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29/10/2002 | FRANCE | N°02-80891

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 29 octobre 2002, 02-80891


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-neuf octobre deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire GAILLY et les observations de Me RICARD, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Michel,

- X... Vanessa,

contre l'arrêt de la cour d'appel de GRENOBLE, chambre correctionnelle, en date du 10 janvier 2002, qui, sur renvoi aprÃ

¨s cassation, pour infraction au Code de l'urbanisme, a condamné le premier à 10 000 francs d'amen...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-neuf octobre deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire GAILLY et les observations de Me RICARD, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Michel,

- X... Vanessa,

contre l'arrêt de la cour d'appel de GRENOBLE, chambre correctionnelle, en date du 10 janvier 2002, qui, sur renvoi après cassation, pour infraction au Code de l'urbanisme, a condamné le premier à 10 000 francs d'amende, la seconde à 1 000 francs d'amende, a ordonné, sous astreinte, la démolition des ouvrages irrégulièrement édifiés et la remise en état des lieux, et a prescrit la publication et l'affichage de la décision ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 421-1, L. 480-4, 480-5 et L. 480-13 du Code de l'urbanisme, 111-5 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, excès de pouvoir et défaut de motifs ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré les consorts X... coupables d'avoir construit une maison d'habitation, sans permis de construire préalable, les a condamnés à une peine d'amende, et a ordonné la démolition et la remise en état du terrain ;

"aux motifs que l'arrêté portant refus de permis de construire du 5 mars 1992 n'est pas entaché d'illégalité comme tardif, qu'il est intervenu dans le délai de recours contentieux ; au surplus, cet arrêté énonce précisément les motifs pour lesquels il refuse le permis de construire : "- projet situé en dehors des parties actuellement urbanisées (article L. 111-1-2 du Code de l'urbanisme) ;

"- projet de nature à favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants (article R. 111-14-1-a du Code de l'urbanisme) ;

"desserte routière de nature à porter atteinte à la sécurité publique, compte tenu de la pente de l'accès (article R. 111-2 du Code de l'urbanisme) ;

"- absence de raccordement à un réseau d'égout et assainissement non assuré de façon satisfaisante, de nature à porter atteinte à la salubrité publique (article 111-2 du Code de l'urbanisme) ; que cet arrêté ne viole aucune disposition réglementaire ou législative et ne caractérise ni détournement ni excès de pouvoir ; il ne contient aucune disposition portant atteinte au principe de l'égalité des citoyens devant la loi ; en conséquence, l'exception d'illégalité de l'arrêté du 5 mars 1992 sera rejetée ; que la construction litigieuse a été entreprise en dépit d'un refus de permis de construire, ainsi qu'il résulte d'un procès-verbal dressé par un agent assermenté des services de l'Equipement en date du 9 avril 1992, d'un procès-verbal établi par le garde champêtre de la commune de Bonne-sur-Menoge à la même date et d'un procès-verbal d'infraction dressé le 10 avril 1992 par les services de la gendarmerie d'Annemasse ; c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu Michel et Vanessa X... dans les liens de la prévention, en leur faisant une juste application de la loi" ;

"1 ) alors qu'il appartient au juge pénal, saisi d'une exception d'illégalité, d'exercer son pouvoir d'appréciation ; qu'un retrait de permis tacite ne peut intervenir que dans le délai de recours contentieux du permis tacite et pour un motif d'illégalité ;

que, dès lors, pour écarter l'exception d'illégalité de l'arrêté du 5 mars 1992 ayant retiré le permis tacite dont Vanessa X... était titulaire depuis le 29 janvier 1992, les juges du fond ne pouvaient, sans méconnaître l'étendue de leurs propres pouvoirs, se borner à citer les motifs énoncés par ledit arrêté pour refuser le permis de construire, en s'abstenant d'apprécier concrètement le bien-fondé de ces derniers ;

"2 ) alors que les prévenus avaient excipé de la chose jugée par la Cour administrative d'appel de Lyon le 25 juin 1996 qui avait précisément retenu que des motifs, identiques à ceux avancés par l'arrêté de retrait du 5 mars 1992 ne pouvaient légalement justifier des refus de permis de construire, comme étant entachés d'erreur de fait et d'appréciation ; qu'en s'abstenant de rechercher si les motifs de l'arrêté du 5 mars 1992 n'étaient pas eux aussi entachés d'erreur de fait et d'appréciation, les juges du fond ont violé les textes susvisés ;

"3 ) alors que, sur le premier motif de refus (projet situé en dehors des parties actuellement urbanisées - article L. 111-1-2 du Code de l'urbanisme), les prévenus faisaient ainsi valoir en invoquant les considérants de l'arrêt prononcé par la Cour administrative d'appel de Lyon le 25 juin 1996, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 111-1-2 du Code de l'urbanisme "en l'absence de plan d'occupation des sols opposable aux tiers, ou de tout document d'urbanisme en tenant lieu, seules sont autorisées, en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune : "1 ) l'adaptation, la réfection ou l'extension des constructions existantes ; 2 ) les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs, à l'exploitation agricole, à la mise en valeur des ressources naturelles et à la réalisation d'opérations d'intérêt national ; 3 ) les constructions et installations incompatibles avec le voisinage des zones habitées et l'extension mesurée des constructions et installations existantes ; 4 ) les constructions ou installations, sur délibération motivée du conseil municipal, si celui-ci considère que l'intérêt de la commune le justifie, dès lors qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, à la salubrité et à la sécurité publique, qu'elles n'entraînent pas un surcroît important de dépenses publiques et que le projet n'est pas contraire aux objectifs visés à l'article L. 110 et aux lois d'aménagement et d'urbanisme mentionnées à l'article L. 111-1-1" ; d'autre part, qu'il résulte des pièces du dossier que la parcelle d'assiette de la construction litigieuse est située dans un secteur comportant de part et d'autre de la voie communale qui la dessert de très nombreuses constructions ; qu'il n'est pas allégué qu'elle corresponde à un compartiment de terrain nettement différent ; que, par suite, ladite parcelle dont il n'est pas contesté qu'elle est raccordée aux réseaux d'eau et d'électricité, ne peut être regardée comme située en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune ; qu'en s'abstenant de rechercher si ce motif de l'arrêté du 5 mars 1992 n'était pas ainsi entaché d'erreur de fait et d'appréciation, les juges du fond ont violé les textes susvisés ;

"4 ) alors que, sur le deuxième motif de refus, (desserte routière de nature à porter atteinte à la sécurité publique, compte tenu de la pente de l'accès - article R. 111-2 du Code de l'urbanisme) les prévenus faisaient ainsi valoir en invoquant les considérants de l'arrêt prononcé par la Cour administrative d'appel de Lyon le 25 juin 1996 qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que l'accès à la construction projetée à partir de la voie communale présente une pente et une configuration de nature à compromettre la sécurité publique au sens des dispositions de l'article R. 111-2 du Code de l'urbanisme ; que si l'Etat et la commune invoquent également l'instabilité du terrain, ils ne contestent pas qu'ainsi que cela ressort du rapport du service de restauration des terrains en montagne, il peut aisément être remédié à ce risque qualifié de limité par de simples drainages ; qu'en tout état de cause, ce motif, à supposer même qu'il soit fondé, n'a pas été énoncé par les décisions attaquées et ne peut être utilement invoqué pour la première fois au contentieux ; qu'en s'abstenant de rechercher si ce motif de l'arrêté du 5 mars 1992 n'était pas ainsi entaché d'erreur de fait et d'appréciation, les juges du fond ont violé les textes susvisés ;

"5 ) alors que, sur le troisième motif de refus (absence de raccordement à un réseau d'égout et assainissement non assuré de façon satisfaisante, de nature à porter atteinte à la salubrité publique (article 111-2 du Code de l'urbanisme) les prévenus faisaient ainsi valoir, en invoquant les considérants de l'arrêt prononcé par la Cour administrative d'appel de Lyon le 25 juin 1996, que s'il est vrai que le terrain n'est pas raccordable à l'égout, une expertise a établi sans être contredite que la nature géologique du sol permet d'installer un dispositif individuel d'assainissement dans des conditions de fiabilité satisfaisantes ; qu'en s'abstenant de rechercher si ce motif de l'arrêté du 5 mars 1992 n'était pas ainsi entaché d'erreur de fait et d'appréciation, les juges du fond ont violé les textes susvisés ;

"6 ) alors que, sur le quatrième motif de refus (projet de nature à favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants - article R. 111-14-1-a du Code de l'urbanisme) les prévenus faisaient ainsi valoir en invoquant les considérants de l'arrêt prononcé par la Cour administrative d'appel de Lyon le 25 juin 1996 qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu des constructions déjà édifiées dans le secteur, elle serait de nature à favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants ; qu'en s'abstenant de rechercher si ce motif de l'arrêté du 5 mars 1992 n'était pas ainsi entaché d'erreur de fait et d'appréciation, les juges du fond ont violé les textes susvisés" ;

Attendu que, faute d'avoir été proposé devant les juges du fond, le moyen, mélangé de fait, est nouveau et, comme tel, irrecevable ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 421-1, L. 480-4, L. 480-5 et L. 480-13 du Code de l'urbanisme, 111-5 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, excès de pouvoir et défaut de motifs ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré les consorts X... coupables d'avoir construit une maison d'habitation, sans permis de construire préalable, les a condamnés à une peine d'amende, et a ordonné la démolition et la remise en état du terrain ;

"alors que le juge correctionnel ne peut statuer sur la démolition d'une construction qu'au vu des observations écrites ou après audition du maire ou du fonctionnaire compétent ; qu'en l'espèce, la Cour a ordonné la démolition des constructions litigieuses sans que l'arrêt ou le jugement ne mentionne le respect de ces formalités obligatoires, en violation des textes susvisés" ;

Attendu qu'après avoir déclaré Michel et Vanessa X... coupables de construction sans permis, la cour d'appel a, notamment, ordonné la destruction de la construction litigieuse et la remise en état du terrain ;

Attendu qu'il résulte des pièces de procédure qu'un représentant du service de l'Equipement et le maire de la commune ont fait valoir leurs observations par courriers datés des 10 et 7 janvier 2000 ;

D'où il suit que le moyen manque en fait ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 421-1, L. 480-4, L. 480-5 et L. 480-13 du Code de l'urbanisme, 111-5 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, excès de pouvoir et défaut de motifs, 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré les consorts X... coupables d'avoir construit une maison d'habitation, sans permis de construire préalable, les a condamnés à une peine d'amende, et a ordonné la démolition et la remise en état du terrain ;

"alors que dix ans de procédure pour faire juger qu'une infraction est inexistante n'est pas un délai raisonnable ; que le juge de cassation doit assurer le respect des droits et garanties fondamentales, et prononcera en conséquence une cassation sans renvoi" ;

Attendu que le rejet des deux premiers moyens rend ce dernier moyen inopérant ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Gailly conseiller rapporteur, M. Roman conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-80891
Date de la décision : 29/10/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, chambre correctionnelle, 10 janvier 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 29 oct. 2002, pourvoi n°02-80891


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:02.80891
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