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29/10/2002 | FRANCE | N°01-87181

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 29 octobre 2002, 01-87181


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-neuf octobre deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire BEAUDONNET et les observations de Me CHOUCROY et de Me HEMERY, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Josette, en son nom personnel et en qualité de tutrice de Benoît Y...,

- Y... Serge, parties civiles,

contre l'arrêt de la

cour d'appel de BOURGES, chambre correctionnelle, en date du 20 septembre 2001, qui, dans la procé...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-neuf octobre deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire BEAUDONNET et les observations de Me CHOUCROY et de Me HEMERY, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Josette, en son nom personnel et en qualité de tutrice de Benoît Y...,

- Y... Serge, parties civiles,

contre l'arrêt de la cour d'appel de BOURGES, chambre correctionnelle, en date du 20 septembre 2001, qui, dans la procédure suivie contre Jackie Z... du chef de blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils ;

I - Sur le pourvoi en ce qu'il est formé par Serge Y... :

Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;

II - Sur le pourvoi en ce qu'il est formé par Josette X... ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1382 du Code civil, 28 et 29 de la loi du 5 juillet 1985, 3 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a fixé à 4 heures par jour l'assistance d'une tierce personne due à la victime et a dit que l'allocation d'éducation spécialisée doit être déduite de la somme allouée pour rémunération de la tierce personne ;

"aux motifs que l'expert a prévu l'assistance d'une tierce personne non spécialisée pour une durée de 4 heures par jour tous les jours de l'année, pour stimulation, activités ménagères, courses, accompagnements dans les sorties, gestion de ses biens et de la vie de la victime ;

"que Benoît Y... est en droit de demander le remboursement des frais exposés de ce chef, mais que l'allocation tierce personne n'est due uniquement que pour les périodes où il ne séjourne pas dans un établissement spécialisé ;

"que la rémunération horaire de la tierce personne sera fixée à 50 francs jusqu'en 2000 et 55 francs au-delà (en vertu de l'article L. 241-10 du Code de la sécurité sociale, la rémunération d'une aide à domicile étant exonérée totalement des cotisations patronales d'assurances sociales) ;

"qu'au vu des pièces produites, Benoît Y... a, de la période du 1er novembre 1996 au 15 septembre 2000, passé 729 jours à son domicile et a perçu une somme de 70 950 francs au titre de l'Allocation d'Education Spécialisée (AES) ;

"qu'il doit être tenu compte de l'Allocation d'Education Spécialisée perçue par Josette X... jusqu'au 20ème anniversaire de son fils pour déterminer le préjudice lié à la rémunération d'une tierce personne ; que cette allocation, qui vise à compenser des charges engendrées par le handicap de l'enfant, a un caractère indemnitaire et doit donc être déduite de la somme allouée pour rémunération de la tierce personne ;

"alors, d'une part, que le montant de l'indemnité allouée au titre de l'assistance pour tierce personne ne saurait être réduit en cas d'assistance familiale ; qu'en l'espèce, la demanderesse faisait valoir, dans un chef péremptoire de ses conclusions d'appel laissées sans réponse, que si l'expert a prévu l'assistance seulement quatre heures par jour d'une tierce personne, celui-ci n'a pas tenu compte de ce que la victime nécessite un placement en internat dans lequel elle bénéficie d'une assistance de stimulation et de surveillance constante ; que la rémunération de la perte d'autonomie doit être faite sur la base de 52 semaines, tenant compte de la nécessité de rémunérer une tierce personne durant les fins de semaine, du vendredi soir 18 heures au lundi matin 9 heures, soit durant 63 heures de présence au domicile par semaine ; que la demanderesse demandait, en conséquence, que soit prévue une assistance 24 heures sur 24 ;

"alors, d'autre part, que les juges sont tenus d'assurer la réparation intégrale du préjudice subi ; que le montant de l'indemnité allouée au titre de l'assistance d'une tierce personne ne saurait être réduit en cas d'allocation d'éducation spécialisée qui ne présente pas un caractère indemnitaire ; que, par suite, la cour d'appel ne pouvait déduire l'allocation d'éducation spécialisée des sommes versées au titre de la rente pour tierce personne" ;

Vu les articles 29 et 30 de la loi du 5 juillet 1985 ;

Attendu que seules doivent être imputées sur l'indemnité réparant l'atteinte à l'intégrité physique de la victime les prestations versées par des tiers payeurs qui ouvrent droit au profit de ceux-ci à un recours subrogatoire contre la personne tenue à réparation ;

Attendu qu'appelée à statuer sur les conséquences dommageables pour Benoît Y... d'un accident de la circulation, dont Jackie Z... a été déclaré tenu à réparation intégrale, la juridiction du second degré était saisie de conclusions de la victime demandant paiement des frais d'une assistance continue durant ses séjours au domicile familial ;

Attendu que les juges, après avoir souverainement estimé, au vu des conclusions d'expertise, que la réparation intégrale du préjudice de la victime justifiait l'assistance d'une tierce personne 4 heures par jour, ont déduit des sommes allouées pour la rémunération de ce tiers, une somme de 81 071 francs correspondant au montant de l'allocation d'éducation spécialisée perçue par la mère de Benoît Y... jusqu'au 20ème anniversaire de celui-ci ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'allocation d'éducation spécialisée servie par les caisses d'allocations familiales, pour une durée limitée, aux parents d'un enfant atteint d'une incapacité permanente, est dépourvue de caractère indemnitaire et n'ouvre pas droit à recours subrogatoire au profit du tiers qui l'a versée, la cour d'appel a méconnu les textes et les principes susrappelés ;

D'où il suit que la cassation est encourue ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de Cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 131-5 du Code de l'organisation judiciaire ;

Qu'après réintégration de la somme de 81 071 francs dans le préjudice soumis à recours fixé par l'arrêt à 3 325 105,18 francs, hors rente tierce personne, Jackie Z... sera condamné à payer à Josette X..., après déduction de la créance de la caisse primaire d'assurance maladie, la somme de 2 694 680 francs soit 410 801,32 euros ;

Par ces motifs,

I - Sur le pourvoi en ce qu'il est formé par Serge Y... ;

Le REJETTE ;

II - Sur le pourvoi en ce qu'il est formé par Josette X... ;

CASSE et ANNULE, en ses seules dispositions relatives aux frais échus d'aide d'une tierce personne, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Bourges, en date du 20 septembre 2001 ;

FIXE le préjudice soumis à recours de Benoît Y..., hors rente tierce personne, à la somme de 519 268,20 euros ;

CONDAMNE Jackie Z... à verser à Josette X..., agissant en qualité de tutrice de Benoît Y..., la somme de 410 801,32 euros, après déduction de la créance de la caisse primaire d'assurance maladie, et hors rente tierce personne, jusqu'à sortie définitive du centre de rééducation ou du foyer de vie ;

DIT n'y avoir lieu à RENVOI ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Bourges, sa mention en marge où à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Beaudonnet conseiller rapporteur, M. Roman conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 01-87181
Date de la décision : 29/10/2002
Sens de l'arrêt : Cassation rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ACCIDENT DE LA CIRCULATION - Tiers payeur - Recours - Prestations donnant lieu à une action récursoire - Allocation d'éducation spécialisée servie par les caisses d'allocations familiales (non).


Références :

Loi 85-677 du 05 juillet 1985 art. 29 et 30

Décision attaquée : Cour d'appel de BOURGES, chambre correctionnelle, 20 septembre 2001


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 29 oct. 2002, pourvoi n°01-87181


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:01.87181
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