AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Champagne-Bourgogne de sa reprise d'instance aux lieu et place de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de l'Aube et de la Haute-Marne ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Vu les articles 1326 et 1347 du Code civil ;
Attendu, selon l'arrêt déféré, que, par acte notarié du 3 mai 1990, la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel de l'Aube et de la Haute-Marne (la Caisse), aux droits de laquelle est venue la Caisse de Champagne-Bourgogne, a consenti à la société civile immobilière Les Terrasses de Reuilly un prêt d'un montant de 12 500 000 francs ; que, par acte sous seing privé, M. X... a donné procuration à M. Y... de se porter caution personnelle et solidaire en son nom à concurrence de 60 % du montant du prêt ; que celui-ci n'ayant pas été remboursé à l'échéance, la Caisse a fait délivrer à l'encontre de la caution un commandement de saisie immobilière sur un immeuble lui appartenant ;
que M. X... ayant formé un incident aux fins d'annulation du commandement, la cour d'appel a, par arrêt du 11 décembre 1997, retenu que les formalités de l'article 1326 du Code civil, applicables au mandat de se porter caution, n'avaient pas été respectées, et a invité la Caisse à justifier d'éléments extrinsèques qui soient de nature à compléter le commencement de preuve par écrit que constituait la procuration litigieuse et qui permettent d'établir que M. X... avait connaissance du montant et de la portée de son engagement ;
Attendu que pour constater que la Caisse ne rapportait pas la preuve de l'engagement de caution de M. X... et pour annuler le commandement et les poursuites ultérieures, l'arrêt retient que la Caisse ne peut se prévaloir du contenu de la procuration elle-même, s'agissant d'éléments intrinsèques à l'acte ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, après avoir relevé que, par arrêt du 11 décembre 1997, elle avait constaté que la procuration donnée par M. X... à M. Y... était revêtue de la formule "lu et approuvé, bon pour cautionnement solidaire", ce dont il résultait que cet acte constituait un commencement de preuve par écrit du cautionnement, sans rechercher si cette mention incomplète n'avait pas été portée par la caution au pied d'un acte définissant l'engagement de la société débitrice et contenant toutes les précisions sur la portée, la nature et les modalités de remboursement de l'obligation cautionnée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 octobre 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le conseiller doyen faisant fonctions de président en son audience publique du premier octobre deux mille deux.