AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi provoqué, réunis :
Vu l'article L. 143-3 du Code rural, ensemble l'article L. 143-2 du même Code ;
Attendu qu'à peine de nullité, la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural doit justifier sa décision de préemption par référence explicite et motivée à l'un ou à plusieurs des objectifs ci-dessus définis ; qu'elle doit également motiver et publier la décision de rétrocession et annoncer préalablement à toute rétrocession son intention de mettre en vente les fonds acquis par préemption ou à l'amiable ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 16 novembre 2000), que la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural de l'Aveyron, du Lot et du Tarn (la SAFALT) a exercé son droit de préemption sur une parcelle mise en vente par adjudication ; qu'elle l'a rétrocédée ultérieurement aux consorts X... ; que M. Y..., candidat évincé à la rétrocession, a assigné la SAFALT et les bénéficiaires en nullité de la rétrocession ;
Attendu que pour accueillir la demande, l'arrêt retient que la décision de rétrocession était justifiée par la notion d'agrandissement de l'exploitation agricole telle qu'elle résultait des objectifs généraux régissant l'intervention des SAFER édictés par l'article L. 143-2 du Code rural, mais ignorait les motifs précis de la préemption définie par la SAFALT, et que la liberté que conserve la SAFALT jusqu'à la décision finale en vertu de l'article R. 142-2 du Code rural ne saurait justifier la violation des critères qu'elle a elle-même édictés lors de la préemption ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'une SAFER peut avoir à retenir, pour motiver une décision de rétrocession, des objectifs différents de ceux visés dans la décision de préemption, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 novembre 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne M. Y... aux dépens des pourvois ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne M. Y... à payer aux consorts X... la somme de 1 900 euros ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. Y... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq septembre deux mille deux.