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29/10/2002 | FRANCE | N°98-21056

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 29 octobre 2002, 98-21056


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif déféré (Paris, 3 juillet 1998), et les productions, que le 6 janvier 1992, M. X... a été nommé gérant de la société Formation 1 (la société) dont il venait d'acquérir des parts du capital social ; que, par actes des 3 et 21 janvier 1992, M. et Mme X... se sont portés cautions solidaires des engagements de la société envers la Banque générale du commerce (la banque) sans limitation de montant ni de durée ; q

ue le 28 février 1992, la banque a adressé à la société un courrier par lequel ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif déféré (Paris, 3 juillet 1998), et les productions, que le 6 janvier 1992, M. X... a été nommé gérant de la société Formation 1 (la société) dont il venait d'acquérir des parts du capital social ; que, par actes des 3 et 21 janvier 1992, M. et Mme X... se sont portés cautions solidaires des engagements de la société envers la Banque générale du commerce (la banque) sans limitation de montant ni de durée ; que le 28 février 1992, la banque a adressé à la société un courrier par lequel elle dénonçait les concours qu'elle lui avait accordés ; que la société ayant été mise en redressement judiciaire, la banque a assigné M. et Mme X... en paiement ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que M. et Mme X... reprochent à l'arrêt de les avoir condamnés, en qualité de cautions de la société mise en liquidation judiciaire, à payer à la banque les sommes de 406 597, 14 francs et 591 180, 57 francs augmentées, à compter du 23 septembre 1992, des intérêts au taux conventionnel de 14, 40 % pour la première et de 13, 40 % pour la seconde, et ce après avoir écarté l'exception de nullité des actes de cautionnnement, alors, selon le moyen :

1 / que l'acte juridique constatant un cautionnement illimité doit porter, écrite de la main de la caution, une mention exprimant sous une forme quelconque mais de façon explicite et non équivoque, la connaissance qu'elle a de la nature et de l'étendue de l'obligation contractée ; qu'en se bornant à affirmer in abstracto que les termes de la mention manuscrite visant tous les engagements contractés par la débitrice, en ce compris intérêts, frais et accessoires et ceci sans limitation de durée, étaient clairs dans leur libellé et dénués d'équivoque et manifestaient explicitement de la part de l'épouse du nouveau dirigeant la connaissance qu'elle avait de la portée illimitée de son engagement, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la caution, qui n'était pas au courant des activités de la société dont son mari n'était gérant que depuis quinze jours lorsqu'elle s'était portée caution, qui n'avait dans cette société aucune fonction, quelle qu'elle fût, et qui n'était pas informée de la position débitrice de son compte courant dans les livres de la banque, ou de l'existence de créances cédées et d'escomptes d'effets de commerce impayés, pouvait avoir conscience du caractère illimité de l'engagement par elle souscrit non seulement dans sa durée mais surtout dans son montant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1326 et 2015 du Code civil ;

2 / que les conventions doivent être conclues et exécutées de bonne foi ; que M. et Mme X... faisaient valoir que l'engagement de caution par eux souscrit le 21 janvier 1992 l'avait été en contrepartie de la promesse de la banque de faire lever l'interdiction bancaire frappant, à sa propre requête, la société reprise, et que la banque n'avait pas tenu sa parole, ce qui avait rendu impossible la poursuite même de l'activité de la société, laquelle était pourtant la cause nécessaire du cautionnement consenti ; qu'en délaissant de telles conclusions, de nature à établir le dol commis par la banque, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

3 / que tout engagement doit avoir une cause ; que M. et Mme X... soutenaient que le leur avait pour cause évidente la poursuite de son activité par la société reprise, rendue impossible du fait de la banque dans la mesure où celle-ci n'avait pas fait lever l'interdiction bancaire prononcée à l'encontre de sa cliente ; qu'en ignorant ces écritures déterminantes, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs en méconnaissance de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que Mme X... a apposé de sa main sur l'acte de cautionnement la mention "Bon pour caution personnelle et solidaire, sans limitation de durée et à hauteur de tous engagements de la société Formation 1, y compris les intérêts au taux contractuel, frais et accessoires" et que cette mention manuscrite précise, en fin de l'acte dont chaque page est par ailleurs paraphée par les souscripteurs, est claire dans son libellé et dénuée d'équivoque ; que, par ces seuls motifs, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'effectuer d'autre recherche, a légalement justifié sa décision ;

Attendu, en second lieu, que l'arrêt retient, par une décision motivée, que M. X... n'ignorait pas l'interdiction bancaire dont faisait l'objet la société et que cette connaissance lui interdit d'invoquer le dol, que la banque n'a pas commis de faute dès lors que c'est le non-respect par M. X... des engagements pris par lui quant au maintien du découvert à un certain niveau qui a motivé la rupture des concours et qu'il ne justifie pas, par ailleurs, avoir subordonné son engagement de caution à l'existence d'un niveau déterminé de concours, ce qui lui interdit d'invoquer une absence de cause à son engagement ; qu'ayant ainsi répondu, en les écartant, aux conclusions prétendument omises, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le second moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que M. et Mme X... font encore grief à l'arrêt de les avoir condamnés à payer à la banque les sommes de 406 597, 14 francs et 591 180, 57 francs augmentées, à compter du 23 septembre 1992, des intérêts au taux conventionnel de 14, 40 % pour la première et de 13, 40 % pour la seconde, ces intérêts devant être capitalisés selon les modalités de l'article 1154 du Code civil, alors, selon le moyen :

1 / que l'arrêt du cours des intérêts tant légaux que contractuels bénéficie à la caution ; qu'en condamnant M. et Mme X... au paiement des intérêts au taux contractuel à compter du 23 septembre 1992 et en ordonnant leur capitalisation en application de l'article 1154 du Code civil bien qu'elle ait constaté que la débitrice avait été placée en redressement judiciaire par jugement du 21 avril 1992, date à laquelle le cours des intérêts avait été arrêté au bénéfice tant de l'intéressée que des cautions, la cour d'appel a violé l'article 55 de la loi du 25 janvier 1985 dans sa rédaction antérieure à la loi du 10 juin 1994 applicable en la cause ;

2 / que la caution ne peut être tenue au-delà de ce que doit le débiteur principal tandis que les créances non déclarées sont éteintes ;

qu'ayant constaté que la banque avait produit une créance de 997 777, 71 francs au passif de la liquidation judiciaire de la débitrice principale, tout en condamnant les cautions à payer, outre cette somme, les intérêts au taux contractuel de 14, 40 % et 13, 40 % depuis le "28" (23) septembre 1992, la cour d'appel a violé l'article 53 de la loi du 25 janvier 1985 et l'article 2013 du Code civil ;

3 / que le créancier doit prouver l'existence de sa créance tant dans son principe que dans son montant ; qu'en se bornant à affirmer, bien que cela eût été formellement contesté, que la banque produisait les effets escomptés demeurés impayés à leur échéance et les justificatifs des créances cédées et restées impayées à leur échéance, sans fournir aucune explication assortie de la moindre preuve de ce que ces effets et créances n'auraient pas été réglés à leur échéance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1315 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que M. et Mme X... n'ont pas contesté, devant les juges du fond, le droit de la banque aux intérêts au taux conventionnel ;

Attendu, en second lieu, qu'ayant relevé qu'étaient produits par la banque les effets escomptés demeurés impayés à leur échéance et les justificatifs des créances cédées à la banque et demeurées impayées, la cour d'appel, qui a retenu que la charge de la preuve du paiement de ces créances et effets reposait sur les cautions, a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que nouveau, et mélangé de fait et de droit, en ses première et deuxième branches, le moyen est irrecevable pour partie et mal fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le conseiller doyen faisant fonctions de président en son audience publique du vingt-neuf octobre deux mille deux.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 98-21056
Date de la décision : 29/10/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

CAUTIONNEMENT - Preuve - Acte de cautionnement - Mentions de l'article 1326 du Code civil - Mention manuscrite - Engagement illimité - Mention sans équivoque - Recherche suffisante .

PREUVE LITTERALE - Acte sous seing privé - Promesse unilatérale - Mentions de l'article 1326 du Code civil - Mention manuscrite - Cautionnement - Engagement illimité - Mention sans équivoque - Recherche suffisante

Justifie légalement sa décision de retenir qu'une caution avait connaissance de la portée illimitée de son engagement la cour d'appel qui relève que cette caution a apposé de sa main sur l'acte de cautionnement la mention " Bon pour caution personnelle et solidaire, sans limitation de durée et à hauteur de tous engagements de la société, y compris les intérêts au taux contractuel, frais et accessoires ", et que cette mention manuscrite précise, en fin de l'acte dont chaque page est par ailleurs paraphée par les souscripteurs, est claire dans son libellé et dénuée d'équivoque.


Références :

Code civil 1326

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 03 juillet 1998

EN SENS CONTRAIRE : Chambre civile 1, 1986-03-04, Bulletin 1986, I, n° 49, p. 46 (rejet) ; Chambre civile 1, 1989-03-07, Bulletin 1989, I, n° 109, p. 71 (rejet) et les arrêts cités ; Chambre civile 1, 1991-04-09, I, n° 134, p. 89 (cassation partielle) et les arrêts cités ; Chambre commerciale, 1992-02-18, Bulletin 1992, IV, n° 76, p. 55 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 29 oct. 2002, pourvoi n°98-21056, Bull. civ. 2002 IV N° 153 p. 175
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2002 IV N° 153 p. 175

Composition du Tribunal
Président : M. Tricot, conseiller doyen faisant fonction. .
Avocat général : M. Jobard.
Rapporteur ?: Mme Graff.
Avocat(s) : la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, la SCP Célice, Blancpain et Soltner.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:98.21056
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