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16/10/2002 | FRANCE | N°02-81885

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 16 octobre 2002, 02-81885


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le seize octobre deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SOULARD et les observations de la société civile professionnelle BACHELLIER et POTIER de la VARDE, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Jean-Pierre,

- X... Stéphane,

contre l'arrêt de la cour d'appel de CAEN, chambre correcti

onnelle, en date du 18 février 2002, qui a condamné le premier, pour exercice d'une activité profess...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le seize octobre deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire SOULARD et les observations de la société civile professionnelle BACHELLIER et POTIER de la VARDE, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Jean-Pierre,

- X... Stéphane,

contre l'arrêt de la cour d'appel de CAEN, chambre correctionnelle, en date du 18 février 2002, qui a condamné le premier, pour exercice d'une activité professionnelle en violation d'une interdiction, abus de confiance, faux et usage de faux et abus de biens sociaux, à 3 ans d'emprisonnement dont 33 mois et avec sursis, et le second, pour abus de confiance, faux et abus de biens sociaux, à 18 mois d'emprisonnement avec sursis et tous deux à 5 ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme, 388 et 591 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Stéphane X... coupable de faux et Jean-Pierre X... coupable de faux et usage de faux ;

"aux motifs que, le 30 mai 1996, Thierry X... a remis à Alain Y... un document intitulé "Tarif de vente patinoires" à en-tête de la SARL, dont la mention "au capital de 100 000 francs" avait été raturée quant au chiffre et remplacée par "500 000 francs" (au 20 mai 1996)" ; que cette modification a été effectuée par Aurélie X..., fille de Jean-Pierre X..., secrétaire de l'entreprise, mineure lors des faits ; qu'après avoir contesté, celui-ci a reconnu devant la Cour que sa fille avait porté cette mention inexacte sur ses instructions et celles de Stéphane et, par arrêt du 6 décembre 2001, actuellement définitif, la chambre des mineurs de la cour d'appel de Caen a relaxé Aurélie X... du chef de faux au motif d'absence d'élément intentionnel ; que l'employeur qui donne l'ordre de commettre une infraction, réalisée matériellement par son préposé, simple agent d'exécution, est un auteur principal et non un complice ;

que l'infraction reprochée à Jean-Pierre X... et Stéphane X... sous la qualification de complicité de faux sera donc requalifiée en faux et les prévenus seront déclarés coupables des faits ainsi requalifiés ; que le fait, pour Jean-Pierre X..., d'avoir diffusé cet écrit aux fins de remise à Alain Y..., poursuivi sur la qualification d'usage de certificat ou attestation faisant état de faits matériellement inexacts, constitue en réalité le délit d'usage de faux prévu et réprimé par l'article 441-1 du Code pénal ;

"1 ) alors qu'en requalifiant d'office les faits reprochés à Stéphane X... et Jean-Pierre X... sous la qualification de complicité de faux en faux sans avoir invité ceux-ci à s'expliquer sur cette modification, la cour d'appel a méconnu les droits de la défense ;

"2 ) alors qu'en requalifiant d'office les faits reprochés à Jean-Pierre X... sous la qualification d'usage d'un certificat ou d'une attestation faisant état de faits matériellement inexacts en usage de faux, sans avoir mis celui-ci en mesure de présenter ses observations sur cette nouvelle qualification, la cour d'appel a de nouveau méconnu les droits de la défense" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que les prévenus et leurs avocats ont été mis en mesure de se défendre sur les nouvelles qualifications des faits requises par le ministère public ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 122-2 et 314-1 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Stéphane et Jean-Pierre X... coupables d'abus de confiance ;

"aux motifs qu'aux termes d'un protocole d'accord signé le 28 mars 1996 entre la SARL Avant Première et Alain Y..., ce dernier apportait, d'une part, au capital de la société, une somme de 100 000 francs (le capital devant passer de 100 000 francs à 700 000 francs en avril 1996) et, d'autre part, une somme de 200 000 francs devant être déposée sur compte bloqué rémunéré au taux de la Caisse d'Epargne et remboursée en deux fois, la première au bout de 12 mois et la seconde au bout de 24 mois, à compter de la date d'entrée d'Alain Y... ; qu'il était également convenu qu'en cas de départ d'Alain Y..., la somme de 100 000 francs lui serait remboursée dans un délai de 6 mois ; que, le 28 mars 1996, Alain Y... signait également un contrat de travail à durée indéterminée afin de prendre la direction de l'agence d'Aquitaine nouvellement créée ; que, le 18 juin 1996, Alain Y... décidait de mettre fin à ses fonctions et sollicitait le remboursement de la somme de 30 000 francs, ce qu'il n'a jamais obtenu ; que Jean-Pierre X... et Stéphane X... ont reconnu qu'à l'insu d'Alain Y..., le chèque de 100 000 francs remis par celui-ci avait été déposé sur l'un des comptes courants de la SARL Avant Première le 21 mai 1996 pour diminuer le découvert, et le capital de la société n'avait jamais été augmenté, et que celui de 200 000 francs avait servi aux mêmes fins le 17 avril 1997 et n'avait, par conséquent, jamais été déposé sur un compte bloqué, la situation de la société étant déjà gravement obérée à cette époque ;

"alors que le délit d'abus de confiance n'existe que si le détournement a été commis avec une intention frauduleuse ; qu'en déclarant Stéphane X... et Jean-Pierre X... coupables de ce délit pour avoir déposé dans un compte courant de la société Avant Première les sommes qu'Alain Y... leur avait remises pour être versées, pour une partie, dans le capital social et, pour l'autre, sur un compte bloqué de la société, tout en constatant que ce changement de destination contractuelle avait été dicté par l'unique souci de diminuer le découvert de la société dont la situation était gravement obérée, ce dont il résultait que les prévenus n'avaient pas agi de mauvaise foi, la cour d'appel s'est contredite" ;

Attendu que, pour déclarer Jean-Pierre et Stéphane X... coupables d'abus de confiance, l'arrêt retient qu'ils ont reconnu qu'en méconnaissance des dispositions du protocole signé entre Alain Y... et la société Avant Première, qu'ils dirigeaient, selon lequel les sommes de 100 000 francs et 200 000 francs remises par celui-ci, devaient être versées respectivement au capital de la société et sur un compte bloqué rémunéré, ils ont déposé ces sommes sur l'un des comptes courants de la société pour en diminuer le découvert ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que les prévenus ont délibérément utilisé les fonds remis à une fin étrangère à celle qui avait été stipulée, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 241-3, 4 , nouveau du Code de commerce, 8, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Stéphane X... et Jean-Pierre X... coupables d'avoir, en 1995, 1996 et jusqu'au 28 mars 1997, fait des biens ou du crédit de la SARL Avant Première un usage qu'ils savaient contraire à l'intérêt personnel de celle-ci, à des fins personnelles ;

"aux motifs que les salaires perçus par Stéphane X... et Jean-Pierre X..., s'ils ne paraissent pas exorbitants au regard du travail fourni, dont la réalité n'est pas contestée, étaient excessifs au regard des ressources et de la situation financière gravement obérée de la société, connue des prévenues ; que, par ailleurs, ceux-ci ont reconnu qu'ils utilisaient les véhicules loués par la société pour leurs déplacements personnels ; que l'intégralité des factures d'entretien des véhicules était à la charge de la société ;

qu'enfin, les dépenses personnelles des prévenus étaient supportées par la société sans que les comptes courants des associés ne soient débités des montants correspondants ; que, s'il est avéré que certaines opérations ont pu être régularisées au 31 décembre 1996, en ce qui concerne plusieurs chèques par prélèvements sur les comptes courants des associés, il n'en demeure pas moins que d'autres ne l'ont pas été et pour lesquels les prévenus n'ont pu fournir d'explications ;

"alors qu'en s'abstenant de rechercher si les dépenses qu'elle estimait mises indûment à la charge de la société figuraient dans les comptes annuels de celle-ci, la cour d'appel, qui a ainsi mis la Cour de Cassation dans l'impossibilité de vérifier si le délai de prescription de l'action publique du chef d'abus de biens sociaux, qui courait, sauf à établir l'existence d'une dissimulation, à compter de la présentation des comptes annuels dans lesquels ces dépenses auraient figuré, n'a pas donné une base légale à sa décision" ;

Attendu que, si la prescription de l'action publique peut être invoquée, pour la première fois devant la Cour de Cassation, c'est à la condition que cette Cour trouve dans les constatations des juges du fond les éléments nécessaires pour en apprécier la valeur ; qu'à défaut de telles constatations, le moyen est nouveau et, comme tel, irrecevable ;

Et attendu que les peines prononcées étant justifiées par les déclarations de culpabilité des chefs d'abus de confiance, faux et usage, et abus de biens sociaux, il n'y a pas lieu d'examiner le premier moyen qui discute le délit d'exercice d'une activité professionnelle en violation d'une interdiction ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Soulard conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-81885
Date de la décision : 16/10/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, chambre correctionnelle, 18 février 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 16 oct. 2002, pourvoi n°02-81885


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:02.81885
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