d'un accident de la circulation subit un préjudice économique du fait du décès de cette dernière, il appartient aux juges du fond de vérifier, en fonction notamment de la part de ressources que chacun consacrait à la satisfaction de ses besoins personnels et celle qui était mise en commun, si la partie civile subissait ou non un dommage pécuniaire du fait du décès de la victime ; en s'abstenant d'une telle recherche, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés" ;

Vu l'article 593 du Code de procédure pénale ;

Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu que, pour débouter Denise Y... de sa demande d'indemnisation du préjudice économique causé par le décès de son mari, l'arrêt attaqué, après avoir énoncé qu'il y a lieu d'établir une comparaison entre les revenus et la quote-part de consommation de chacun et des frais fixes du ménage, avant et après le décès, et constaté que le revenu annuel du défunt était de 77 117 francs et celui de son épouse de 113 119 francs, et estimé à 30 % de la part de consommation de chacun, retient que le montant consommé par le défunt sur les revenus de son épouse était supérieur au montant consommé par celle-ci sur les revenus de son mari ;

Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher de quelle somme globale disposait l'épouse, avant et après le décès de son mari, pour sa consommation personnelle et les frais fixes du ménage, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences du principe qu'elle avait elle-même affirmé, n'a pas donné de base légale à sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs,

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Versailles, en date du 19 décembre 2001, mais en ses seules dispositions relatives au préjudice économique de la partie civile, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Versailles, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Béraudo conseiller rapporteur, M. Roman conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-80843
Date de la décision : 26/11/2002
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ACTION CIVILE - Préjudice - Réparation - Epoux survivant - Préjudice économique résultant de la diminution de ses revenus - Recherche nécessaire.


Références :

Code civil 1382
Code de procédure pénale 2, 3 et 593

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 8ème chambre, 19 décembre 2001


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 26 nov. 2002, pourvoi n°02-80843


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:02.80843
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