AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 14 février 2001, n° RG 00/17790), que M. X... et Mme Y..., respectivement usufruitier et nue-propriétaire du Domaine de la Bastide blanche, exploitation viticole située à Croix-Valmer, ont été mis en redressement judiciaire, le 30 janvier 1992, et ont bénéficié d'un plan de continuation le 8 septembre 1992 ; que, par jugements du 23 juin 1998, le tribunal de commerce a prononcé la résolution des plans de continuation de M. X... et Mme Y... et ouvert des procédures de redressement judiciaire, étendues à la société Australia dont Mme Y... était le principal actionnaire ; que, par jugement du 12 septembre 2000, le tribunal a arrêté le plan de cession des actifs dépendant du Domaine de la Croix, pour le prix de 37 500 000 francs et des actifs dépendant du Domaine de la Bastide blanche pour le prix de 33 000 000 francs au profit de la société Bolloré investissement avec faculté de substitution ; que M. X..., Mme Y... et la société Australia (les débiteurs) ont formé un appel-nullité contre le jugement ; que la cour d'appel a déclaré l'appel irrecevable ;
Sur la recevabilité du pourvoi, contestée par la défense :
Attendu que les défendeurs soutiennent que le pourvoi est irrecevable contre les arrêts statuant sur un plan de cession ;
Mais attendu que les débiteurs ont formé un pourvoi contre l'arrêt qui a déclaré leur appel nullité irrecevable ; que leur pourvoi, fondé sur un grief né de la décision, est recevable ;
Et sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu que les débiteurs font grief à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait, alors, selon le moyen :
1 / que commet un excès de pouvoir le juge qui arrête un plan de cession portant sur des biens qui ne constituent pas une "entreprise" au sens de l'article 81 de la loi du 25 janvier 1985, dans sa rédaction antérieure à la loi du 10 juin 1994 ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé le texte précité ensemble l'article 174 de la même loi ;
2 / que le tribunal ne peut ordonner la cession d'actifs immobiliers ne faisant pas l'objet d'une exploitation sous forme d'entreprise au sens de l'article 81 de la loi du 25 janvier 1985 applicable en la cause ; qu'en se bornant, pour écarter le moyen des débiteurs tiré de ce que les biens cédés ne constituaient pas une entreprise, à affirmer que tel était le cas, les biens en cause ayant fait antérieurement l'objet d'un premier plan de continuation, intervenu le 8 septembre 1992, sans préciser la nature de l'exploitation des biens faisant l'objet de la cession ordonnée par le tribunal ni rechercher si, au jour de l'adoption du plan de cession, le 12 septembre 2000, les biens en cause constituaient toujours une entreprise dans la mesure où les débiteurs n'exploitaient plus les domaines et n'avaient plus que la qualité de bailleurs de terrains et de bâtiments, et où la société Bolloré Investissement, repreneur, s'était bornée à proposer un prix d'acquisition des propriétés sans faire état d'un quelconque projet d'activité constitutive d'une entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 81, 82 et 85 de la loi du 25 janvier 1985 dans sa rédaction applicable en la cause ensemble l'article 174 de la même loi ;
3 / que le défaut de réponse à conclusions équivaut au défaut de motifs ; qu'en l'espèce, les demandeurs au pourvoi faisaient valoir, dans leurs conclusions d'appel, que les dispositions de la loi du 9 juillet 1999 relatives au contrôle des structures agricoles et à l'obtention de l'agrément préalable étaient applicables à la cause, et que le tribunal avait commis un excès de pouvoir en ordonnant la cession des biens litigieux à la société Bolloré Investissement sans s'assurer au préalable du respect de ces dispositions ; qu'en s'abstenant de répondre aux conclusions des débiteurs, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt retient que les biens cédés constituent une entreprise qui avait fait antérieurement l'objet de plans de continuation au profit des débiteurs et que l'offre de reprise faite par la société Bolloré investissement dans la procédure de redressement judiciaire ouverte après résolution de ces plans répondait aux exigences de l'article 83 de la loi du 25 janvier 1985, de sorte que le jugement n'est entaché d'aucun excès de pouvoir ; que la cour d'appel a ainsi légalement justifié sa décision ;
Attendu, en second lieu, que le défaut de réponse à conclusions allégué ne constitue pas la violation d'un principe fondamental de la procédure ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... M. X... et la société Australia aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette toutes les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le conseiller doyen faisant fonctions de président en son audience publique du quinze octobre deux mille deux.