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16/10/2002 | FRANCE | N°01-87454

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 16 octobre 2002, 01-87454


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le seize octobre deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller CHALLE et les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, et de la société civile professionnelle DEFRENOIS et LEVIS, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Jean, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction

de la cour d'appel de LIMOGES, en date du 11 octobre 2001, qui, dans l'information suivie con...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le seize octobre deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller CHALLE et les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, et de la société civile professionnelle DEFRENOIS et LEVIS, avocats en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Jean, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de LIMOGES, en date du 11 octobre 2001, qui, dans l'information suivie contre Bernard Y..., des chefs d'abus de confiance et abus de biens sociaux, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;

Vu l'article 575, alinéa 2, 6 , du Code de procédure pénale ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 104 dans sa rédaction antérieure à la loi du 15 juin 2000, 113-1 et suivants, 197-1, 198, 199, 575, alinéa 2, 6 , 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le magistrat instructeur au préjudice de Jean X... ;

"alors que, si en cas d'appel d'une ordonnance de non-lieu, le témoin assisté peut, par l'intermédiaire de son avocat, faire valoir ses observations devant la chambre de l'instruction, il ne peut avoir communication du dossier, des mémoires de la partie civile ni déposer de mémoires ; que l'avocat de Bernard Y..., témoin assisté ayant accès au dossier et notamment aux mémoires de la partie civile et ayant déposé deux mémoires devant la chambre de l'instruction, cette irrégularité a nécessairement porté atteinte aux intérêts de la partie civile ;

"alors que l'avocat de Bernard Y..., témoin assisté et qui n'était par conséquent pas une partie, ayant eu la parole le dernier lors des débats devant la chambre de l'instruction, ce qui implique que le conseil de Jean X... - qui avait, lui, la qualité de partie - n'a pas pu répliquer à ses observations, l'arrêt attaqué ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale" ;

Attendu que la partie civile ne saurait se faire un grief de ce que Jean X..., témoin assisté, ait eu communication des mémoires de la partie civile, ait déposé des mémoires devant la chambre de l'instruction et que son conseil ait eu la parole en dernier, dès lors que les observations que l'avocat du témoin assisté est admis à faire valoir devant la chambre de l'instruction, en application de l'article 197-1 du Code de procédure pénale, peuvent être formulées tant oralement que par écrit et que seule est prescrite à peine de nullité l'audition en dernier de la personne mise en examen ou de son conseil ;

D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 242-6 du Code de commerce, 1289 et 1291 du Code civil, 575, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le magistrat instructeur au préjudice de Jean X... ;

"aux motifs que, si l'opération reprochée à Bernard Y... - la fusion absorption de la SA Marais par la SCM Y... qui s'est transformée en SA Y... le 28 septembre 1996 et ce afin de lui permettre de récupérer les fonds qu'il avait pu avancer en renflouement de la SA Marais absorbée par une sorte de compensation - n'est pas exempte d'irrégularités formelles dénoncées par Jean X... et peut constituer un procédé susceptible d'engendrer formellement la critique, il convient d'apprécier s'il existe des charges suffisantes pour caractériser le délit de l'abus de biens sociaux ; l'article 437-3-3 de la loi du 24 juillet 1966 précise que sont pénalement répréhensibles "le président, les administrateurs ou les directeurs généraux d'une société anonyme qui, de mauvaise foi, auront fait, des biens ou du crédit de la société, un usage qu'ils savaient contraire à l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils étaient intéressés directement ou indirectement" ;

or, en l'espèce, l'examen des conventions rappelées dans les faits et des nombreuses procédures civiles et commerciales relatées fait apparaître que l'économie générale des négociations qui se sont déroulées entre les parties en cause a été modifiée du fait de l'attitude de Jean X... qui, contrairement à la convention de cession des actions du 21 janvier 1987, avait remis ses actions en nantissement le 13 janvier 1987 à la Société Générale en l'occultant dans l'accord du 21 janvier 1987 ; en conséquence de cela, une nouvelle convention tripartite avec la Société Générale signée le 23 avril 1987 a prévu que Bernard Y... verserait directement à la Société Générale le prix relatif à la cession des actions et que la Société Générale donnerait mainlevée partielle du nantissement sur les 2 531 actions transférées puis sur les autres au fur et à mesure des transferts ; l'examen de la procédure dévoile également - cela résulte des rapports des commissaires à la transformation et experts comptables - qu'au moment de la cession d'actions, la SA Marais étant dans une situation financière difficile et en état de cessation de paiement et que si cette situation avait été annoncée par le cédant, le prix des actions aurait été moins important ; cette situation a amené la SCM Y... à verser, ce qui n'est pas contesté, une somme de 1 318 386 francs à la SA Marais ;

il n'apparaît pas contesté non plus que Bernard Y... ait perçu des appointements proches du SMIC dans le but de redresser la société Marais ; l'ensemble de ces éléments montrent que l'opération litigieuse a été réalisée dans le souci de rétablissement d'un équilibre initialement rompu par l'attitude de Jean X... qui n'avait pas donné l'ensemble des informations lors de la signature de la convention de cession d'actions en date du 21 janvier 1987 ; en conséquence, l'information ouverte à l'initiative de Jean X... n'établit pas de charges suffisantes à l'encontre de Bernard Y... dont la mauvaise foi n'est pas rapportée ;

"alors que ne satisfait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale l'arrêt d'une chambre de l'instruction qui, sur appel de la partie civile, confirme une ordonnance de non-lieu en se fondant sur les motifs contradictoires d'où il résulte, tantôt qu'il existe des charges suffisantes à l'encontre de la personne visée dans la plainte d'avoir commis les faits qui lui sont imputés, tantôt que ces charges sont insuffisantes ; que la possession par une SCM, dans laquelle le dirigeant social d'une société anonyme est directement intéressé, d'un compte courant d'associé débiteur dans les livres de cette société anonyme, caractérise, à l'encontre de ce dirigeant social en tous ses éléments le délit d'abus de biens sociaux dans la mesure où ce dirigeant ne saurait ignorer que cette situation est contraire à l'intérêt social de la société anonyme et qu'elle a pour but de favoriser la société dans laquelle il est intéressé ;

que, par ailleurs, la compensation ne peut être admise entre les dette prétendues de deux sociétés qu'autant que ces dettes sont certaines, liquides et exigibles, conformément aux dispositions des articles 1289 et 1291 du Code civil et que l'arrêt attaqué, qui constatait expressément que la prétention de la partie civile selon laquelle la SCM Y..., dont Bernard Y... était le gérant, disposait d'un compte courant d'associé débiteur de 1 318 386 francs dans les livres de la société anonyme Marais dont il était le président-directeur général, correspondait à la réalité, ce qui impliquait que le délit d'abus de biens sociaux était constitué en tous ses éléments à l'encontre de ce dirigeant social, ne pouvait affirmer qu'il n'existait pas à son encontre de charges suffisantes d'avoir commis ce délit en se référant à la considération que sa mauvaise foi n'était pas établie puisqu'il avait procédé à cette opération "par une sorte de compensation" pour compenser le caractère excessif, selon lui, du prix des actions acquises par la SCM Y..., les conditions de la compensation entre la dette de la SCM Y... et la dette purement éventuelle de la société Marais à l'égard de cette SCM n'étant à l'évidence pas réunies, ce que Bernard Y... ne pouvait ignorer et qu'en l'état de ces motifs contradictoires, l'arrêt attaqué ne satisfait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale ;

"alors que les chambres de l'instruction ont l'obligation de répondre aux chefs péremptoires des mémoires régulièrement déposés devant elles ; que, devant la chambre de l'instruction, la partie civile faisait valoir que Bernard Y..., qui avait prétendu opérer une compensation dans le cadre de la fusion, n'avait jamais fourni aucune justification des sommes prétendument réglées par lui-même ou par la SCM Y... et que l'opération de découvert en compte courant aurait dû être soumise à la procédure de contrôle et que la chambre de l'instruction qui, non seulement n'a pas répondu à ce chef péremptoire du mémoire de la partie civile, mais a cru pouvoir affirmer en contradiction avec ce mémoire "qu'il n'était pas contesté" que la SCM Y... avait été amenée à verser une somme de 1 318 386 francs à la SA Marais, a méconnu le principe susvisé" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, la chambre de l'instruction, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés dans la plainte et répondu aux articulations essentielles des mémoires de la partie civile, a exposé les motifs pour lesquels elle a estimé qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis les délits reprochés, ni toute autre infraction ;

Que le demandeur se borne à critiquer ces motifs, sans justifier d'aucun des griefs que l'article 575 du Code de procédure pénale autorise la partie civile à formuler à l'appui de son pourvoi contre un arrêt de chambre de l'instruction en l'absence de recours du ministère public ;

Que, dès lors, le moyen est irrecevable ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Challe conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 01-87454
Date de la décision : 16/10/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CHAMBRE DE L'INSTRUCTION - Procédure - Observations - Témoin assisté - Formes.


Références :

Code de procédure pénale 197-1

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Limoges, 11 octobre 2001


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 16 oct. 2002, pourvoi n°01-87454


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:01.87454
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