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16/10/2002 | FRANCE | N°01-87298

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 16 octobre 2002, 01-87298


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le seize octobre deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire de la LANCE et les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Hervé,

- Y... Sandrine,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NANCY, chambre correctionnelle, e

n date du 4 septembre 2001, qui, pour présentation de comptes annuels infidèles, a condamné le premi...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le seize octobre deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire de la LANCE et les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Hervé,

- Y... Sandrine,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NANCY, chambre correctionnelle, en date du 4 septembre 2001, qui, pour présentation de comptes annuels infidèles, a condamné le premier à 10 mois d'emprisonnement avec sursis et la seconde à 4 mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 425-3 et 431 de la loi du 24 juillet 1966 (devenus les articles L. 241-3 et L. 241-9 du Code de commerce), 121-3 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Hervé X... et Sandrine Y... coupables de présentation de bilans inexacts et les a condamnés de ce chef, en les condamnant également à payer diverses sommes à la partie civile ;

"aux motifs que, dans le bilan de la SARL Vosges Lavage du 31 décembre 1995, il a été procédé à une réévaluation des éléments corporels et incorporels de l'actif immobilisé, alors même que l'article 12 du Code commerce ne prévoit une réévaluation de l'actif immobilisé que pour les immobilisations corporelles et financières ; que, sans cette évaluation, les capitaux propres de la SARL auraient été inférieurs à la moitié du capital social, ce qui aurait permis à tout intéressé, et notamment à la partie civile, de demander la dissolution de la société, avant que celle-ci soit mise en règlement judiciaire, et de récupérer ses apports ; que le bilan clos au 31 décembre 1995 ne donnait donc pas une image fidèle du résultat des opérations de l'exercice ainsi que la situation financière et du patrimoine de la SARL Vosges Lavage ; que Sandrine Y..., gérant statutaire de la société, a signé au nom de celle-ci les demandes de réévaluation des éléments incorporels ; qu'Hervé X..., concubin de Sandrine Y... et associé majoritaire, a été l'unique interlocuteur de M. Z..., fiscaliste du cabinet Fidal, au sujet des réévaluations, et de M. A..., expert-comptable, auquel il a demandé la réévaluation, notamment, des immobilisations incorporelles, comportement qui caractérise une gérance de fait ; que la réévaluation, demandée par Hervé X... et Sandrine Y..., avait pour but de modifier les résultats comptables de l'exercice 1995 alors que la société Vosges Lavage connaissait des difficultés

financières, et a eu pour effet d'empêcher les associés, notamment la partie civile, d'apprécier la situation financière réelle de la société, et de solliciter toute mesure de sauvegarde ;

"alors, d'une part, que le délit de présentation de bilans inexacts ne peut être imputé qu'au dirigeant de droit ou de fait de la société ; que le dirigeant de fait est la personne qui, sans titre, exerce sans entrave et en toute indépendance une activité positive de direction des affaires sociales ; qu'en se bornant à se déterminer par le seul fait qu'Hervé X..., concubin de la gérante statutaire, avait été l'interlocuteur de M. Z..., fiscaliste du cabinet Fidal, et de M. A..., expert-comptable auquel il avait demandé, pour l'exercice clos le 31 décembre 1995, la réévaluation du bilan, et notamment des immobilisations incorporelles, la cour d'appel n'a pas caractérisé la gérance de fait d'Hervé X..., de sorte que, en retenant sa responsabilité pénale, elle a violé les textes susvisés ;

"alors, d'autre part, que la réévaluation des éléments d'actif de l'entreprise, même à supposer que la réévaluation des immobilisations incorporelles constitue une dérogation aux prescriptions comptables, ne constitue pas nécessairement le délit de présentation de bilans inexacts, mais peut correspondre à une réelle actualisation de la valeur des éléments d'actif ; qu'en retenant le délit de présentation de bilan inexact au seul motif de la prétendue irrégularité de l'opération sur le plan comptable, sans préciser en quoi la réévaluation était contraire à la réalité, c'est-à-dire en quoi les immobilisations incorporelles auraient été surévaluées, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

"alors, enfin, que le délit de présentation de bilans inexacts suppose chez son auteur une volonté de dissimulation de la véritable situation de la société ; qu'en affirmant que les prévenus ont cherché, par la réévaluation du bilan, à dissimuler la situation gravement obérée de la société, sans s'expliquer sur le fait que, lors de la présentation des comptes de l'exercice clos le 31 décembre 1995, l'attention des associés avait été attirée sur la réévaluation, un vote spécial étant même intervenu sur ce point, ce qui implique que les prévenus avaient agi sans volonté de dissimulation, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'élément intentionnel de l'infraction, et a violé les textes susvisés" ;

Attendu que, pour déclarer Sandrine Y..., gérante de droit de la société Vosges Lavage, et Hervé X..., gérant de fait de cette société, coupables de présentation de comptes annuels inexacts, les juges du second degré énoncent que, dans le bilan du 31 décembre 1995, en contradiction avec les obligations comptables prévues à l'article 12, devenu l'article L. 123-18, du Code de commerce, une réévaluation libre des éléments de l'actif immobilisé a été effectuée tant sur les éléments corporels qu'incorporels, que cette réévaluation a évité une réduction des capitaux propres à une valeur inférieure à la moitié du capital social qui aurait permis à tout intéressé de demander en justice la dissolution de la société, et que la présentation du bilan précité ne donnait pas ainsi une image fidèle du résultat des opérations de l'exercice afin de dissimuler la situation gravement obérée de l'entreprise ;

Qu'ils ajoutent que, selon l'expert-comptable, c'est à la demande expresse des prévenus, la demande étant signée par la gérante, qu'il a procédé, malgré ses réticences qu'il a exprimées aux intéressés, à cette réévaluation libre par dérogation aux règles comptables, tout en mentionnant l'opération en annexe du bilan ;

Qu'ils retiennent qu'Hervé X..., associé majoritaire, a été l'unique interlocuteur du cabinet fiscal et de l'expert-comptable de la société, se désignant comme le représentant de celle-ci, se comportant en dirigeant de fait, assurant le suivi comptable et demandant la réévaluation du bilan, qu'il a changé d'expert-comptable lorsque le précédent a refusé d'effectuer une réévaluation des immobilisations incorporelles pour le bilan 1994, et qu'ainsi, l'ensemble des éléments de fait et des témoignages recueillis au cours de l'enquête et de l'information démontrent son implication et sa participation directe dans la gestion de la société ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations relevant de son appréciation souveraine, la cour d'appel, qui a caractérisé, sans insuffisance ni contradiction, les éléments tant matériels qu'intentionnel du délit reproché ainsi que la gérance de fait d'Hervé X..., a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme de la Lance conseiller rapporteur, M. Pibouleau conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 01-87298
Date de la décision : 16/10/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, chambre correctionnelle, 04 septembre 2001


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 16 oct. 2002, pourvoi n°01-87298


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:01.87298
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