AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le deuxième moyen :
Vu les principes régissant l'adoption des enfants étrangers ;
Attendu que Mohamed X... et Nour el Houda Y... se sont mariés le 28 août 1973 ; que 4 enfants sont issus de leur union ;
que, par acte du 5 août 1977, M. Z... et son épouse, soeur de Nour el Houda Y..., de nationalité algérienne, leur ont confié en recueil légal, "Kafalah", leur fille Amel, née le 4 janvier 1992 en Algérie ; que cet acte a été renouvelé le 9 mars 1993 pour recueil à titre définitif ; que, par requête du 18 octobre 1994, les époux X..., de nationalité française, ont sollicité l'adoption plénière de l'enfant ; que, par jugement du 12 juin 1997, le tribunal de grande instance de Nantes a déclaré la loi algérienne, loi nationale de l'adoptée, contraire à l'ordre public français en ce qu'elle prohibe l'adoption, dit la loi française applicable et constaté l'impossibilité pour les "parents biologiques" de manifester leur consentement dans les formes requises par la loi française et renvoyé les requérants à recueillir le consentement du conseil de famille conformément à l'article 348-2 du Code civil ; que, par ordonnance du 12 janvier 1998, le juge des tutelles a prescrit la réunion du conseil de famille qui, par délibération du 13 février 1998, a consenti à l'adoption plénière ; que l'arrêt confirmatif attaqué a prononcé celle-ci ;
Attendu que, même lorsque les conditions de l'adoption plénière sont régies par la loi française des adoptants, le consentement exprès et éclairé des parents de l'enfant, qui peut être recueilli par tous moyens, est une exigence de droit matériel qui ne peut être satisfaite par une délibération du conseil de famille selon la loi française ;
Attendu que, pour décider que le consentement à l'adoption plénière avait été régulièrement recueilli, la cour d'appel se fonde sur la circonstance que la délibération du conseil de famille est définitive et ne peut être ignorée, quels que soient les vices dont elle peut être affectée ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que cette délibération était impuissante à se substituer aux consentements des père et mère de l'enfant dont le jugement du 12 juin 1997 constatait seulement qu'ils n'avaient pu être recueillis dans les formes requises par la loi française, la cour d'appel a violé les principes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 janvier 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;
Condamne les époux X... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux octobre deux mille deux.