AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que Marie-Louise X..., veuve Y..., est décédée le 21 décembre 1994 à l'âge de 89 ans, sans héritiers en ligne directe, en laissant un testament authentique reçu le 26 octobre 1994 par Mme Z..., notaire, assistée de deux témoins, Mlle A... et Mme B..., aux termes duquel elle instituait pour légataire universelle l'Association diocésaine de Lyon, sous réserve de deux legs à titre particulier consentis respectivement à M. C... et à M. D... ; qu'après avoir fait délivrer aux témoins instrumentaires une sommation interpellative leur demandant "qui les avait requis d'assister à la dictée du testament" et "quels mots précis avait prononcé la malade", deux héritiers collatéraux, Mme Josette E..., épouse F..., et M. Michel E... (ci-après les consorts E...) ont assigné les légataires en nullité du testament, puis ont formé une inscription de faux à l'encontre de l'acte authentique ainsi dressé, en opposant à ses énonciations les réponses données par les témoins à la sommation ;
qu'après avoir, par le premier arrêt attaqué du 10 juin 1999, sursis à statuer sur le fond pour un examen séparé de l'inscription de faux incidente, la cour d'appel de Lyon a, par le second arrêt attaqué du 28 octobre 1999, déclaré celle-ci non fondée ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que les consorts E... font grief à la cour d'appel d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :
1 / qu'ils faisaient valoir qu'il résultait du testament que la mention selon laquelle les témoins instrumentaires avaient été requis conformément à la loi, choisis et appelés par la testatrice était contredite par leurs réponses à la sommation interpellative où ils déclaraient avoir été requis par le notaire, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait , la cour d'appel a violé les articles 971 et suivants du Code civil ;
2 / qu'en se fondant sur l'attestation de M. D..., légataire à titre particulier, selon laquelle la testatrice avait demandé au notaire de venir recevoir son testament "avec tout ce qu'il fallait", pour en déduire que la testatrice avait chargé son notaire d'effectuer toutes les diligences nécessaires pour recueillir son testament, ce qui comportait d'une façon implicite le choix des témoins, la cour d'appel a violé les articles 971 et suivants, 975 et 1315 du Code civil ;
Mais attendu que, d'une part, si, aux termes de l'article 971 du Code civil, le testament par acte public peut être reçu par un notaire assisté de deux témoins, aucune disposition légale ne précise par qui et comment ces derniers doivent être choisis, l'article 975 interdisant simplement de les prendre parmi les légataires ou leurs parents ou alliés ;
qu'ayant constaté que cette dernière prescription avait été respectée, la cour d'appel en a à bon droit déduit que la mention selon laquelle ils avaient été requis conformément à la loi était exacte ; que, d'autre part, les dispositions de l'article 975 du Code civil ne concernant que les témoins instrumentaires, la cour d'appel a pu se référer aux déclarations de M. D... pour juger que la mention surabondante de l'acte selon laquelle les témoins avaient été choisis et appelés par la testatrice n'était pas fausse, dès lors qu'en demandant à son notaire de "faire le nécessaire" pour recevoir son testament, Mme Y... l'avait implicitement chargé de choisir et d'appeler les témoins devant l'assister ;
d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le second moyen :
Attendu que les consorts E... font encore grief à la cour d'appel d'avoir déclaré non fondée leur inscription de faux, en retenant qu'ils ne peuvent prétendre que le notaire a faussement mentionné dans l'acte que le testament a été écrit en entier de sa main tel qu'il lui a été dicté, sans répondre aux conclusions, dans lesquelles ils invitaient la cour d'appel à constater que les témoins n'avaient pas entendu la dictée par la testatrice du testament, les témoins faisant état de ce que la malade parlait difficilement ;
Mais attendu qu'ayant constaté que les témoins déclaraient avoir été présents lorsque la testatrice parlait au notaire et relevé que celui-ci avait pu légitimement donner une forme juridique aux propos par lui recueillis en mentionnant les précisions nécessaires à l'efficacité de l'acte, la cour d'appel a, répondant ainsi aux conclusions prétendument omises, légalement justifié sa décision de tenir pour exacte la mention contestée ; que le moyen n'est pas davantage fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts E... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes des parties ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit septembre deux mille deux.